Épisode 178 – Quelle relation entre nos traumas et nos maux corporels – Catherine La Psy

Parents · Expert·es · Éducation · Post-partum · Accouchement · Psychologie · Santé · Travail · Famille Parents · Expert·es · Éducation · Post-partum · Accouchement · Psychologie · Santé · Travail · Famille Parents · Expert·es · Éducation · Post-partum · Accouchement · Psychologie · Santé · Travail · Famille Parents · Expert·es · Éducation · Post-partum · Accouchement · Psychologie · Santé · Travail · Famille

En 2023, vous aviez adoré son passage pour vous expliquer les bases de la théorie de l’attachement dans les relations adultes, puisque c’est l’épisode le plus écouté de cette année-là.

En 2024 on a voulu vous proposer un autre thème. Celui où l’on part explorer le monde du trauma et des conséquences ou non sur le corps. D’ailleurs il y a un excellent épisode sur le trauma avec la psychologue Noémi Benhamou si vous voulez commencer par là pour tout comprendre, c’est l’épisode 116.

Vous avez forcément entendu dire que le corps n’oublie rien ou que cette personne là somatise, ou encore que le corps ressent en premier, avant la tête.` Mais est-ce que c’est vrai ? Est-ce que nos traumatismes émotionnels impactent nos corps à ce point là ?

Pour le savoir, il faut écouter cet épisode passionnant !

LES LIENS UTILES :

Épisodes de podcast : 
Épisode 116 – L’EMDR pour gérer les traumas des petits et des grands – Noémi Benhamou psychologue en périnatalité
Épisode 122 – Comprendre son style d’attachement pour mieux gérer ses relations amoureuses, amicales et parentales – Catherine La Psy

Livres : 
Le corps n’oublie rien, Bessel Van Der Kolk


TRANSCRIPTION DE L’ÉPISODE :


Clémentine Sarlat : Salut Catherine!


Catherine la Psy : Salut Clémentine!


Clémentine Sarlat : Je suis trop contente de te recevoir pour 2024, puisque je sais que tu ne le sais pas vraiment, enfin un petit peu, mais tu es fait partie de l’épisode qui a été le plus écouté sur mon podcast l’année dernière. C’était sur le lien d’attachement et je crois que les gens étaient vraiment intéressés pour comprendre ce que c’est déjà chez nous, les adultes, parce qu’on en parle beaucoup pour les enfants, mais on n’en parlait pas assez pour les adultes. Donc, merci de revenir dans le podcast.


Catherine la Psy : Merci à toutes les personnes qui, visiblement, se sont intéressées à notre échange la dernière fois, parce que je n’aurais pas imaginé forcément que c’était le podcast le plus écouté. Ça m’a fait très plaisir.


Clémentine Sarlat : On va pas du tout parler de lien d’attachement, enfin peut-être, j’en sais rien d’ailleurs, tu vas me dire?

Catherine la Psy : Un petit peu.

Clémentine Sarlat : Mais en tout cas là, on va se concentrer sur les traumatismes et ce qu’on peut ressentir dans le corps, ou en tout cas le lien entre notre esprit et notre corps, parce qu’il y a beaucoup à dire. Déjà, est-ce que tu peux nous expliquer à nouveau ce que c’est un psychotrauma?


Catherine la Psy : Un psychotrauma, c’est un traumatisme psychologique, plutôt psychique, et qui va avoir un impact très fort sur le fonctionnement de notre cerveau. Je dis souvent parce que parfois, avec le temps, notre cerveau peut traiter un traumatisme.

Si on vit un traumatisme dans sa vie et qu’on a des facteurs de résilience, on n’a même pas forcément besoin de faire une thérapie. Mais en tout cas, un certain temps, le choc va faire que notre cerveau va changer de structure. Et donc, les informations que notre cerveau traite tous les jours, ça va changer aussi. Et si ça s’installe dans le temps, c’est ce qu’on appelle le stress post-traumatique. Alors, sur le plan technique DSM, c’est-à-dire le manuel diagnostique, on dit qu’à partir d’un mois après un événement, si on a encore des symptômes, on peut déjà dire que c’est un stress post-traumatique, nous, dans la pratique, on dit que ça pourrait même aller plus loin, 4 à 6 mois.
Mais si après, tu as encore des symptômes qui montrent que ton cerveau ne traite plus les informations sensorielles, les choses qu’on te dit, les choses que tu ressens, si tes émotions ne t’arrivent plus bien à les réguler, etc. Si tu as encore des symptômes comme ça, ou même des images qui te reviennent, on va considérer que tu as un stress post-traumatique.
Ça veut dire qu’il y a quelque chose de durable qui s’installe dans le dysfonctionnement de son cerveau. On pourrait dire ça comme ça.

