Alison Cavaille

Épisode 243 – Quand la vie t’oblige à te regarder en face, prise de poids, anxiété : les déclics d’Alison Cavaillé


On a toutes et tous grandi avec un rapport au corps différent et aujourd’hui j’avais envie que vous puissiez entendre le témoignage puissant d’Alison Cavaillé qui après des années à lutter contre son corps, a découvert le chemin de la force, a découvert le chemin de la puissance de son corps.

J’ai rencontré Alison il y a bientôt 6 ans, alors que sa marque TajineBanane commençait à se faire un nom.

Je l’ai vu évoluer, gérer 3 enfants dont un tout petit, un allaitement long, une boite en pleine expansion, j’ai vu son stress et les premiers signes sur son corps.

La prise de poids d’abord, au fil des ans, qui est venue masquer sa sédentarité et les difficultés. 

Et puis j’ai assisté à sa renaissance. A ses multiples déclics.

J’ai vu cette femme incroyable reprendre le pouvoir et tomber d’amour pour le sport.

Cet épisode est émouvant, drôle, intense, inspirant… bref il est à l’image d’Alison et j’espère qu’il vous aidera à vous lancer si vous hésitez.

Nous avons enregistré au Club Med de Serre Chevalier lors du Podcast Club, pendant un moment privilégié, axé autour du sport justement !


🗣️ Au programme :

🔍 Rapport au corps depuis l’enfance (00:00 – 11:09)
🤰🏻 Relation toxique et maternité (11:10 – 22:58)
🍌 Changements professionnels et prise de poids (22:59 – 32:42)
🚨 Prise de conscience (32:42 – 40:51)
💪 Premiers pas vers le changement (40:51 – 51:02)
🔄 Transformation du quotidien (51:02 – 01:00:26)
📊 Bénéfices multiples et nouveau projet (01:00:26 – 01:10:54)
👨‍👩‍👧‍👦 Impact sur la famille (01:10:56 – 01:18:25)
🏋️‍♀️ Projets futurs et conclusion (01:18:25 – 01:25:18)


TRANSCRIPTION DE L’EPISODE

Clémentine

Salut Ali ! 

Alison

Coucou ! 

Clémentine

Je suis ravie de te recevoir pour la troisième fois, tu sais ça ou pas ? 

Alison

Oui, c’est vrai. Je suis une meuf qui a plein de trucs à dire. 

Clémentine

On va parler d’un sujet inédit quand même, ça c’est cool, avec toi. J’ai vraiment hâte de te recevoir. Déjà merci d’avoir accepté parce qu’on va parler un tout petit peu plus de choses intimes pour toi, le rapport au corps, tout ce qui tourne autour du déclic et des choses que tu as lancées ces deux dernières années pour prendre soin de toi. Mais déjà, j’avais envie de savoir, est-ce que tu peux me raconter ton rapport au corps depuis ton enfance ? Comment tu te voyais petite ? Qu’est-ce qu’on disait de prendre soin de soi, de ton corps à cette époque-là ? 

Alison

Alors déjà, merci beaucoup pour l’invitation. C’était une petite blague quand je disais que j’adorais ça. Tu le sais très bien, j’aime pas trop ça, mais avec toi je me sens… En sécurité, donc c’est bon à dire. Merci à vous de m’écouter. Effectivement, on va parler de sujets un peu plus intimes, puisque autant je suis capable de parler de boulot, de tout ça, mais le corps, je pense que comme tout à chacun, on a tous un rapport et une histoire avec notre corps. Petite, on va pas faire toute la rétrospective de ma vie, ça va être long, mais on va dire petite et adolescente, on va plus s’intéresser à l’adolescence. J’étais ce qu’on appelait la petite fille un peu bouboule. J’ai toujours eu des rondeurs et était assez complexée. Je me rappelle de tous ces moments à la piscine.

Je me suis déjà fait insulter dans la cour de récré, j’étais un peu la petite grosse, c’était vraiment le truc. Et donc j’étais pas à l’aise dans mon corps, c’était pas réellement un énorme, énorme sujet. Comme après à l’âge adulte, j’ai pu apprendre qu’il y avait certaines personnes qui avaient vraiment développé des troubles compulsifs alimentaires, plein de névroses ou de choses assez difficiles à vivre avec leur corps. Je pense que ça m’est pas arrivé et la chance que j’ai eue, c’est que dans ma famille, le corps n’était pas un sujet. On était une enveloppe, et on est une enveloppe, mais que tu sois belle, grosse, maigre, moche, j’en sais rien, ce qu’on peut… Mes parents, c’était pas une échelle de valeur pour eux. Donc au fond, moi ça m’a…

Je complexais parce que je sentais que c’était dommage, je me faisais insulter, ou j’avais pas le mec que j’avais envie d’avoir, mais c’était plus un… Genre comme si c’était une fatalité quoi. Genre j’étais une petite grosse donc je développais d’autres trucs, je faisais rire les autres et je me cachais derrière tout ça. Jusqu’à je pense la première ou terminale, je sais pas, il y a eu un été, je sais pas ce que j’ai fait, j’ai dû vivre d’amour et d’eau fraîche mais… J’ai perdu un peu de poids. Et quand je suis revenue à l’école, comme si le regard des autres avait totalement changé sur moi, en quelques mois, j’étais devenue un peu plus, je sais pas, un peu plus regardable ou j’en sais rien. Je commençais à voir quelques mecs et quelques… Succès relatifs, mais qui était déjà pas mal.

Et là, j’ai senti que mon corps avait soit une puissance, soit un impact, et qu’il était possible de ressentir des trucs assez positifs, mais dans le regard des autres, à travers le regard des autres. Donc c’est les premières séductions, c’est les premiers mecs, c’est les premiers flirts, c’est ci, c’est ça. Et très rapidement, moi dans mon histoire, donc là j’ai 35 ans, j’ai trois enfants, et j’ai été maman ado, parce que je suis tombée enceinte à l’âge de 18 ans, donc c’était très fruit. 

Clémentine

Ça a duré un été. 

Alison

Ça a duré un été, je me suis retrouvée un peu en bombe et paf, je rigole. Et là je suis tombée enceinte comme plein, finalement comme des centaines de milliers de femmes, de jeunes femmes et j’ai eu le choix, parce qu’on est dans un pays où on a le choix, d’avorter ou de garder ma grossesse et je crois qu’à ce moment-là j’ai essayé d’avorter, j’y ai essayé. C’est assez marrant d’entendre quelqu’un dire j’ai essayé d’avorter. Mais je voulais autant de ce bébé que je pensais ne pas être capable de l’avoir, que ce n’était pas ni le bon moment. Puis tout autour de moi, mon environnement social, à part mes parents qui ont tout de suite été pro-choix, donc mon choix, mon corps, mais tout le reste c’était genre ne fais surtout pas ça, tu vas rater ta vie.

Et j’ai essayé d’avorter, j’y suis allée et puis j’ai pas réussi et j’ai un petit garçon qui… Un petit garçon ! C’est un ado qui a 17 ans aujourd’hui avec qui on a une relation incroyable. Mais cette étape grossesse dans mon cheminement de corps, elle n’est pas anodine puisque je suis passée d’un corps d’adolescente à un corps de femme du jour au lendemain, à un corps que tu commences un peu à kiffer ou juste à apprivoiser et à savoir qu’il peut avoir de l’impact, qu’il peut… Séduire, qui peut te plaire quand tu te croises dans un miroir, que tu peux mettre en valeur ou pas, etc.

À un corps que tu subis, puisque la grossesse est un corps qu’on subit je trouve, plus ou moins bien évidemment en fonction de tes choix de vie, mais à l’époque c’était totalement subi, et avec un corps qui devient vraiment au summum de son pouvoir de femme, donc de mère, et qui rapidement entre guillemets, moi c’est comme ça que je l’ai ressenti, qui rapidement a été dégradée au moment même où je commençais à me dire « j’ai ça, j’ai ça ». Donc je me suis retrouvée avec un corps postpartum, avec un corps avec un ventre un peu plus mou, des seins qui sont bien moins fermes et bien moins hauts quelques mois auparavant. Et donc je crois que dans ma construction, déjà, il y a eu un truc de… Je ne sais pas trop… Je ne sais pas où me placer.

Ce corps, je n’ai même pas le temps de comprendre comment il fonctionne, qu’il a déjà été transformé, qu’il appartient déjà aussi à quelqu’un d’autre, entre guillemets, puisque j’ai essayé d’allaiter mon fils à 18 ans, donc je me suis dit que c’était… Quelque chose de naturel, parce que j’avais vu que ma mère était mon frère, donc je prends le bébé, je le mets au sein et ça ne se passe pas vraiment comme ça, donc ça a été beaucoup plus difficile, donc ça m’a mis aussi un rapport à ma poitrine différent. Et voilà, j’ai grandi comme ça. Après, j’ai une relation qui a été extrêmement toxique avec le papa de mon fils Noam, avec qui j’ai eu une petite sœur qui s’appelle Mali, 4-5 ans plus tard. Et cette relation a été extrêmement difficile parce que ça a été aussi ma première relation d’amour.

Qui plus est familiale, et sur le long sexuel avec qui j’ai eu mes premiers rapports et surtout mon premier miroir, ça a été lui, puisque comme je le disais, je pense que je me suis construite aussi avec le regard des autres, sans penser que j’avais le temps de me construire un regard sur moi-même. Et son regard à lui, et dans notre relation, c’était que mensonges, violences. Notre relation a été très très difficile, et donc je me suis construit avec très peu d’estime de ma personne et de ce que je pouvais représenter. Il y a eu énormément de tromperies, énormément de choses qui maintenant, je ne sais pas combien d’années plus tard, ça y est, c’est pansé et c’est derrière.

Mais finalement, quand tu te construis en tant que femme et quand tu es trompée tout le temps, tu as juste la sensation d’être pas grand-chose qui vaut grand-chose. Et quand tu es salie, trompée, mentie, tu as quand même… Je pense que c’est plus facile à gérer quand on est déjà bien construit que quand on est en construction. Et voilà. Jusqu’à maintenant, à peu près. 

Clémentine

T’avais quel rapport avec le sport quand t’es devenue adolescente ? Est-ce que le sport faisait partie de vos routines familiales ? Est-ce que t’as vu tes parents prendre soin de leur corps à travers le sport ? Est-ce que t’es allée à des compétitions ? Est-ce qu’à l’école tu participais à des choses ? Ça avait quelle place dans ta vie le sport ? 

Alison

Alors le sport n’avait absolument aucune place dans ma vie. Mon frère faisait du sport, mon petit frère à 4 ans et demie de moins que moi, il faisait du foot pendant des années. Je pense que mon père était actif, pas forcément sportif, mais actif quand il était jeune. Et ma mère, je ne l’ai jamais vue faire du sport. Le sport et l’activité physique n’avaient pas grande valeur chez moi. Je pense que mes parents, ça ne leur aurait pas dérangé que j’en fasse. J’ai même essayé de faire un peu de foot. Mais dès qu’il faisait un peu froid ou qu’il pleuvait, j’y allais pas. C’était pas dans leur échelle de valeur, c’était pas quelque chose qu’on… On a regardé la Coupe du Monde comme tout le monde, mais c’était pas un sujet chez nous.

On avait des amis qui allaient courir et tout, mais j’ai jamais vu mes parents… Le seul sport, la seule activité physique que je me rappelle avoir fait avec eux, C’était la marche digestive du dimanche en famille, ou la petite balade autour de notre maison puisqu’on habitait à la campagne une fois de temps en temps, ou prendre un vélo. Mais ça n’a jamais été hyper significatif ni marquant dans nos relations. En tout cas, ça n’a pas été un fil conducteur chez moi. Et le seul sport que je faisais réellement c’était celui qu’on faisait au collège ou au lycée.

Et là clairement, bah t’inquiète je suis genre la pro de la dispense, la pro du j’ai mal au ventre, j’ai mal à la tête, vas-y viens je te fais une blague, je t’enfume et je te laisse faire deux tours de plus et moi j’attends derrière un arbre. La gymnastique, le pire moment de ma vie, où tout le monde faisait des trucs de dingue sur les bars et tout, et moi j’avais pris, t’sais t’as toujours plusieurs options, et moi j’avais pris la petite option où tu faisais une roulade, clac, tu t’arrêtais, tu faisais ça et tu mettais deux points de plus ! Et ça c’était moi quoi ! Et que des trucs comme ça. J’étais la nulle, je pense que j’étais la nulle en sport, de ouf. Mais sans me dire que j’étais nulle en sport, c’était juste pas fait pour moi.