Et en gros, dans le psychotrauma, la dimension la plus importante, c’est l’émotion. Ça veut dire qu’on a une émotion tellement intense pendant un temps suffisamment long pour que le cerveau, on pourrait dire, il bug quelque part.
Et soit il va buguer, et puis tout ça va se remettre un petit peu dans l’ordre le temps qu’il traite ça, soit ça va être durable.


Clémentine Sarlat : Je me souviens il n’y a pas très longtemps sur les réseaux sociaux tu as fait une vidéo qui m’avait interpellée où tu disais si une année ou deux années après un événement vous pleurez encore rien qu’à l’évocation de l’événement, c’est qu’en fait vous n’avez pas réglé le trauma, c’est que la douleur elle est encore là, l’émotion elle est encore très présente. C’est ça un peu?


Catherine la Psy : On ne va pas le dire comme ça de source sûre, parce que le cerveau est très complexe. En tout cas, c’est l’hypothèse, c’est-à-dire que c’est effectivement ce que je disais dans cette petite vidéo. Si un patient arrive en séance et me parle d’un sujet qui a un an, deux ans et il pleure beaucoup, moi, j’ai l’hypothèse qu’il y a peut-être encore quelque chose qui est installé, parce que même un deuil, régulièrement, je dis régulièrement, c’est pour dire qu’on est tous différents, mais régulièrement, au bout d’un certain temps, on peut parler des choses ou de la personne, sans que ça nous envahisse émotionnellement. Et quand c’est le cas, on se dit peut-être qu’il y a un stress post-traumatique.


Clémentine Sarlat : C’est intéressant. Donc, ça veut dire que notre corps parle quand même, un petit peu.
Et tu vas nous en parler aujourd’hui dans l’épisode. Déjà, pourquoi est-ce qu’on a cette expression où on dit le corps n’oublie rien?
Qu’est-ce que ça signifie?


Catherine la Psy : Alors déjà, c’est le titre d’un livre qui est assez connu sur le psychotrauma, justement, qui est bien fait. Donc, si les gens se demandent, est-ce que je peux le lire? Oui, vous pouvez lire ce bouquin.
C’est un livre grand public en plus. Il y a des choses techniques, mais ce n’est pas que pour les psys. Donc, il peut être compréhensible tout à fait par toute personne qui veut s’intéresser à la question.

En fait, c’est l’idée que quand tu vis des éléments émotionnels, dont je disais qu’ils font vraiment partie du traumatisme, ça a des conséquences corporelles. On voit bien quand on a du stress, même à un niveau qui n’est pas traumatique, on voit bien toutes les conséquences chimiques qui se passent dans notre corps.


Il y a du cortisol notamment, de l’adrénaline, ça va rassembler toute notre énergie notamment sanguine vers les éléments vitaux, pour qu’on puisse fuir s’il faut fuir, se battre s’il faut se battre. Donc ça a vraiment des conséquences corporelles. Et le problème, c’est que si tu as une émotion extrêmement intense, qui du coup a ses conséquences physiques, mais qu’elle dure dans le temps, et ton corps en fait, c’est aussi une partie de ton cerveau et ton cortex moteur, c’est-à-dire la partie de ton cerveau qui va gérer le corps, va créer une mémoire de ça. Il va se dire « Ok, alors maintenant, quand il se passe ça, il faut que je réagisse hyper vite» et donc, quand je vois tel animal qui un jour m’a mordu, par exemple, j’ai été traumatisée parce que j’ai été mordu, imaginons par un chien.
Dès que je vais voir un chien, tout de suite, je vais avoir les mêmes conséquences émotionnelles qui se mettent en route dans mon cerveau, grâce à ma mémoire, parce que notre mémoire, ça sert à ça, ça sert à savoir comment réagir à des situations qu’on rencontre. `

Et puis du coup, mon corps va réagir tout de suite aussi. Sauf que si, en fait, là, c’est un tout petit chien qui ne s’est même pas approché de toi, finalement, tu as les conséquences de ce traumatisme après coup, mais elles sont à la fois émotionnelles et corporelles, puisque quand tu as une émotion, ton corps, il va y réagir.



Et donc, parfois, en fonction de comment ton système émotionnel s’est déstructuré, on en avait un petit peu parlé, comment l’insécurité notamment d’attachement ou des traumatismes peuvent déstructurer la façon dont ton seuil de déclenchement de stress ou de menaces se met en place. En fait, tu peux avoir un seuil qui est devenu hyper bas et donc tu as tout le temps des conséquences corporelles de tout un tas de choses.


Clémentine Sarlat : C’est pour ça que parfois on peut se dire, mais pourquoi j’ai une réaction disproportionnée à un événement mineur, sans comprendre la racine, la cause, qui pourrait venir de ça, d’un trauma qui n’a pas été traité, donc notre corps est en alerte, alors qu’il n’y a pas un danger imminent, mais il l’a associé tel quel.


Catherine la Psy : Tout à fait. Et en plus, ça peut arriver qu’on est tellement habitué à ressentir, notamment les choses sur le plan émotionnel, qu’on ne se rend même plus compte qu’on est tout le temps déclenché émotionnellement. C’est pour ça que parfois les gens vont dire « mais c’est mon corps qui parle », parce qu’ils ressentent la sensation physique, mais leur cerveau ne traite même plus l’émotion, alors qu’il y a une émotion. Des fois, les gens vont dire « mais je ne suis pas si stressée que ça. » Forcément, si, quelque part, il y a du stress. Mais peut-être que vous ne le ressentez même plus sur le plan émotionnel. On ne le ressent plus que corporellement. Et quand tu es habituée pendant… Ça fait tellement longtemps que tu es stressée ou que tu as ton stress post-traumatique. Finalement, l’émotion, tu n’as plus l’impression de la ressentir.


Toi, tu vas dire non, mais moi, ça va globalement. Je ne sais pas si tu vas chez l’ostéo ou le kiné, il va te toucher le corps. Non, ça ne va pas en fait. On a les manifestations corporelles du stress. Mais toi, tu ne les ressens plus parce que tu es tellement habituée.


Clémentine Sarlat : Le seuil de tolérance à l’inconfort, à la douleur modifie avec la récurrence, avec l’habitude de ce qu’on peut vivre et donc on peut passer complètement à côté du fait qu’on a un traumatisme qui s’exprime mais qu’on n’arrive plus à déceler.


Catherine la Psy : Et ça peut même être le cas, même sans traumatisme, ça peut être le cas avec un espèce de stress chronique qui serait pas forcément traumatique, mais au fait auquel tu t’es habituée. Et donc, toi, t’as l’impression que cet état habituel que tu as, il est… Alors je dirais peut-être pas zen, peut-être que les gens se qualifient quand même pas de zen à ce point là, mais ils vont dire non, moi je suis pas stressée. Puis, si tu mesures leur taux de cortisol dans le sang, tu vas voir, ok, mais si, en fait, les personnes ne se peuvent plus ressentir émotionnellement. Donc, au bout d’un moment, comme ils ont quand même les manifestations physiques, il y a quelque chose qui va se passer.


Clémentine Sarlat : Comment est-ce que physiquement, le corps stocke un trauma? Tu vois, comment est-ce que ça se manifeste? Parce que pour toi, ça pourrait paraître évident, mais je pense que pour nous, lambda, on ne comprend pas vraiment ce que ça veut dire.