Tout comme, je sais pas, il y en a qui vont dire qu’ils sont forts en français, forts en maths. Moi, j’étais nulle en sport. Et il n’y avait même pas de sujet à me dire, peut-être que je peux évoluer sur ce trimestre, ou peut-être que ce sport-là, le volet, ça a l’air un peu pas mal, je vais me donner un peu et puis je vais m’éclater. Non, j’étais nulle en sport. Et pour moi, quand je voyais les deux heures de sport dans l’agenda, c’était des deux heures où je n’allais rien faire. J’allais juste papoter, rigoler et perdre du temps. Et dans le meilleur des cas, me marrer dans le pire des cas, c’est un vrai supplice parce que les premières séances de sport, enfin du moins les cours de sport collège lycée, je trouve que c’est un moment où tu crées des réelles…

En fait, ça clive énormément parce qu’il y a celles et ceux qui ont un rapport normal avec l’activité physique. Il y a celles et ceux qui arrivent avec un handicap moins 20. Je ne parle même pas d’handicap physique et mental parce que là, on est encore sur une autre stratosphère, mais l’handicap moins 20 de zéro éducation au sport. Et donc, en fait, on arrive déjà dans nos têtes en se disant on est complètement naze, on est nul. Et c’est que des moments, je trouve, hyper discriminatoires, même si peut-être qu’aujourd’hui ça a changé parce que je suis un dinosaure. Mais nous, il fallait passer devant tout le monde. À la natation, il y avait quand même des groupes, et ça parait logique, mais des groupes de sport en fonction des niveaux. T’es forcément direct dans le sport, dans le niveau le plus nul.

Et même si on te dit oui c’est niveau débutant, ben non, tu sais que les populaires ils sont dans le niveau 4, toi t’es niveau 1, t’es avec ton bonnet tu ressembles à rien, t’es ado t’as tes petits seins comme ça qui sont à travers le maillot, tu plonges, les gens ils plongent, toi tu fais une bombe mais t’as même pas voulu faire une bombe. Genre t’as quand même tout un truc où… Tout est humiliant et tu te sens humiliée, parce que je pense que ça l’est pas forcément, mais tu te sens humiliée. Et moi je me rappelle quand j’avais piscine, la veille c’était angoisse sur angoisse. Le corps, je vais être naze, les meufs elles faisaient une brasse, tu as l’impression que c’était fluide, je prenais l’eau et tout.

Il n’y a en fait aucun feeling avec l’activité sportive et même les personnes qui débutaient le cross et tout qui n’avaient pas forcément fait. Étant donné qu’elles avaient un passif ou une certaine affinité avec l’activité physique, c’était faisable. Alors que quand tu as zéro affinité avec l’activité physique, ton corps ne sait absolument pas se mouvoir dans l’espace, tu ne sais pas aligner un pied devant l’autre, tu n’as pas de feeling. Et plus tu rajoutes à ça quelques complexes, quelques regards, la gymnastique pareil, on se rappelle tous, en gym tu passais devant tout le monde. Tu passais devant tout le monde. Donc si t’étais cool et t’étais à l’aise, c’était génial, mais quand t’étais nulle, tout le monde t’attendait comme ça. Les gens, ils savaient que ça allait être le moment galerie de la semaine. C’était toi, en fait.

Et tu fais une petite blague, tu rigoles, ça dédramatise, mais au fond de toi, t’es fracassée, c’est hyper dur. Et après, dans le bulletin scolaire, quand tu demandes à tes parents… C’est marrant parce que ça, j’ai oublié pendant très longtemps et je m’en suis rendue compte en le faisant moi-même. Que je crois que mes parents ne regardaient même pas la ligne sport, ils n’en avaient strictement rien à faire. Déjà parce qu’ils savaient que je devais avoir 10 ou 11, mais je pense que la meuf mettait 10 ou 11 parce que j’ai fait acte de présence. Et deuxièmement, comme je me répète, c’était pas dans leur échelle de valeur, c’était pas une matière qui était importante et donc on s’en foutait complet. Et moi, c’était une matière où je m’en foutais d’avoir une vieille appréciation parce qu’elle comptait pas.

Et la plupart du temps, en plus, l’activité physique, elle est tout en bas, à côté de la musique. Et on se dit toujours, le sport et la musique, tout le monde s’en fout. Et avec l’art plastique aussi. Et donc ça a fait ça et si je te dis ça c’est parce que je l’ai fait aussi avec mes enfants et je m’en rends compte maintenant et je m’en suis rendue compte littéralement il y a deux semaines quand j’ai reçu le bulletin scolaire de ma fille qui est en cinquième. J’ai regardé français maths et je suis descendue, j’ai regardé le sport en troisième et ça m’a fait comme un électrochoc de waouh c’est incroyable t’es partie voir le sport, parce que je sais qu’elle est forte en sport, je sais qu’elle est à l’aise et que c’est quelque chose qui lui plaît énormément.

Et je me suis rendu compte que, dans mon échelle de valeur, le sport a une place hyper importante. Je n’avais jamais regardé cette ligne, ou du moins je ne m’étais jamais rendu compte que c’était un sujet pour moi. Et c’est à ce moment-là que j’ai capté que tout ça, on se le traîne, et finalement, le… Comment dire ? La manière dont tes parents ou ta société ou ton environnement social t’amènent dans le sport détermine tellement l’adulte demain. 

Clémentine

Et ce qui est fou dans ton histoire quand même, donc tu as bien expliqué, tu as trois enfants, tu as eu un petit garçon ensuite avec Raphaël qui a été un invité du podcast, je vous encourage à écouter son épisode parce qu’il parle d’être beau-père avant d’être père, Mais surtout Raphaël est un ancien sportif de haut niveau, c’est-à-dire que quand tu le rencontres c’est un joueur de rugby pro, donc le sport c’est toute sa vie. Le sport prend une place énorme, alors que toi le sport n’a aucune importance. Donc c’est marrant quand même. 

Alison

C’est un des premiers trucs qui m’a fait peur quand on s’est mis ensemble. En fait, c’était trop bizarre. J’avais peur que ce soit un mec boring qui compte ses haricots verts et qui se lève à 5h du matin pour faire trois pompes au pied du lit et qui me dise, je sais pas moi, dès le matin, tu te lèves, tu te bouges, je sais pas pourquoi. J’avais cette image de, il va me faire ça ou alors il va aller au sport et ça sera toute sa vie et en fait nous, enfin moi en tout cas, je vais pas compter parce que ça sera entraînement, entraînement, entraînement. J’avais cette image là où, pire, je me disais, il doit être forcément teubé. Il doit être forcément bête, puisqu’il est sportif. 

Clémentine

Le cliché qu’on associe en France, en tout cas, sportif, qui n’a pas d’intelligence. Et ce n’était pas le cas. 

Alison

Il est un peu bête. Non, ce n’est pas du tout le cas. Pas du tout. Non, pas du tout. 

Clémentine

Mais donc tu te mets avec Raphaël, vous avez ton petit garçon, ton dernier petit garçon, Lou, s’ensuit une aventure entrepreneuriale avec Tagine Banane, je vous encourage aussi à écouter un des premiers épisodes que j’ai enregistrés du podcast qui est avec toi. 

Alison

Je pense que Tagine Banane, quand j’enregistrais, ça faisait à peine quelques mois. 

Clémentine

Ouais, ça faisait 8 mois je crois, t’avais pas encore fêté les 1 an. 

Alison

Je vais le réécouter. 

Clémentine

Il y avait Mali dans la salle, je te souviens avec toi, qui avait 6-7 ans. Et là ton corps c’est une autre dimension parce que tu as des interventions chirurgicales, parce que tu as failli mourir, parce que ton enfant est né prématuré. Quand tu sors de l’hôpital après plusieurs semaines, jours, après un mois, comment tu regardes ton corps ?

Alison

Pour résumer cet épisode de ma vie, comme tu dis j’ai rencontré Rafa. Peut-être deux ans plus tard, j’ai un gros problème avec les chiffres donc à tout moment je me trompe, ça se trouve c’était huit ans plus tard. Non je rigole. On a notre petit garçon Lou. Et donc je tombe enceinte, la grossesse se passe bien et à 8 mois de grossesse à peu près, 7 mois et demi, j’ai très très mal, je vomis et tout. Bref, je vais à l’hôpital et on se rend compte que je fais une appendicite pendant ma grossesse. Donc l’appendicite normalement c’est le genre de truc que tu fais à 7 ans et demi en colo, mais pas enceinte. C’était pas cool.

Et là, je me fais opérer une première fois avec lui, je vous passe les détails, ça se passe pas très bien, je me retrouve à être réhospitalisée une semaine après, césarienne d’urgence, pour sauver mon bébé qui fut sauf, heureusement. Et pour me sauver à moi aussi, parce que j’étais en train de faire un choc toxique. Et trois jours après, la césarienne d’urgence, donc césarienne d’urgence, déjà je ferme les yeux, je me réveille, mon enfant est né, j’ai rien vu, rien senti, rien vécu. Et césarienne d’urgence aussi dans la douleur, parce que je suis en plein choc toxique, donc j’ai le ventre hyper douloureux, une fièvre de cheval, quelque chose d’hyper traumatique finalement.

Et trois jours après la naissance de mon enfant, je repars au bloc et là on fait ce qu’on appelle une laparotomie, donc c’est ouvrir le ventre en deux de façon verticale pour aller parer, ce que ça veut dire, pour aller nettoyer le péritoine de toute cette infection, s’en est suivit des drains, pas mal de choses hardos, et la naissance de mon fils. Et donc si on a perdu ta question ?

Clémentine

Et donc ton rapport au corps quand tu découvres finalement les cicatrices, la différence du avant-après ? 

Alison

Assez mitigée dans le sens où j’ai failli mourir et j’ai la sensation que mon corps est défaillant et faible puisque là je l’ai, je passais sincèrement à deux doigts de la mort et mon bébé aussi, donc je l’ai trouvé nul, de même pas avoir réussi à se relever tout seul d’une appendicite qui est assez bénin normalement, et en même temps extrêmement fort de m’avoir donné un bébé, de m’avoir laissé en vie et de m’avoir permis dans la suite de réussir à allaiter mon bébé, ce qui est tout le centre et le socle de l’histoire de ma vie entrepreneuriale derrière. Et je sors de la maternité avec tous mes kilos envolés de grossesse bien évidemment, puisque j’ai été nourrie avec une sonde dans le nez et dans la bouche, donc on ressort un peu plus mince.

Et là encore une fois de plus, le regard des autres, où je sors et la première chose qu’on me dit c’est mais t’as tout récupéré. En fait j’ai juste failli crever. Et ça te ramène quelque chose, ça te ramène quelque chose. Ça renourrit l’ado, l’enfant, qui a été valorisé qu’à partir du moment où elle a perdu du poids. Donc je suis sortie de tout ça pas si mal, finalement. Pas si mal parce que je suis en vie, parce que je rentre dans mon jean direct, façon de parler, je pouvais absolument pas mettre de jean pendant trois mois, mais… Pas si mal. Ce qui s’est passé dans la foulée, c’est qu’on a un peu maso un an plus tard. On a voulu agrandir notre famille parce qu’on avait vraiment envie d’avoir deux enfants ensemble et rapprochés. Et puis après, on n’en parle plus.

Donc cette grossesse, on l’a eue. Et il s’avère que ça a été une grossesse extra-utérine. Donc je me suis fait à nouveau opérer en urgence. J’ai perdu une trompe. Et derrière, on a essayé pendant un an d’avoir un bébé jusqu’à ce qu’on se rende compte que l’autre était trop abîmé par tout ce qui s’était passé, etc. Donc je suis infertile, je découvre à ce moment-là la stérilité de notre couple. Et je passe un an et demi, deux ans à faire le deuil d’un corps que j’ai réussi à aimer seulement dans la maternité.