Catherine la Psy : Alors, il y a des hypothèses.
Je peux parler des hypothèses, mais ça reste des hypothèses. Il y a toutes les hypothèses énergétiques qui sont pour le coup… Là, il n’y a pas de données scientifiques où on peut penser qu’il y a des liens entre l’endroit où tu as mal et ta problématique. Et que ça se stockerait avec des mémoires cellulaires, etc. Ce n’est pas des choses scientifiques, mais ça peut être des croyances qui, parfois, aident les gens.
Sur le plan scientifique, l’hypothèse va être faite que si on reste sur le traumatisme, et pas forcément sur le stress, que parfois, les mouvements que tu as faits pendant le traumatisme, En fait, ils font partie de la mémoire traumatique.
Et donc, s’il y a notamment dissociation, c’est une hypothèse de travail qui dit que quand on a un traumatisme, notre cerveau, pour se protéger des conséquences, notamment émotionnelles, du traumatisme, va altérer les connexions cérébrales dans les neurones, entre les parties du cerveau qui gèrent la vie de tous les jours et la partie de la mémoire traumatique.
Du coup, à priori, ça ne pourrait pas bien s’intégrer. Et donc, tu peux avoir les mémoires des sensations corporelles. Les neurones liés à la sensation corporelle peuvent se redéclencher.
Par exemple, si je reprends mon chien, peut-être que tu vas avoir le même mouvement que tu as eu quand tu t’es fait mordre. C’est une hypothèse de travail avec laquelle on travaille dans certaines approches du psychotrauma. Tu peux avoir ça.
Après, ça reste des hypothèses, donc on peut aussi dire que la mémoire du corps, sur le plan scientifique, je ne suis pas sûre qu’on sait vraiment ce que c’est et est-ce que ça existe.

C’est plus une hypothèse de travail qui dirait que tu peux avoir dans tes souvenirs quelque chose de corporel, puisque les connexions cérébrales ont été mises de côté par la dissociation, quelque chose comme ça.


Clémentine Sarlat : Et alors sur un événement qui serait plus un stress constant, auquel on fait beaucoup plus face aujourd’hui, finalement, dans notre société, dans notre façon de vivre, est-ce que là, ça pourrait se stocker différemment? Est-ce que c’est un enjeu sur le système nerveux, sur notre régulation quotidienne? Comment ça s’infiltrerait? Comment on le verrait?


Catherine la Psy
En fait, le truc, c’est le terme de stockage, moi, que je ne comprends pas comme ça, en tout cas avec ce que je peux lire sur le plan scientifique. C’est vrai que c’est un terme qu’on utilise beaucoup. Et même quand, dans le titre, le corps n’oublie rien, on a l’impression que ça pourrait effectivement se stocker quelque part dans le corps. Pour moi, ça, ce n’est pas quelque chose qui a du sens sur le plan scientifique. C’est juste une histoire de souvenirs et ou de dissociation, pour le trauma en tout cas. Après, pour le stress, là, pour le coup, on a des données, le stress chronique, il va déréguler notamment le seuil de détection de la menace, soit dans l’un sens, soit dans l’autre, ça va dépendre des situations.
Et du coup, on va se retrouver avec notamment, il y a d’autres choses aussi, mais notamment du cortisol et de l’adrénaline, beaucoup, qui normalement sont censés être à court terme.
Pour pouvoir réagir à ton stress, voilà, je reprends mon chien qui s’approche de toi, tu veux t’enfuir, donc tu as ton adrénaline, ton cortisol qui t’ont augmenter tes pulpations cardiaques, qui t’ont anesthésié un peu le reste du corps pour que tu puisses t’enfuir sans avoir mal, enfin tous ces processus normaux qu’on connaît pour le stress, et puis tu t’es noyé du chien, et puis là ça retombe et c’est terminé.

Mais si t’as un stress chronique, en fait ça s’arrête jamais. Donc tu es constamment en train de balancer du cortisol, de produire du cortisol et de l’adrénaline.


Et ça, donc, dans le but du court terme, ça crée ce qu’on appelle des protéines pro-inflammatoires, c’est-à-dire que ça doit inflammer un petit peu un certain nombre d’endroits dans ton corps pour faire ta fuite, notamment. Mais si tu t’arrêtes pas d’avoir ces protéines pro-inflammatoires, en fait, ça, à long terme, c’est pas bon, notamment pour ton système immunitaire et puis pour certains fonctionnements de certains organes.

Et donc, ça va commencer à faire que ton corps ne fonctionne plus très bien puisque ces protéines-là qui commencent à être identifiées. Si tu lis des études scientifiques sur le sujet, ils commencent à dire que c’est celle-ci et celle-ci notamment. Ça abîme ton corps, mais ça ne va pas abîmer ton corps à un endroit spécifique en fonction de ton problème psychologique.