Parce que c’est un moment où quand on est en surpoids ou quand on n’est pas très à l’aise dans ses baskets, en tout cas pour moi, c’est le moment où tu as le droit d’être gros, c’est le moment où ton ventre a le droit d’être gros, c’est le moment où tu le trouves beau, ce ventre qui normalement est un peu flagada, que moi je trouvais pas typique de ce qu’on aime des ventres, là il est bien rond, il est accepté par la société, on aime ton ventre rond, on aime tes gros seins, En fait, la femme enceinte, j’avais la sensation que c’était le moment où j’avais le droit d’être plus ronde. Et c’était surtout un moment où je le trouvais hyper fort. J’ai adoré être enceinte, j’ai adoré allaiter. Et c’était le seul corps que je connaissais de ma vie de femme.

Mon corps enceinte et mon corps qui porte des bébés, puisqu’en ayant eu trois enfants, j’ai à peine 35 ans. Les grossesses durent neuf mois, un petit peu plus short pour la dernière. Mais c’est des moments où je trouve mon corps puissant, je le trouve beau, je le trouve socialement accepté. Et là, on m’annonce que déjà, je ne pourrai plus vivre ce corps-là. Je vais rester toute ma vie avec le corps que j’avais là, donc un corps avec des cicatrices, flagata, que je n’aime pas de ouf et que je n’ai pas vraiment appris à aimer, que tout ce que je connais de kiff, je ne le vivrai plus. Donc qu’est-ce que je fais de tout ça ? Et voilà.

Je me retrouve il y a quelques années là-dedans avec une boîte en pleine expansion, avec une boîte qui se retrouve victime de son succès, donc avec un rythme très très très prenant. 

Clémentine

Parce qu’en gros, si je recontextualise pour ceux qui ne connaîtraient pas ton histoire, je doute qu’il y en ait beaucoup. Tu crées Tajine-Banane dans la foulée et c’est un succès immédiat et tout de suite vous avez une crise de croissance qui fait que toi tu portes sur les épaules beaucoup de stress et qui fait que tu es en postpartum avec trois enfants, avec des cicatrices, avec cette histoire qui est lourde de dire je vais plus pouvoir avoir de bébé Et tu dois. 

Alison

Je crois que je suis capable de gérer tout ça. Au moment où j’ai lancé Tagine Banane, toi tu te lances, Bliss Story se lance, et nous les nanas, les mamans, on n’est pas au courant. Tu passes par terre, on n’est pas au courant de tout ça, on ne sait pas que ça existe. Et moi je me dis, avec tout ce qui vient de se passer, avec un bébé de 6 mois, je vais lancer une boîte. Je vais perdre mes trompes, je vais perdre ma capacité à avoir des enfants, je vais perdre tout ça, puis je vais continuer, puis ça va très bien se passer, puis jamais ça va me péter à la gueule. Et puis c’est normal, et puis je viens aussi d’une famille où on ne se plaint pas.

On parlait d’échelle de valeur, mon père a une échelle de valeur qui est très propre à lui, c’est l’intelligence. Très important pour lui d’être intelligent, d’être cultivé. Ma mère c’est le travail. C’est une personne qui travaille énormément. J’étais dans mes échelles de valeur, je ne me trouvais pas trop conne, je travaillais énormément, je n’avais pas vraiment d’autres sujets à gérer et tout le reste c’était méga superficiel. Donc j’ai avancé comme ça en mettant des couches et en mettant des couches. Il y a quelque chose aussi, c’est qu’on parlait d’activité physique, ma vie a été complètement faite sans activité physique mais avant d’être chef d’entreprise j’étais aide-soignante. Et au-delà du sport, j’étais en activité physique quotidienne. Une aide-soignante travaille énormément avec son corps. Tu fais 150 000 pas dans les couloirs, tu manipules des patients, donc tu utilises ta force, tu utilises ton corps entier.

Quand tu fais, à l’époque, je ne sais pas moi, je devais faire 66 kg parce que pour le coup, après les grossesses, avec le rythme de boulot, les deux enfants, j’avais quitté mon ex, j’étais maman solo et tout, tu gagnes 500 balles par mois, il y a trois steaks à donner, tu les donnes à tes enfants, tu ne les manges pas. Il y a une réalité de précarité aussi là-dedans. Et donc quand tu vas faire tes dix mille pas dans ton couloir, je te dis que ton corps est maintenu. Et ça, je suis restée là-dedans et c’était suffisant. Parce que j’avais un corps qui était en activité. Et donc quand j’ai arrêté ce boulot, que je me suis retrouvée avec Tajine Banane, mon train de vie a changé aussi. Et avec le recul, le fait de gagner de l’argent m’a fait grossir aussi.

Je me suis fait beaucoup plus de restos, je me suis fait beaucoup plus plaisir. J’étais un peu dans un truc d’abondance aussi, quelque chose que je n’avais pas forcément trop vécu, mode Club Med et compagnie. Eh bien mine de rien, c’est quand même un changement total de mode de vie et plus de marche, plus de patients à manipuler, assise derrière un bureau pour la première fois de ma vie. Et le stress, je découvre le stress alors que je suis une meuf qui n’a jamais stressé de toute ma vie. Je découvre le stress, je passe mon temps à dire que je ne suis pas stressée alors qu’en fait je suis rongée par le stress. Mon frère avec qui je partage de la boîte perd 15 kilos, j’en prends 15.

Il y a cette grossesse nerveuse que j’aurais jamais eue, il y a ce stress, il y a la sédentarité, il y a une espèce de cocktail comme ça. Qui se met en place assez pernicieux, que tu captes pas trop. Tu prends un kilo, tu prends deux kilos, je commence, Tajine Banane, je fais une taille S, je passe à la M, je passe à la L, je commence à mettre du XL, je passe au double XL. C’est marrant, je connais tout mon sizing, je connais toutes mes fringues. Et puis, ton jean est trop serré, ben t’en achètes un autre. T’achètes. Mon pull est trop court, je m’en fous, je vais dans la prod et j’en prends une autre.

Et ça a été comme ça, pendant je pense deux ans, où j’ai pris tous ces kilos, où là tu peux plus du tout te blairer parce que c’était pas des kilos que j’avais décidé de prendre, c’était pas des kilos qui dans ma tête m’appartenaient, c’était vraiment… Chaque kilo était à un poids d’un truc pas réglé, chaque kilo était à un poids de cette boîte qui commençait à me peser. Et moi, la manière dont je vois les choses, j’ai la sensation d’avoir mangé mon entreprise à ce moment-là. Genre tout ce que je vivais qui était hyper dur, j’avais aucun moyen de le défouler. Je pouvais pas le défouler sur mes gosses, je pouvais pas le défouler sur mon mari. Je l’ai défoulé dans des mauvais choix, je l’ai défoulé dans un mauvais management, je l’ai défoulé dans plein de trucs négatifs.

Et le plus gros négatif, finalement, ça a été sur moi-même, où je me suis totalement perdue dans mes valeurs, perdue dans mon image. Donc après, ça veut dire que tu te montres de moins en moins, puisque dès que t’as un retour vidéo, t’es là, oh, comment je fais grosse ! En fait, meuf, t’as pris 25 kilos. Genre la vidéo n’a rien fait, tu vois ? Voilà. Et tu te caches un peu derrière tout ça, donc tu te montres un peu moins, tu te sapes un peu plus large, tu te regardes pas. Tu baises avec ton mec, t’éteins la lumière. Tu fais en fait toute une espèce de stratégie d’évitement de toi-même. Parce que ton corps, on s’en fout. Parce qu’on t’a jamais dit que ton corps était important. On t’a jamais… Tu les vois, les meufs. Elle, si, ça y est. 

Je te parle là d’un truc de… Autant matrescence et tout, on savait pas, mais il y a trois ans, j’avais Instagram, quand même. Donc je vois les discours, les cils et ça, mais… C’est comme si c’était d’autres types de personnes. C’était des personnes sportives. Moi, je suis pas sportive. Je suis Alison, je suis plein d’autres trucs, mais je ne suis pas quelqu’un de sportif, donc je n’ai pas ce truc. J’essaye de contrôler un peu mon alimentation parce que ces 25 ou 30 kilos que j’ai pris, je ne les ai pas pris en respirant de l’air. J’ai forcément compensé sur mon assiette. Assiette que j’avais gérée très bien depuis des années. J’avais perdu mes kilos de grossesse. Je savais si je faisais un ou deux excès ?

En fait j’avais toujours cette balance interne où j’étais dans un middle, enfin j’étais ni mince ni grosse mais j’étais, comme on dit, taille moyenne dans un corps qui ne me déplaisait pas, qui ne m’a jamais plu mais qui ne me déplaisait pas et qui pouvait m’accompagner comme ça sur quelques aventures. Et là, totale perte de contrôle, je me resserre, je mange beaucoup plus que d’habitude, je mange des choses qui me font culpabiliser, je me retrouve à me coucher le soir en me disant « putain tout ce que t’as bouffé », avec des sentiments que j’avais jamais vécu et que je trouvais juste horribles, qui ne me correspondent pas d’un point de vue personnalité, je suis quelqu’un qui aime bien avoir le contrôle. Je veux quelque chose, j’y vais. Je veux quelque chose, je l’ai.

Je me donne à 150 000%, et là j’étais incapable de résister à une putain d’assiette. Alors que j’avais déjà vécu mille vies, que j’avais survécu à mille vies, j’étais pas capable de survivre à mon assiette. Et… Et ça, tu continues, tu continues. Tu vis… Parce qu’on va en parler, je pense. Petit déclic, tu vis des choses. Je vais peut-être te laisser me poser des questions. 

Clémentine

Du coup, est-ce que tu te rappelles d’un moment, je crois que tu l’as pas mal évoqué, où tu t’es vue et où tu dis à Rapha, cette phrase-là, qu’est-ce que je fais grosse ? Et lui, il te répond…

Alison

T’es comme ça. 

Clémentine

Mais avec beaucoup de bienveillance et de gentillesse. 

Alison

Il a toujours été méga honnête. Raph m’a toujours dit dans tous ses moments, parce que ça a été des questions qu’on m’a beaucoup posées, parfois même un peu sur Instagram et que je n’ai pas trop réussi à aborder puisque c’est de l’intime. Mon mec là-dedans, dans tout ça. Ce que dit mon mec ou ma meuf, c’est exactement pareil. Finalement, c’est le couple. Une personne qui t’a un point B, la vie, et puis après tu es une personne point C. En plus, en positif, en négatif, on s’en fiche. C’est le couple qui doit déterminer ça. Est-ce que ça a été un sujet pour lui ou pas ? Pendant longtemps, très très longtemps, si je vais être très honnête, j’ai cru que ça ne l’avait pas vraiment été, parce qu’il a toujours été très bienveillant avec moi, il m’a jamais…

Encore heureux, mais c’est fou de dire ça, mais malheureusement ce n’est pas le cas tout le temps. Il ne m’a jamais dénigré, il ne m’a jamais insulté, il ne m’a jamais regardé à un point où je me suis dit, oulala, ça ne va pas. Il m’a toujours désiré. Je revois des fois des photos de nous, il est trop content, c’est le même mec quoi, le même mec avec pas la même meuf. Mais en discutant avec un peu plus de recul, je me suis rendu compte qu’il y avait eu quand même plein de choses qui avaient été difficiles pour lui. Je pense que Rafa ça a toujours été un mec où, je vais être honnête, le corps, la sexualité, l’intimité est très importante pour plein de gens, mais particulièrement pour cette personne.

Me retrouver, que je sois sa nana, Et c’était pas le fait d’avoir pris des kilos qui était dérangeant. C’était le fait que sa meuf avait changé. C’était le fait que je ne veuille pas qu’il rentre dans la salle de bain avec moi, que ce que je disais, que j’éteigne la lumière, que quand on faisait l’amour, ça paraît cliché, mais en tout cas, c’était le cas. Une condition physique de chips, mine de rien, dans les ébats, c’est différent. Ça a été… Je ne parle pas pour tout le monde, mais pour moi, ça a été différent. Un petit peu moins… YOLO, quoi. Un petit peu plus straight to the point. Et ça, ça l’a coûté. Ça, c’était pénible. Ça, c’était différent. Et ça, c’était dommage parce que ce n’était pas sa meuf. Et il ne me l’a jamais remarqué.

Et ce qui était le plus dur pour lui, ça a été… Pas que je mente, mais que je veuille changer toutes les quatre matins et que je n’y arrive pas. Parce qu’il y a quand même plein de moments où tu as conscience de tout ça, donc il y a des fois où tu te caches et tu vas mettre un pantalon un peu plus large, et puis il y a toutes ces fois où tu te dis le vendredi, lundi c’est fini, ou lundi j’arrête, ou lundi je mets au sport, ou lundi je ne bouffe que de la salade, je ne sais pas ce qu’on peut se dire d’idiot, mais il y a toujours ce truc de je commence lundi et lundi c’est fini, ou aller au 1er janvier, ou j’en sais rien.

Et lundi arrive, et puis mardi, et puis mercredi, et puis t’as pas démarré. Et ça, quand t’es le partenaire, quand t’es celui d’à côté ou celle d’à côté, j’imagine que ça doit être lourd parce que ça dure des mois et ça dure presque des années. Et un de mes traits de caractère, ça a été toujours la détermination. Et là, il y a comme une partie aussi de moi qui cassait à ses yeux, tu vois, il se dit « Ok, mais ta déter est où ? » Et étant donné que je suis avec quelqu’un de sportif, ils sont capables de partir en Thaïlande, de se faire un mois entre copains à boire des bières et manger des chips. Et puis quand c’est l’heure de l’entraînement, ils vont se buter derrière un terrain et reprendre une shape en trois semaines.

Et toi t’es là derrière, j’arrête, lundi ! Lundi, t’es même pas capable de pas te resservir tes pattes. Donc ça c’était pas compréhensible. Pas trop patient là-dessus. Et sans parler de tous les trucs que j’ai essayé d’acheter, genre de régime, des la-la-la, où je dépensais un fric fou. Il voyait des colis arriver et il me regardait et il me disait « tu fais n’importe quoi ». C’était trop chiant. 

Clémentine

Arrive août 2022. Il te demande en mariage. 

Alison

Oui. 

Clémentine

Quand vous êtes en voyage. Et ça, est-ce que pour toi c’est aussi un des premiers déclics ? 

Alison

Ouais de fou, donc il me demande un mariage, c’était trop bien. 

Clémentine

T’as vu je connais bien les dates. Ouais c’est vrai, moi je me regardais. 

Alison

Genre août 2022, c’était hyper long. Août 2022 qu’est-ce que j’ai fait ? Août 2022 effectivement, il me demande un mariage, trop contente, tout ça tout ça, et genre presque lendemain, donc normalement t’es un peu sur ton petit nuage, lendemain je me dis comment je vais faire ? Pas pour cette putain de robe de mariée qui excite tout le monde et qui moi n’était pas du tout mon sujet, j’aime pas les robes en plus. Moi c’était plus de me dire comment mon mari, mon futur mari, va m’épouser et épouser la meuf dont il est pas tombé amoureux. Genre j’étais juste ça. Si il m’avait croisée là à ce moment-là en août 2022 dans la rue, est-ce qu’il m’aurait regardée ? Je suis pas sûre, tu vois. Genre est-ce qu’il serait dit « je vais aller lui faire un petit message », tout ça ?

Peut-être pas. Et donc du coup pourquoi il va se marier avec une nana qui physiquement, et même un peu moralement, et même un peu beaucoup… Moralement et physiquement, pourquoi elle ne ressemble pas à celle dont il est tombé amoureux ? Et j’étais totalement consciente qu’à ce moment-là, il m’a demandé par amour, mais je me suis dit qu’il était hors de question qu’il ne se marie pas avec la même meuf. Et ça a été le premier gros parpaing dans la tronche de tout ce cheminement derrière. Qui était un parpaing finalement aussi de regard de l’autre, qui n’était pas du tout pour moi. À ce moment-là, je ne me dis pas ça. Ça serait trop bien que tu perdes quelques kilos pour te sentir en forme et mettre un pied devant l’autre et arriver à bouger un peu plus. Non, je me suis dit, son regard à lui était important pour moi. Et de août à décembre, j’essaye. Donc je fais ces départs du lundi, qui sont foirés. J’essaye le mercredi, j’essaye le jeudi. 

Clémentine

Tu les appelles les faux départs. T’as eu plein de faux départs. 

Alison

C’est des faux départs, ouais. Plus ou moins conscientisés, il y en avait. C’était des vraies stratégies, des vrais… On aurait dit, j’aurais pu buter quelqu’un. J’avais vraiment tout un plan. Puis le lundi arrive et puis il ne se passe rien. Et en… La culpabilité est très forte, parce que là, j’ai une deadline. J’ai un mariage qui doit arriver en septembre 2023. Ce mariage-là, on va pas le bouger. Ce mariage-là, il va se passer. Et si je n’y arrive pas à arriver au mariage avec la volonté… Enfin, dans le corps et dans la tête que je mérite, j’aurai échoué. Et là, il n’y a pas de… On verra le mois prochain, on se laisse 6 mois de plus et tout. J’ai une vraie échéance. Février, les premiers essayages de robes de mariée. Pire moment de ma vie. Déjà je trouve que c’est nul. 

Alison

C’est plan, bon bref c’est un autre sujet. C’est hyper stéréotypé. Et votre mari, vous croyez qu’il va vous aimer dans cette robe ? Je sais pas, peut-être demande-moi si moi je m’aime déjà dans cette robe. Il y a plein de trucs que j’ai pas du tout aimé, passons. 

Clémentine

Moi, grâce à toi, je me suis mariée en robe Tajine Banane et j’ai beaucoup aimé porter ta robe. 

Alison

Merci, c’est gentil. Et là, on est vraiment dans un truc de tu dois t’emballer. Il y a un truc à 3-4 000 balles pour t’emballer, pour ton mari. Tout le monde trouve ça normal. Bref ! Et je m’emballe quand même, je joue le jeu et tout, et je me retrouve à choisir des robes, à chercher des robes qui ne me grossissent pas, qui me vont pas trop mal, et pas du tout celles que j’aime. Genre je vois les robes que j’aime, j’attrape celles qui potentiellement peuvent m’aller. Enfin je sais pas si… Les gens arrivent à s’habiller normalement, ils s’habillent, ils prennent une fringue, ils l’aiment. Mais quand tu t’habilles pour ton corps, la plupart du temps t’aimes pas tes fringues. Et c’est quand même un sentiment très bizarre de pas aimer ta peau et de pas aimer ce que tu mets sur ta peau.

Ça fait quand même un mood un peu particulier. Et tous ces petits moments ont fait que je me suis dit, il est hors de question que je foute une robe que je n’aime pas, il est hors de question que si, il est hors de question que ça. Et j’ai commencé à mettre un pied devant l’autre. En décembre, j’ai pris un coach sportif parce que je n’arrivais pas à contrôler l’assiette comme je disais. Je n’arrivais toujours pas, je commençais un peu à arrêter de me resservir des petits détails.

Puis t’as toujours tous les gens qui se mettent un peu pro-diététicien, pro-nutritionniste, ils font que tu bois 1 litres d’eau, je sais en fait, tu demandes à n’importe quelle personne, tout le monde sait, tu demandes même à quelqu’un qui essaye de perdre du poids depuis 40 ans, il est capable de te dire exactement ce qu’il faut qu’il fasse. C’est pas qu’on sait pas ce qu’il faut faire, c’est qu’on n’est pas câblé, ou du moins tu perds le câble pour le faire. Et décembre, je prends un coach sportif, suite à une grosse discussion, donc c’est plein de petits moments comme ça, suite à une grosse discussion avec un pote. Alors que j’en ai eu plein des discussions, surtout autour du sport, je suis entourée que de sportifs qui m’ont dit 150 fois, ça te ferait du bien d’aller te mettre au sport.

Oui, je m’en doute. Et je sais pas, ce jour-là, c’était le jour, il fallait que je l’entende et tout, et ce bot me dit, tiens, si tu veux, je connais le numéro d’un coach, je trouve qu’il est vraiment bien. Et c’est un gars qui a un feeling, peut-être avec les gens non-sportifs, puisqu’il y a plein de gens qui l’ont accompagné, qui ne faisaient pas de sport et qui s’y sont mis vraiment. Et moi j’avais déjà essayé, bien évidemment, plein de coachs sportifs, avec des musiques douteuses et des marcels douteux. Et le gars, il arrive, il te dit « Bah alors, allez, tu vas le faire ! » Tout de suite, j’ai envie de te niquer. On va couper ça. Mais c’est pas ça que j’ai envie d’entendre et en même temps et puis des fois j’ai eu aussi des coachs qui étaient trop…

Vous êtes fatigué ? Mais c’est pas grave, ben repose toi, souffle ! Ben non en fait c’est pas ça non plus. Parce que c’était pas les bonnes personnes, c’était pas le bon moment et que quoiqu’on aurait pu me dire, parce que maintenant je suis capable de supporter le mec que Marcel douteux pendant une heure et il va pas me déranger. Ou presque. Mais c’était pas mon moment. Bref, je rencontre ce mec et je tiens, je commence par rajouter une session de sport par semaine, tout simplement pour la bonne raison que je mets une semaine à m’en remettre derrière, physiquement. Courbature de l’enfer, incapable de s’asseoir pour aller faire pipi, bref, hyper dur, mais je démarre comme ça. 

Clémentine

Tu démarres donc à quelques mois de ton mariage. Est-ce que t’aimes ça, à ce moment-là ? 

Alison

Pas du tout. Je déteste foncièrement ce que je vis. Je m’engage financièrement, du coup, parce que le coaching, c’est un engagement financier non négligeable, entre 50 et 60, ça dépend après le coach que tu prends, mais c’est de l’argent. Mais c’est de l’argent que j’avais tellement dépensé dans des achats inutiles et dans des et dans des trucs où on va couper les marques. Mais bref, j’avais tellement essayé de trucs que j’étais plus trop à ça près et c’est surtout que je n’avais plus le choix. J’avais compris que seule je n’y arrivais pas et qu’il fallait quelqu’un me force. Et donc je détestais ce qu’on faisait. Je ne détestais pas la personne bien évidemment mais… Au-delà de la difficulté du sport en lui-même, puisqu’il venait à la maison, on faisait toutes sortes de cross-training avec un petit peu de squats, un petit peu de…

Je bougeais puisque je faisais du sport finalement, puisque c’était de ressentir mon corps dans l’espace totalement faible. Je pense que les premières sensations que j’ai eues, c’est de me dire, mon Dieu, je ne suis pas forte. Il y a quelque chose, en tout cas pour moi, qui a été hyper significatif, c’est qu’avant, par exemple je déteste regarder du cirque, et il y avait des mecs qui faisaient des trucs de fou, tout le monde imagine le cirque avec des pirouettes, des trapèzes, et vas-y que je retombe sur un orteil sur ton épaule… Moi je trouvais ça nul parce que je comprenais pas trop le truc. Parce que j’avais aucune conscience de la difficulté de ce que j’étais en train de regarder quand même. Tellement je n’avais jamais fait de sport.

Donc t’as quand même un truc où t’es dépossédé de tout ressenti parce que n’importe quel mec qui fait un gainage est capable de voir qu’un gainage sur un trapèze c’est hyper dur. Mais vu que t’as jamais fait de gainage, tu peux pas, même en voyant des athlètes, te dire c’est difficile. J’avais pas ce truc. 

Clémentine

En fait c’est ça que t’expliques souvent, c’est que t’avais pas la culture autour du sport, de la performance physique, avec la compréhension de la capacité du corps, du niveau de difficulté, de juste faire un mouvement, un squat par exemple. 

Alison

Pour moi un squat c’était facile. Juste que j’avais la flamme de le faire. Mais vas-y,

Clémentine

T’en fais dix, tu commences à le sentir. 

Alison

T’en fais deux même. 

Clémentine

Est-ce que à ce moment-là, parce qu’on se voyait souvent dans ces périodes-là, je sais que tu prenais des Uber au lieu d’aller marcher, que tu parlais de cette sédentarité parce que ce n’est pas une seule séance de sport dans la semaine qui a fait que tu as pu enclencher des gros changements, c’est tous les petits trucs à côté. Qu’est-ce que tu arrives à tenir ? Parce qu’il y a beaucoup de personnes qui veulent se lancer, qui mettent des objectifs trop haut et qui arrêtent d’entrer. 

Alison

J’étais arrivée à un level de sédentarité qui était tellement fort que tout mon corps était en souffrance. Parce que là, on parle beaucoup du poids, niveau santé. Tu parlais tout à l’heure des faux départs et tout. Avec le temps, j’ai un peu pris du recul et je me suis rendue compte de tous ces moments où je ne me suis pas juste mise dans un miroir. Parce qu’en fait, c’est beaucoup plus fort que ça. Sinon, si c’était entre guillemets que esthétique, C’est pas sûr que ça serait une réelle souffrance, c’est que là, il y avait une réelle souffrance physique. En prenant 30 kilos sur un corps, une ossature qui n’a pas l’habitude de porter ces 30 kilos-là, j’avais des réels maux. Je me suis retrouvée à me bloquer au niveau des cervicales, à me retrouver sous neuroleptique parce que je faisais des névralgies.

Et ça, c’est parce que j’avais trop de surpoids, je faisais de l’arthrose. L’arthrose, je l’ai toujours. L’arthrose, elle n’est pas partie, mais je n’ai jamais pu ressentir ma nuque de la même manière. Et donc tous ces trucs, je me rappelle de moments de solitude extrême, du genre mes cuisses se frottaient tellement qu’elles étaient en sang, et j’étais obligée de mettre les 4 fers en l’air comme ça, de la crème, et pendant que ma famille partait à la plage s’amuser et moi je pouvais pas bouger, ben là t’as une larme comme ça qui coule et tu te dis mais mon dieu, dans quel état tu mets ton corps ? Et tu sors énormément d’insomnies, énormément de boutons de fièvre. J’ai toujours fait de l’herpès comme l’herpès au niveau des lèvres, comme plein de gens, un peu de stress, un peu de soleil, une fièvre.

Normalement c’était genre toutes les semaines pendant un moment. J’étais hyper réactive et ça j’avais aucunement conscience que c’était une conséquence d’une inflammation et d’un corps pas en santé. J’ai un souvenir qui m’est revenu en pensant à cette interview. Que j’ai trouvé archi violent et… Pathétique, tu vois. Une fois, j’ai voulu aller faire pipi dans un resto, dans un bar à Paris. Je rentre dans les toilettes et je me dis, mon dieu, les toilettes sont dégueulasses. C’est trop sale et tout. La cuvette était horrible. Je commence à baisser mon porte-à-joint, à vouloir faire pipi et tout. Je commence à mettre en squat. Au bout de 5 secondes, mes jambes qui flageolent, impossibles de tenir. Je me suis assise sur les toilettes. Je ne sais pas si quelqu’un se rend compte de ce sentiment.

Donc, je me revois dans ce bar avec mes cuisses qui touchent une cuvette de toilettes. Immonde, j’ai pleuré. Alors que j’étais en train de passer un bon moment avec mes amis, j’ai pleuré, je me suis dit mais mon dieu mais t’es… C’est catastrophique parce que là je me suis sentie presque en danger niveau bactériens et compagnie, même pas capable dans cette situation là de tenir mes jambes, de lever mon cul pour faire pipi. Et j’ai pleuré. Je ne pleure jamais, je me suis essuyée, je me suis tapotée les joues, je suis remontée, j’ai rigolé comme si de rien n’était, et puis je ne sais pas, je suis partie se taper dans la pizza comme si de rien n’était. Alors que ce moment-là que je venais de vivre était extrêmement violent pour moi.

Et donc tous ces petits trucs, pour moi c’est des faux départs, parce que c’est des prises de conscience qu’on enfouit, parce que c’est des moments d’extrême solitude et de difficultés. Je pense que quand on a été en surpoids depuis toujours, ces moments-là existent depuis très longtemps et on vit avec. Tu passes au-dessus jusqu’à ce que peut-être il y ait des moments qui soient trop difficiles. Et tous ces trucs, tu t’esquives. Et moi, ma condition financière ou sociale, bien entourée, un mari, plein de potes, un peu de thunes et tout, je ne m’en sortais pas si mal. J’arrivais à esquiver, comme je disais, en rachetant des fringues et à me voiler la face et à éviter. Je ne prenais même pas… J’habite à 15 minutes porte à porte de mon travail. Je prenais des Uber pour y aller.

Et je trouvais ça pas normal, mais pas dérangeant. Déjà je claquais 40 balles en Uber par jour, normal, et c’est pour la planète, pour mon corps, il n’y a rien qui va. Mais je n’avais pas vraiment le choix. Quand j’étais dans des métros en déplacement pro, j’étais capable de faire la queue dix minutes derrière une nana avec sa poussette et des grosses valises juste pour prendre l’ascenseur. Il y a quatre marches, meuf. J’attendais. Et ça, je ne me rendais même plus compte. Jusqu’à ce que j’essaye de me bouger. Et que je crois qu’à ce moment-là, c’était la personne avec qui je faisais du sport, m’avait clairement dit de ne pas chercher à aller rajouter des séances de sport, de ne pas chercher à enlever des choses de ma vie, mais plutôt aller rajouter des… Comment dire ? Aller modifier, pardon, mon quotidien.

On cherche pas à enlever des assiettes, on va chercher plutôt à modifier ou à aller réfléchir à une certaine logique qu’on a tous et toutes et donc commencer par t’as un escalator, tu prends l’escalier. Et ça, je le dis souvent maintenant dans mes stories. Ça a changé totalement ma façon de voir. Et je trouve que quand quelqu’un qui n’est pas sportif, on lui dit va faire du sport, c’est comme si tu dis à un mec qui a soif, va boire de l’eau. Genre, on le sait, c’est facile à dire. Moi, je trouve que c’est pas ce qu’il faut dire à quelqu’un qui n’est pas sportif, qui n’a pas eu cette culture, qui n’a pas eu la chance d’avoir été enfant et d’aller faire des treks avec ses parents, du vélo, du machin et tout.

Donc du coup, qui a eu cette culture, de l’activité physique. Moi, pour moi, il faut simplement dire à quelqu’un qui veut faire du sport, voilà, mets-toi en activité, mets-toi en mouvement. Le mouvement amènera le sport amènera peut-être des compètes, peut-être… On s’en fout de ça. Mais genre, vas-y, rentre déjà en mouvement. Et on sous-estime le pouvoir du mouvement, et je pense que c’est totalement ça qui a insufflé un espèce de… De mouvements positifs, de changements par des tout petits trucs débiles. 

Clémentine

Et tu sais qu’ici donc on est au Club Med, on est invité au Podcast Club, nous là on enregistre au cinquième étage et moi je dors au septième. Je ne prends pas l’ascenseur Alison, je prends les escaliers et tu sais pourquoi ? Je pense toujours à ce que tu dis en disant si vous avez le choix prenez l’option des escaliers, ça n’a pas rêvé tu vois. C’est pas grave pour moi de prendre l’ascenseur, mais elle a raison en fait. J’ai deux étages à monter, évidemment que je vais prendre les escaliers. T’imagines l’influence que t’as pour moi. 

Alison

C’est gentil, l’influence que t’as eu pour moi. Mais voilà. 

Clémentine

Mais tu vois, ces petits mouvements, changements que t’as mis en place ont amené derrière… Des changements radicaux de façon de vivre. Parce qu’après, là, tu fais ces petits changements et tu découvres Dynamo, qui est un concept de sport où on fait du cycling en salle. Qu’est-ce qui fait que tu mets un pied dans une salle comme ça, qui peut être très intimidant et qui fait que derrière, t’enclenches un changement majeur ? 

Alison

Mon coach, que je voyais, m’a rapidement dit que ce serait chouette, pas de changer sa vie, mais de modifier des petits détails. C’était juste des marches au départ. On ne parlait pas encore de venir au travail à vélo, tout simplement, doucement, faire des petites choses. Et puis il m’a dit ça serait évident pour toi de pouvoir ajouter une activité cardio à l’activité physique qu’on fait ensemble. Et donc le cardio c’est du vélo, c’est de la course à pied, tout et tout. Donc ça moi c’était totalement abstrait pour moi, hors de question de mettre des baskets, c’est pareil. Le nombre de gens qui te disent « courir », c’est mettre des baskets et aller courir. Frère, en fait, quand les gens savent que tu ne sais pas où tu vas, tu ne peux pas aller courir comme ça, c’est faux.

Si tu vas courir comme ça, c’est que déjà tu as une éducation à l’activité physique. Est-ce que tu as déjà vu quelqu’un qui n’a jamais mis un pied devant l’autre mettre des baskets et se dire « je me barre courir ». Tu ne sais pas où tu vas, tu ne sais pas comment ça marche, tu ne sais pas comment rentrer, tu ne sais pas jusqu’à quand tu vas pouvoir respirer, boire, est-ce qu’il faut t’arrêter, est-ce qu’il faut boire, est-ce qu’il ne faut pas boire. Tu ne sais pas faire ça, donc bien évidemment il y a peut-être une personne sur dix mille à qui ça a fonctionné comme ça, mais les trois quarts de temps ça ne marche pas comme ça. Et donc ce cardio-là, j’étais incapable d’y aller. Donc vu que moi je suis une meuf…

Du marketing et influenceuse, qui aime bien les trucs un peu jolis. J’ai entendu parler de Dynamo qui était sur Bordeaux, donc, salle dans le noir, ça a été mon premier argument qui m’a attirée dans cette idée, c’est dans le noir. Personne ne va me voir, personne ne va voir que je suis nulle, personne ne va voir que j’en chie. Si j’aime pas trop ou si c’est trop dur, je pourrais m’arrêter, personne ne le verra, j’ai même pas de coach sur le dos, parce que le coach il est tout devant, ça peut me plaire. Et j’en entends surtout beaucoup de bien. Je connais Karine André qui est sur Insta, qui est coach aussi, Dynamo, qui m’a toujours dit Ali, ça te ferait du bien, essaye, essaye.

Donc j’y vais, je me retrouve avec, c’est marrant parce que ça a aussi un cheminement, avec un t-shirt immense, mon petit legging, vélo 44, donc tout au fond, la musique démarre, la meuf commence à parler, ça part dans un truc un peu deep et tout, là ça pédale, ça pédale et tout, là je me dis wow. C’est quoi ce délire. Je vois les nanas au premier rang, toutes petites brassières, petits shirts, petits leggings. Je vois leur boule qui fait clac, clac. Moi je suis derrière comme ça, ça a à peine commencé depuis cinq minutes, j’ai les cheveux trempés et tout. C’est catastrophique, je sais même pas si je dois respirer, parler, enfin bref, catastrophe. Et en fait je les vois et je me dis, dans six mois, je veux être là. 

Clémentine

T’as retrouvé ta détermination. 

Alison

J’ai retrouvé ma vraie détermination, ma vraie force, et pas de me dire « j’ai trop nul, je suis au dernier ». Je me suis dit « Ouais, t’es méga nul ». Et là, pareil, j’ai pleuré, ce moment-là. Et quand je dis j’ai pleuré, c’est parce que je pense que les gens, les moments où je pleure sont… 10 doigts, genre je sais quand je pleure. Et à ce moment-là, je chiale. Et je me dis… C’est pas normal, elles ont le même âge que toi. Elles bougent le cul et tout, c’est pas normal que toi t’arrives pas à pédaler, en fait. Là, je suis dans un plus, un truc où comme une sorte d’énorme prise de conscience de ta condition physique, t’as exactement le même nombre d’organes qu’elles, t’as exactement le même nombre de membres qu’elles, t’as cette putain de chance.

De n’avoir aucun handicap physique, t’as cette putain de chance d’être en bonne santé, t’as même cette putain de chance d’être encore en vie, et tu n’es pas foutu de pédaler plus deux minutes. Et au lieu de me flageller, de me dire je sors de cette salle et j’arrête parce que je suis trop nulle, j’ai simplement dit dans six mois je veux être au premier rang. Spoiler, six mois après j’étais au premier rang. Et ça c’est simplement de se dire pourquoi cette personne avec la même condition, le même départ que moi, même si bien évidemment c’est pas le même départ parce qu’il y a plein de trucs intrinsèques dont on a déjà parlé, on s’en fout. Au final, là, dans cette salle, elle est égale à moi. Et c’est même pas de la compétition, c’est simplement de se dire je suis capable.

Et en voyant des corps bouger, j’ai pris conscience que mon corps était capable de bouger, parce qu’en fait, petit à petit, je le bougeais. 

Clémentine

Parce qu’en fait t’es seule dans ton cheminement, là tu te retrouves dans un cours avec d’autres personnes qui ont le même objectif aussi, bouger, prendre soin de leur corps, leur santé, parce qu’on parle vraiment de ça, l’aspect physique c’est un déclic, mais c’est ta santé l’objectif principal. Tu te rends compte que t’es capable. 

Alison

Je me rends compte que déjà je suis capable de faire quelque chose que je n’étais pas capable hier. Et donc je suis un peu quand même pas trop bébête et je me dis, quand les gens disent « trust the process », je me dis forcément il y a peut-être un truc qui est vrai là-dedans. Et c’est pour la première fois de ma vie que je réalise que je suis peut-être au départ de quelque chose et que moi aussi je peux y aller. Entre décembre, février, janvier et tout, je perds quand même un petit peu de poids. Donc visuellement, moi à la base j’ai commencé le sport parce que je me détestais et aujourd’hui je continue le sport parce que je m’aime. J’aime.

Enfin, je m’aime. Je suis pas en train de me galoche tous les jours. Mais j’aime mon corps parce que je me dis, il est complètement ouf. Mais parce que je le découvre. Donc là, j’ai l’impression d’être une enfant ou même une adolescente dans son corps. Je réalise ce dont il est capable de faire. Je réalise que, ben là, quand je me cachais derrière des arbres pour le cross et que j’attendais qu’il fasse deux, trois tours pour ressortir comme si de l’année était, comme si on ne m’avait pas grillé, Maintenant je m’inscris à une 10 km, je le cours. Cette sensation quand je suis arrivée à la ligne d’arrivée, ou semi, ou là on va faire l’UTMB, une partie de cet été. Tout ça c’est simplement de me dire qu’il est capable d’y aller.

Il va pas arriver premier, il va peut-être pas arriver deuxième, il va pas arriver troisième, centième, on s’en balek. Il est capable d’y aller. Et ça, c’est tous ces petits moments, justement, de le voir. Quand mon coach arrive, qu’un dimanche il m’envoie un message à 22h, parce que c’est aussi l’avantage du coaching, quand on peut. C’est que là où tout le monde parle de discipline, de motivation et tout, à un moment donné, faut pas se leurrer. C’est très difficile de la garder, de l’avoir, d’en avoir envie. Et quand t’as un dimanche 22h, tu reçois un petit message, tu ne m’as toujours pas donné tes dispo pour demain. Mais je peux pas demain, je pars en train, je vais à Paris, j’ai un déplacement pro et tout. Ouais, à quelle heure ? Bah mon train est à 8h. Ok, j’arrive à 6.

C’était les petits points de motif que je n’avais pas. La première fois, tu mets une semaine à 3 mètres de 3 squats. J’avais des escaliers dans maison, ils me les faisaient descendre et monter en marchant. C’était déjà difficile de faire ça quatre fois. Déjà, tu montes tes marches, flemme, tu vois. Et puis une semaine, deux semaines, un mois après, tu l’es fait en trottinant. Tu le fais une fois. Et ça, tu le vois. Et puis physiquement, tu vois quelques kilos s’envoler sur la balance, parce qu’à ce moment-là, c’était mon but. Et donc tout ça, ça devient concret. Et j’ai eu moins envie de prendre cet ascenseur, et puis je suis un peu fière, je suis dans le métro, j’ai pris des escaliers, je vois les gens dans le… Le pire, c’est que je voyais les gens dans le…

Dans l’escalator et j’avais l’impression que je faisais un truc de ouf, je prenais des escaliers. Et ça, petit à petit, ça crée une confiance et une vision que je n’avais jamais vue de ce corps qui n’était pas en train d’enfanter. C’est le seul moment où je l’ai trouvé, comme je te disais, magnifique et fort, incroyable. T’allaites t’es en train de nourrir un être humain, c’est quand même un truc incroyable. Là, il n’était pas en train de construire un être humain, il n’était pas en train d’aller être un être humain, il n’était en train de rien. Simplement de me porter et de m’amener du point A au point B que je voulais. Et ça c’était fou. 

Clémentine

Est-ce que tu ressentais de la culpabilité, c’est le cas de beaucoup de mères, de se dire je vais prendre du temps pour moi, je vais m’occuper de moi, il y a des statistiques terrifiantes en rien. Je crois que c’est 80% des mères font passer leur santé après celle de leurs enfants et de leurs maris. Ça a des conséquences sur la santé physique des femmes. Est-ce que tu as eu cette culpabilité-là et tu as dû lutter contre ou tu étais très au clair avec le fait d’être une priorité ? 

Alison

Non, c’était énormément culpabilisant. Parce que j’en reviens justement à notre fonctionnement et ce qu’on nous inculque et la manière dont on voit les choses. Prendre soin de soi, dans ma famille, c’est pas quelque chose qu’on nous a inculqué. C’est pas quelque chose qui était important pour mes parents. J’ai jamais vu ma mère se maquiller, prendre du temps pour se coiffer. Nous, c’était nature-peinture. Et c’était même presque une fierté dans ma famille d’être naturelle, d’être… On s’en ballaek du regard des autres et tout. À partir du moment où, même ado, je me coiffais un peu trop longtemps, en plus je prenais quand même beaucoup de temps donc je comprends pas que ça fasse péter les plombs de mon père parce que j’ai une fille maintenant. Mais c’était pas valorisé. T’es en retard, tu saoules. 

Tous les petits moments où tu apprends à prendre soin de toi, c’était pas quelque chose de top. Et il y a une partie de mon éducation aussi où l’esthétique est superficielle de ouf. Et donc, je raccrochais énormément le sport à l’esthétisme. Surtout qu’au moment où j’ai commencé l’activité physique, je le répète, c’était une quête esthétique. Pur et dur. Quand j’ai commencé le sport, j’étais à mille lieux de comprendre la santé mentale, de comprendre les bienfaits sur mon stress, les bienfaits sur mon management, les bienfaits sur ma libido, les bienfaits sur plein de trucs. J’étais à dix mille lieux de l’entendre. Moi, c’était concret. Je suis grosse, je veux ma robe, je veux mon mariage, je veux ma photo, je veux… C’était mes basiques de chez basiques.

Et c’est en mettant un pied devant l’autre que je me suis commencé à me dire, je me sens bien dans ma tête. Ou j’ai envie d’être un peu plus, ou les hormones que je ressens quand je sors de ma salle me font planer, je me sens trop bien, ou je suis genre grave fière de moi, autant que quand je fais un truc de fou au boulot. Donc ça m’apporte de la fierté, ça m’apporte de la confiance, ça m’apporte plein de trucs et tout ça tu le découvres qu’en le pratiquant mais on avait beau me le dire c’était méga abstrait et puis j’en avais rien à faire. Remets moi des bons jeans et j’étais vraiment dans quelque chose de très concret. Que je pouvais pas comprendre. 

Clémentine

Et comment t’arrives du coup à shifter cette mentalité de dire je suis pas ma priorité, je peux pas prendre soin de moi, au-delà de l’aspect esthétique tu vois, de dire bah t’as quand même des enfants, faut aménager ton temps de travail, tu es cheffe d’entreprise, tu peux très vite passer en mode mon travail c’est la priorité, ensuite mes enfants, donc bah j’ai pas le temps. 

Alison

Je le disais tout le temps. 

Clémentine

Voilà, j’ai pas le temps. Comment ça a changé ? Qu’est-ce qui a changé ? Qu’est-ce que tu peux expliquer pour quelqu’un qui se demanderait comment il faut faire ? Quel est le petit truc qui pourrait déjà commencer à changer pour dire si j’ai le temps. En fait, je choisis d’avoir le temps. 

Alison

Alors déjà, on est dans un secteur qui peut être méga moralisateur et méga culpabilisant puisque c’est ce que j’ai ressenti pendant de nombreuses années. Il y a l’âge de mes enfants. Je trouve que c’est pas négligeable. Bien évidemment, on peut se bouger, on peut rentrer dans une quête du bien-être, de se faire des massages et tout. Quand on a eu cette éducation-là, quand on a cette habitude de la reprendre assez facilement ou assez rapidement après la naissance des bébés. Ça n’est pas mon cas encore une fois de plus. Parfois, j’ai des nanas qui vont m’écrire et qui vont me dire, t’as de la chance, t’as réussi, moi j’attends ces déclics et tout, puis je discute un peu avec elles, je dis ouais, du coup t’es maman et tout, oui, j’ai un petit 3 mois et tout.

Mes enfants ont 17, 12 et 7 ans, c’est-à-dire qu’ils dorment la nuit, ils s’essuient les fesses tout seuls, ils peuvent prendre une douche, ça va. À 18 heures, mon gamin de 17 ans est capable de cuisiner un truc vite fait pour le temps que j’arrive. Quand j’arrive, j’ai pas peur qu’il y en ait un qui soit à l’agonie par terre. J’ai des enfants autonomes. Nous, on a fait le choix depuis des années, et c’était un des sujets du podcast que j’ai fait avec toi, d’avoir une fille au père, qui a été un game changer aussi en termes d’espace-temps. Mais c’est pas non plus magique, puisque la fille au père, on en a depuis… Enfin, on a fait des pauses, mais on va dire que depuis 3-4 ans, on a des filles au père. Je n’avais pas ce temps-là quand même.

Donc il y a quand même un rapport où j’étais la première à dire, en plus j’avais les meilleurs arguments du monde, j’avais une entreprise, trois gosses, j’ai tout le temps de déplacement, j’ai pas le temps. J’avais les enfants grands et j’avais une fille au père donc j’avais un peu d’aide et tout et je prenais pas ce temps-là, mais mine de rien, au-delà de la fille au père, j’ai aussi un mec qui valorise ce temps que je prends pour le sport. Chose, par exemple, que je ne faisais pas du tout pour lui. On parlait de son rapport à moi. Moi, j’ai été vraiment hyper dure avec lui quand il faisait du sport. Et ça, je ne l’ai pas du tout vu. Déjà, il ne me l’a jamais reproché. Je pense qu’il ne se rendait même pas compte. Je l’ai remarqué après.

Parce que je pense que le fait que je le voyais, par exemple, je sais pas, moi en vacances, se lever un peu plus tôt, aller courir et… Bah ça me trigger. Je pense qu’il y avait une partie de moi qui devait être jalouse, ou qui devait pas comprendre, ou qui ne valorisait pas le fait qu’il mette des baskets et qu’il aille courir 45 minutes parce que je trouvais ça débile. Alors au lieu de dire… Bravo, c’est trop bien, je te prépare un petit déjeuner. Ou juste, putain tu t’es motivée ce matin, bien joué quoi. Mais c’était pas valorisant pour moi donc je le faisais pas et j’étais pas très sympa quoi. Parce qu’il faisait quelque chose que j’étais pas capable de faire au fond et ça me ramenait à un échec et à un truc que je trouvais superficiel, débile et pas pour moi. 

Clémentine

Lui il prenait le temps d’aménager son emploi du temps pour prendre soin de lui. 

Alison

Ouais et en se levant juste plus tôt que tout le monde quoi, sympa déjà. 

Clémentine

Oui oui c’est ça, il te faisait pas subir les choses, il décalait avant. 

Alison

Donc voilà, j’ai quand même un mec qui… Supporte aujourd’hui que je sorte du crossfit en disant alors j’ai fait ça au clean, je lui raconte, il s’en bat les couilles. Et il m’écoute encore comme si c’était la première fois que je sortais du sport. Et qui est super fière et qui est ok de prendre le rôle. 

Clémentine

D’être soutenant dans ton projet. Donc c’est l’âge des enfants, le fait que tu as un partenaire qui est à égalité avec toi, enfin en tout cas qui te soutient dans ça, ton organisation perso, ça joue? 

Alison

Mon métier, on ne va pas se cacher qu’être entrepreneur c’est quand même, il y a d’énormes difficultés mais on a un aménagement de notre propre emploi du temps Mais ça aussi, je suis entrepreneuse depuis 7 ans et je ne le prenais pas ce temps. Donc ce n’est pas parce qu’on est chef d’entreprise ou qu’on est salarié, il y a quand même un moment où il y a des faisabilités, c’est juste qu’on ne les a pas vraiment en face de nous. Et au départ, quand j’allais faire du sport, c’était souvent sur l’heure de midi et deux, parce que c’était l’heure de dynamo, c’était plus facile et tout. Et puis parfois j’ai eu envie d’y aller à 10h, parce que justement je savais que je voulais absolument être là le soir ou j’y allais le soir, etc.

Donc je me suis fait un peu mes trucs et je culpabilisais énormément. Et tout à l’heure on en parlait à la table avec d’autres entrepreneurs qui sont à leur compte et qui culpabilisent aussi beaucoup et qui font un peu des stratagèmes autour de ça. Et moi je ne sais plus qui m’avait dit, assez simplement et assez naturellement, de rajouter l’heure de sport dans son agenda comme un rendez-vous. Et en fait, quand on a un rendez-vous avec Pierre ou Paul ou Jacques, on ne va pas lui poser un lapin et on ne va pas sentir coupable de laisser son équipe pendant une heure parce qu’on a rendez-vous avec Pierre, Paul ou Jacques.

Et pourquoi on devrait sentir coupable, encore plus en tant qu’entrepreneur ou en tant que chef d’entreprise, de partir à un rendez-vous avec soi-même, sachant que le nombre de fois où je suis restée derrière mon bureau parce qu’on m’avait dit que c’était comme ça qu’on travaillait dans une entreprise, rester derrière le bureau et tout, moi, je ne suis pas un oiseau qui est capable de rester derrière un bureau, sinon c’est le genre de métier que j’aurais choisi. Et parce que je suis quelqu’un qui a besoin de bouger et je m’en rends compte aujourd’hui j’arrive à faire deux ou trois heures de sport par jour je suis quelqu’un qui a énormément envie de bouger donc ces heures là, je l’ai bouffaient, j’étais agressive, j’étais mal dans ma peau. Parce qu’en fait, il fallait que ça sorte.

Et aujourd’hui, peut-être que si j’avais su tout ça, j’aurais fait des métiers complètement différents. À tout moment, j’aurais été sportive, à tout moment j’aurais été garde forestier, j’aurais peut-être été dans un métier qui n’a rien à voir avec ce que je fais aujourd’hui, mais simplement que j’en avais pas conscience de ce besoin de bouger, que je suis… Incapable de rester concentrée derrière un bureau, et donc du coup, pour mon équipe, pour ma créativité, pour mon cerveau, pour mon corps, j’ai aucune gêne à me dire, je sais pas moi, à 13h j’y vais, ou à 10h il y a une session que j’aime bien, je me la fais, et j’ai pas la sensation de moins bien travailler, au contraire. 

Clémentine

Les études prouvent tout l’inverse d’ailleurs. On travaille mieux si on a fait du sport, on travaille mieux en marchant, on travaille mieux en étant en activité physique, on apprend mieux d’ailleurs. 

Alison

J’ai jamais lancé autant de projets que ces derniers mois. J’ai jamais été aussi en paix, aussi créative, aussi calme, aussi posée que ces derniers mois. Alors que j’ai jamais autant bougé mon cul. 

Clémentine

Tu parles des projets que t’as eus, grâce à toute cette prise de conscience de ta santé, ton parcours. T’as lancé il y a… Non, pas encore un an ? Ça fait pas encore un an. 

Alison

Non, c’était octobre je pense. 

Clémentine

Donc ça fait quelques mois. Des séjours déclics. J’ai eu la chance de venir avec toi dans un que t’as organisé au Maroc. On a fait du surf avec plein d’autres femmes. Pourquoi est-ce que t’as voulu mettre à profit ton expérience finalement pour aider les autres ? 

Alison

J’ai créé le séjour que j’aurais rêvé avoir à ce moment-là, je pense. J’ai été vite, quand j’ai commencé un peu à essayer de bouger et tout, j’ai été assez rapidement attirée parce qu’il y a eu un énorme essor il y a un ou deux ans avec les retraites et tout, il y en avait partout. Et j’ai été assez attirée par en faire une. Et je me suis jamais sentie à deux doigts de réserver parce qu’il y avait toujours quelque chose qui ne m’attirait pas, soit un côté trop spirituel et tout, qui n’est pas trop mon truc, soit un côté trop sportif où je me disais je ne vais pas avoir ma place parce que je suis une chips, c’est pas possible, et… Ou alors la retraite un peu pseudo-sportive avec un mindset. Et là je me sentais pas non plus alignée avec tout ça.

Et après je l’ai appelé les séjours déclics parce qu’en fait j’y crois pas aux déclics. Je pense que ce que je fais c’est de la merde. Non mais je trouve que c’est hyper… Regarde là, ça fait déjà je sais pas combien de minutes. J’ai une Garmine, alors je regarde, je rigole. Et ça fait je sais pas combien de temps qu’on parle et on se rend bien compte que c’est un énorme chemin et qu’il n’y a pas de déclic, il n’y a que justement des faux départs et tout. Donc je crois pas au truc du déclic, pour moi c’est pas une meuf qui tape à la porte, qui dit aujourd’hui on va se bouger le cul, tu vas changer ta vie et tout, ça n’existe pas.

Et ces séjours, c’est plutôt de se dire, plutôt que d’attendre toute une vie, un déclic qui ne viendra jamais du jour au lendemain comme ça, on peut aller à sa rencontre, on peut, on va dire, Forcer un peu le destin pour aller se retrouver dans un endroit où potentiellement il y aura plusieurs personnes qui ont besoin de cette petite lumière, qui ont besoin d’un espace pour découvrir des sensations, pour redécouvrir des sensations. Et en fait, on met tout bout à bout. Ça dure en général entre trois jours et une semaine. Et dans ce séjour, on ne fait pas des trucs deep, on ne danse pas autour du feu, on ne fait pas des choses comme ça. Mais par contre, les nanas à la fin du séjour, mine de rien, elles ont bougé tous les jours. Soit c’est de la marche.

Du genre on va aller boire un verre là-bas et tout, bon on y va à pied. Donc ça papote, ça ci, ça ça. Et à la fin du séjour, elles ont fait genre 6-8 heures de sport, d’activité physique pardon, sans s’en rendre compte. Et la finalité c’est que vous l’avez fait, vous avez pris du plaisir, donc il y en a plein qui sortent du séjour, c’est un peu en croix, pas mal de courbatures. 

Clémentine

C’est fatiguant je te le dis. 

Alison

Mais tout le monde a pris du kiff. Tu essayes plein de sports différents parce que c’est aussi la clé. J’ai cru aussi très longtemps qu’il fallait s’inscrire dans une salle de sport. J’ai un peu l’impression que les salles de sport sont genre la porte ouverte à tous les débuts. Alors que ça fait deux ans que j’ai fait rentrer le sport dans ma vie et c’est un endroit que je déteste toujours autant. J’aime pas trop la muscu et j’y prends pas trop de plaisir. Alors que bizarrement les gens vont commencer souvent le sport par la salle de sport, en disant je me suis inscrite à la salle de sport, vraiment les salles de muscles classiques. Et pour certains ça marche et pour d’autres ils se retrouvent sur un tapis ou sur un vélo, ils ne savent pas pourquoi. Ils ne savent pas où ils vont, il n’y a pas de plan et puis on va à la salle parce que c’est accessible. 

Clémentine

Il n’y a pas de cadre. 

Alison

Et donc nous, dans ce séjour, on va pouvoir essayer différents sports parce que, en tant qu’adultes, c’est assez très peu valorisé d’essayer des sports alors que nous, même en tant que parents, ou même si on n’est pas parents, on a des neveux, on a des nièces, on trouve tout à fait normal que nos gosses essayent 50 000 sports pendant leur enfance. On trouve normal qu’ils fassent du rugby pendant un an, qu’ils arrêtent, qu’ils fassent de la danse, qu’ils arrêtent, qu’ils fassent du poney, qu’ils arrêtent. Et nous, adultes, on est censés commencer un sport et y rester pendant un an et demi, et le kiffer, et à la fin dire « bon, ben je suis sportif ». Je crois foncièrement aussi qu’on devient sportif que quand on a un réel coup de cœur pour un sport.

Et c’est pas parce que notre mec ou notre meilleure pote, elle fait de la course à pied et qu’elle te dit « viens, on va courir, t’inquiète, on fait que deux kilomètres », Il se peut que tu détestes complètement ça, et c’est pas parce que tu rentres chez toi et que t’as pas fait tes deux bornes avec le sourire et que tu te sens pas fière de ce que t’as fait, que t’es pas fait pour autre chose.

Et donc dans les déclics, on essaye plein de types de sports, ça peut être du crossfit, qui est quand même un sport qui est un petit peu turbulent on va dire, du surf, du running, de la marche, et à la fin c’est sûr et certain qu’il y en a un qui t’aura fait kiffer, et ça peut être un sport de glisse, ça peut être un sport d’endurance, ça peut être un sport… du pilates.

On a fait du pilates. Dans tous les cas, tu repars avec déjà la preuve que ton corps a été capable de bouger un peu tous les jours, sans rentrer dans des activités physiques incroyables avec des cardio de fou, mais il a pu bouger un peu tous les jours, donc il est capable de, et si tu as réussi à faire 6 ou 8 heures de sport, discuter, ressentir des courbatures, ressentir. On ne peut pas apprendre à quelqu’un… Comment dire ? On ne peut pas le motiver avec une quête d’un sentiment qu’il va ressentir plus tard. Tu verras, dans trois mois, tu vas être comme ci, comme ça. Non, déjà lendemain, en fait, les courbatures. Valorisons aussi ces courbatures-là. Tu ressens des muscles. Genre, à quel moment dans ta vie tu as ressenti tes muscles ?

Mais ça, c’est tellement stylé et tellement bon, parce que ça veut dire que tu as travaillé, ça veut dire que ton corps est en train de te dire « Qu’est-ce que tu branles ? Qu’est-ce que tu fais ? » Et donc du coup, quand tu sors de tout ça, tu te dis que si t’as bougé comme ça autant de fois, avec plus ou moins de plaisir, t’es capable au moins d’insérer une heure dans ton emploi du temps de toute ta semaine. On demande pas d’aller faire du sport tous les jours. On demande juste de s’accorder une heure d’activité physique, deux heures d’aller marcher. Et ça, je pense que ça fonctionne. Et depuis octobre, on en a fait deux ou trois. Et c’est dingue ce qu’il s’y passe pour ces meufs. C’est vraiment dingue. 

Clémentine

J’ai été témoins. C’est vrai que c’est assez fou et beau de voir des femmes. C’est vrai que moi j’y suis allée avec Camille Schneiderlin, qui est une très grande sportive aussi, et on n’a pas ce rapport-là au sport. Pour nous c’est normal de faire du sport et il y a des aléas de la vie qui font qu’on n’en fait pas. C’est vrai que d’avoir été témoin de voir des femmes qui, pour certaines en tout cas, pas toutes hein dans le groupe, mais qui n’ont pas ce rapport au sport, pour qui c’est pas une normalité et que c’est difficile et qui culpabilisent alors qu’elles y sont pour rien, de ne pas avoir été éduquées au sport, je trouve que c’était hyper touchant. Et d’ailleurs, ça me pose cette question par rapport à toi et tes enfants en tant que mère. Est-ce que ça a changé quelque chose dans ta vision de tes valeurs éducatives avec eux ? 

Alison

Tellement. Mon fils a fait du Noam à un très bon niveau au rugby. Il est semi-pro à son âge. Enfin, il est bien. Il est dans une phase de vouloir… Quand je dis bien, c’est parce que c’est son rêve devenir pro. Je ne suis jamais allée le voir quand il était jeune. Je n’ai jamais allé au bord du terrain. Ça n’avait… Pas trop d’intérêt, c’est ça qui est trop bizarre. J’étais trop contente qu’il y aille. Dès qu’il faisait froid ou qu’il pleuvait, je lui disais reste à la maison. J’ai la flemme, reste à la maison. Dès que j’ai rencontré mon mec, il a entendu mon fils dire j’ai un peu froid. Alors là mon pote, tu mets un lycra sous ton t-shirt et tu y vas. Et ça a changé, je suis au bord des terrains maintenant, je vais les voir. 

Clémentine

Tu as ta chaise pliante ! 

Alison

J’ai ma chaise pliante decat ! Parce que ça m’intéresse. Parce que ça m’intéresse quand ils me parlent de leur sport. Je fais du crossfit avec mon fils de 17 ans. Une des choses dont il rêvait, c’était de bouger avec sa mère, de faire du sport avec moi. Il m’a toujours dit, il m’a dit un jour, j’aimerais trop qu’on fasse du sport ensemble. Et là maintenant on se fait des sessions à deux, c’est une relation folle que j’aurais jamais cru vivre et que je ne reviendrai jamais en arrière tellement c’est trop bon de partir au sport avec ses gosses et de bouger avec eux. Et maintenant on part en vacances, on fait des stages de boxe, on fait du surf, on fait plein de trucs.

Et pareil, dans l’imaginaire, moi j’avais des potes à moi qui avaient leurs parents qui étaient sportifs et qui faisaient justement du ski, du sport pendant les vacances et tout. Elles étaient trop fortes en sport avec nous et c’était vraiment des familles de sportifs. Je suis une famille de sportives, aujourd’hui. Tous mes gosses font du sport, on fait énormément de sport, c’est une place importante dans nos quotidiens. 

Clémentine

Toi-même, tu as appris à skier ? 

Alison

Il y a trois ans. Première année, on part au ski, je les vois partir, je reste au chalet. 

Clémentine

Oui ? 

Alison

Bah oui, je ne veux pas y aller, je ne sais pas en faire. C’est pas accessible pour moi, je suis pas câblée pour ça. J’ai pas le physique, j’ai pas le corps, j’ai pas les jambes, j’en sais rien. Je peux pas faire du ski, je sais pas en faire. On m’a pas appris qu’on pouvait apprendre à faire du ski. Je trouve normal que mon gosse de 3 ans, lui, il soit au piu-piu, lui, il apprend, mais pas moi. C’est pas possible. Et première année, ça a été l’année la plus longue du monde, déjà. Franchement, bon, c’est long. Et ils rentraient, ils avaient plein de trucs à raconter, plein de sensations, plein de trucs que je n’avais pas du tout… Je pouvais pas sentir ce qu’ils disaient. Et deuxième année, je me suis retrouvée dans un groupe d’adultes débutants.

Ça a été la semaine la plus longue de ma vie parce que c’est très dur d’apprendre adulte. C’était pas fun. Et puis aujourd’hui, je skie. Je skie avec eux. On bouge. On est dans les Alpes, au Club Med, on est partis skier ensemble. Clem, je t’ai suivie. Tu m’as perdue. Mais c’est comme si tu ouvrais un champ des possibles. 

Clémentine

Et par rapport à Mani, parce que c’est une fille, ça renvoie plus de choses que toi, t’es une fille. Le fait que ta fille, elle adore le sport, elle est forte, ça te rend fière, ça te… 

Alison

Je suis très admirative. Elle fait partie des personnes… Elle a 12 ans, mais des personnes que tu lui montres une fois, elle est mille fois meilleure que tout le groupe. Genre, je sais plus, on avait fait déjà des trucs que… L’haltéro, par exemple. Je l’ai amenée à l’haltéro. Elle a soulevé une barre en deux secondes. Elle a compris le mouvement. J’ai mis trois mois à le comprendre. Et ça, c’est un feeling qui me rend très fière et que je trouve absolument magnifique. Et je sais pertinemment qu’il y a quelques années, je ne l’aurais même pas remarqué. 

Clémentine

Ça fait une heure et demie là, je crois, qu’on parle, donc c’est vrai qu’on a vu tout ton parcours. On sait aujourd’hui quand même que, Dynamo, tu peux y aller trois fois dans la journée, tu fais du crossfit à fond, tu te lances des défis, tu es dans un autre état d’esprit face au sport. Aujourd’hui, est-ce qu’il y a une suite ? Est-ce que vous allez faire d’autres choses ? Est-ce que tu peux nous parler de ce que tu as envie de faire avec le sport ? 

Alison

J’ai envie de continuer. Ça a pris une très grosse place dans ma vie. Ça me remplit tellement de bonheur. Vu que je fais que des trucs qui ne sont pas réfléchis dans ma vie, je passe mon temps à passer d’une étape à une autre en me disant « c’est trop bien, on prend ce chemin ». Là, avec des potes anciens rugby pros, on a repris un espace. Du coup, on est en train d’ouvrir une salle de… Je ne l’ai dit à personne encore. Donc là, en septembre 2025, nous ouvrons une salle à Bordeaux. Mais pas une salle vide où tu ne vas pas savoir quoi faire. Une salle avec des cours de crossfit, d’Aïrox. Qui sera inclusive, où les débutants se sentiront à l’aise de venir.

Et une salle où tu pourras venir avec ton kids, parce qu’à 17h ou à 18h, on n’a pas tous la chance d’avoir une fille au pair à la maison. Et on a envie aussi, la force duo et de pouvoir faire du sport avec mon fils, comme je l’ai dit, ou mon mec, c’est quelque chose qui m’a aidé à me motiver aussi. Et parfois, on a envie de pouvoir renouer avec son plus-un. Donc pourquoi pas faire un peu de sport ensemble ? Sauf que quand il y a des enfants, concrètement, ce n’est pas possible, encore moins le soir. Donc là, il y aura un petit coin où vous pourrez laisser vos kids en sécurité et faire votre sport sans culpabilité. 

Clémentine

Septembre 2025, à Bordeaux. Je suis ravie d’habiter Bordeaux. Désolée pour les autres. 

Alison

Ça va être pas mal. 

Clémentine

Donc tu te relances dans une autre aventure entrepreneuriale. 

Alison

Oui, je dormais un peu trop. 

Clémentine

Pour terminer cette interview, j’avais envie de te demander, tu les as perdu tes 30 kilos, aujourd’hui tu as des kilos de muscles peut-être en plus, comment tu te sens dans ton corps aujourd’hui ? 

Alison

Pas si facile, c’est pas magique mais j’ai trop confiance en lui. Je sais que chaque mois il m’amène dans une étape Il y a aussi un truc avec le sport d’assez gratifiant, c’est que tu as des récompenses immédiates. Tu as une récompense immédiate de ton moment hormonalement, chimiquement parlant, mais tu as une récompense aussi de… En tant qu’adulte, il y a très peu de moments où on évolue. On est dans notre routine, on est dans notre taf. T’as pas de moment où tu te sens dire « ben là j’ai évolué ».

Alors que quand tu t’inscris dans une course, quand tu t’inscris dans une salle, ben t’as certains mouvements, quand tu regardes dans le rétro, t’es là « il y a trois mois je faisais comme ça quoi », ou « j’avais mis tel poids », ou « là je séchais dans ce moment dans l’aérox, ben là j’étais cramée, carbonisée, puis là j’ai fait 15 secondes de moins, 30… En fait c’est des récompenses. Et nous les adultes, on a perdu un peu cette âme d’enfant, ce truc où on est trop content, on a une petite médaille, mais là tu l’as à chaque fois, que ce soit dans ta petite montre ou dans ton petit truc. T’as des moments où le soir tu rentres, tu te dis vas-y j’ai fait un truc cool. Et il y a un début et une fin.

Alors quand t’es entrepreneur, tu commences ta journée et tu la termines jamais. Et moi ce que j’aime dans le sport c’est que j’ai un début, La session est terminée, il y a une fin et j’ai une récompense immédiate de cet instant et j’ai une solution et une vision de mon travail accompli qui est fermé, qui ferme une case jusqu’à ce que j’en ouvre une autre lendemain. Ça fait vachement de bien ça, de commencer quelque chose et de le terminer. 

Clémentine

C’est vrai que ce soit dans la parentalité, c’est jamais fini. On ne ferme jamais la case. Que ce soit dans l’entreprenariat, tu ne peux pas non plus. 

Alison

Ça, je l’ai découvert dans le sport. 

Clémentine

Et le sport te donne ce cadre qui est sécurisant en fait. 

Alison

Qui est sécurisant, je sais quand ça commence, je sais quand ça termine, et je sais si j’ai réussi, si j’ai raté, parce qu’il y a des moments où il y a des cours qui sont plus difficiles que d’autres, pour mille raisons. Ça fait aussi partie de quelque chose qui est très agréable je trouve, de ressentir des échecs, de ressentir des trucs, et surtout des échecs et des réussites… Tous les jours, t’en as des nouvelles. T’es pas sur un truc, oh, j’ai raté ça, ça va me coûter pendant 4 mois et demi. Ça y est, relève-toi, c’est pas grave, lendemain, tu repars sur un nouveau truc. Et ça, c’est hyper agréable, je trouve. 

Clémentine

Si t’avais un dernier truc à dire à quelqu’un qui a été dans ta position, avec zéro éducation au sport, avec un corps qui ne lui ressemble pas et dans lequel cette personne n’est pas à l’aise, tu lui dirais quoi ? 

Alison

Que… Qu’il a pas moins que les autres. Il sait juste pas qu’il a. Tu vois ? Genre on n’a pas moins quelqu’un d’autre. Même une personne dans la maladie, même dans le handicap, arrive à faire des trucs de fous. Quelque chose qui m’a énormément passionnée, ça a été les Jeux Paralympiques. J’ai jamais regardé les JO, j’ai jamais regardé. 

Clémentine

C’est vrai ? 

Alison

Ça m’a passionnée. Justement dans ce truc de rapport de pourquoi on va croire qu’on n’est pas capable d’eux, et tu vois des mecs qui nagent, qui n’ont pas de bras, pas de jambes. Du coup, qu’est-ce que j’ai fait ? Je suis allée à la piscine. Et je nage maintenant, genre j’ai pris un cours ou deux et tout, je nage comme une bête. Mais à quel moment je sais pas nager ? Lui, il nage. Genre t’as plein de trucs où tu te dis… Tu peux pas… Enfin, juste… Vas-y, fais ! Arrête de penser, fais, vas-y, et… Et la nulle en sport, le nul en sport, déjà, il n’existe pas. Je suis persuadée qu’il n’existe pas. Et il y a aussi quelque chose où le monde des sportifs n’est pas un monde à part.

Genre, on n’est pas une sorte de porte avec que des beaux-gosses et des bombes atomiques derrière la porte avec… Non, c’est… Tout le monde est capable d’aller dans le sport, il suffit justement de passer la porte d’une salle de sport, de se retrouver sur la ligne de départ d’une course, pour te rendre compte que les nuls en sport n’existent pas. Je ne sais pas si tu as déjà vu un marathon, ou si toi tu l’as déjà vu, mais les gars, ils vont le faire des fois en 18 heures, ils vont être acclamés comme le mec qui l’a fait en une heure et demie. Est-ce qu’on s’est dit que ce mec était nul ? Il s’est inscrit à un putain de marathon. Il a déjà fait un pas que je ne sais pas combien de pourcentage de la population n’oserait pas faire.

Et nous on le regarde, on se dit il est normal. Mais toi par contre, t’es dans ton canapé, tu dis je suis nulle. Genre vas-y putain. 

Clémentine

On le sait qu’en sport, il y a la génétique qui joue. Clairement, si t’as eu des parents sportifs, ça va aider. Mais on sait très bien aussi que c’est pas inné, c’est beaucoup de travail. On se rend pas compte le travail pour les sportifs de haut niveau. Tout le temps qu’ils ont passé à répéter, répéter, répéter des gestes et à pas abandonner. 

Alison

Même demain, tu peux partir dans de la compétition, tu peux partir, pourquoi pas, moi à 36 ans me dira j’ai envie de faire des compètes, des trucs. Est-ce que, même si je termine dernière, foncièrement je suis nulle ? Est-ce que déjà le fait d’être dans la compète ou dans le… Est-ce que je suis nulle ? Mais pas du tout. Mais ça, il y a mille ans. Mais oui. Mais il y a mille ans, je ne l’aurais jamais compris. 

Clémentine

D’ailleurs, je t’ai invité plusieurs fois à mes week-ends où on part en randonnée. Tu m’as toujours dit non. Peut-être que maintenant tu vas venir avec nous. Peut-être que je dirais oui. 

Alison

C’est vrai, je disais non à tout. 

Clémentine

Tu disais non à tout, c’est vrai, puisque je te proposais de faire, viens on va faire du yoga, viens on va faire ci. 

Alison

Du yoga, même dans des événements, il fallait faire un yoga deux minutes, ça me barbait. Et oui. 

Clémentine

Comme quoi on peut changer. 

Alison

Et oui. 

Clémentine

On peut y arriver. Merci infiniment Alison. 

Alison

Ben non, merci à toi. 

Clémentine

Je crois qu’on aurait pu continuer longtemps, mais je pense que c’est bon là. On a une bonne idée de comment créer un déclic avec plein de faux départs. 

Alison

Ouais de ouf. Tu vois. Merci. Merci à toi. 

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