Je prends toujours cet exemple que j’avais lu dans un livre énergétique écrit Si vous avez mal au genou droit, c’est que vous avez un problème relationnel avec votre mère. En tout cas, scientifiquement, tes protéines pro-inflammatoires ne vont pas se mettre dans ton genou, spécifiquement sur ton cartilage, par exemple, parce que tu as un problème avec ta mère.
Par contre, tu peux avoir des problématiques.

Après, les liens entre j’ai mal à tel endroit et ça veut dire tel problème, ça c’est plutôt de l’ordre de la croyance et si ça aide les gens, pourquoi pas.

C’est juste que, par contre, ça, sur le plan scientifique, il n’y a pas de données là-dessus.

Mais par contre, oui, ça va abîmer ton corps. Tu vas aussi moins bien te défendre parce que le système immunitaire marche moins bien si tu as toutes ces protéines-là.


Clémentine Sarlat : Est-ce que c’est pour ça qu’on dit qu’on somatise? Est-ce que c’est un lien? Qu’est-ce que ça veut dire déjà, de somatiser?


Catherine la Psy : Alors la psychosomatique, ça a une histoire. Avant, ça voulait dire « c’est dans la tête ». C’était quand on disait « non, c’est pas vrai, ça n’existe pas ». Et maintenant, on revient beaucoup de ça. Et d’ailleurs, il y a des chercheurs qui disent que ça devrait être une discipline de recherche à part entière, parce que pendant longtemps, c’était une discipline psychiatrique.
Donc, on voit bien que c’était de la recherche au niveau d’une problématique qu’on considérerait comme psychologiques et psychiatriques. Et en fait, là, maintenant, on se dit, non, c’est plus que ça.

Donc, il y a ce côté avec ce stress chronique, notamment, que ça va déréguler la production de tous ces substances chimiques dont je parlais. Et donc, ça va créer des vraies choses. Parfois, un bilan avec une imagerie, tu vas voir vraiment quelque chose.


Même si ça vient à l’origine d’un dérèglement des systèmes de stress, le truc est là. Et c’est psychosomatique.
Ça veut dire que ça s’est déclenché avec ça.

Et puis, ça peut être aussi un des règlements des perceptions que tu vas avoir. Donc, même si tu ne le vois pas sur l’image, ça n’empêche pas que tu as mal quand même. Parce que c’est la manière dont ton cerveau va traiter une douleur ou une sensation physique qui va devenir problématique, parce qu’il va penser que c’est un problème et puis ensuite, il va faire ce qu’on appelle du catastrophisme. C’est-à-dire que tu auras des pensées négatives et dramatiques qui sont associées, donc tes émotions aussi. Et tout ça va s’auto-entretenir.


Donc, la psychosomatique, c’est l’ensemble des choses qui serait liée par le traitement cérébral d’une sensation, et qui après va faire que ça se met dans le corps. Soit on peut le voir, soit on ne peut pas le voir, mais dans tous les cas, la sensation, elle est là quand même, et la douleur, elle est là quand même. Et il y a beaucoup de patients qui vivent avec des douleurs chroniques, à qui on dit, ben non, écoutez, non, ce n’est pas normal que vous ayez mal, ou vous ne devriez pas avoir mal.
Alors ça, c’est la phrase génial.
Oui, d’accord, je ne devrais pas, mais donc, c’est-à-dire, là, j’ai mal en fait. Et la douleur, elle existe vraiment.

Et les études qu’ils font, ils disent que pour l’instant, il n’y a pas de causalité sûre.


Mais les pistes, c’est vraiment des dysfonctionnements dans le traitement de l’information. Et du coup, les gens ont vraiment mal, même si ça ne se voit pas.


Clémentine Sarlat : Est-ce que l’expression française qui dit « j’en ai plein le dos », qui voudrait exprimer le fait qu’on est sur stressé, qu’on n’en peut plus et donc ça se traduit par une douleur au dos, elle est vérifiée scientifiquement? Elle a une réalité ou c’est juste une belle expression pour raconter quelque chose?


Catherine la Psy : Ça c’est ce que je disais juste avant, il y a des bouquins comme ça. Après moi à une époque j’étais férue de ça. Les bouquins de Michel Odoul ou Martel qui vont te dire, en fonction de là où tu as mal, ça te donne une indication sur ta problématique psychologique.

Si, bien sûr, je veux bien préciser quand même, si ça fait du bien, très bien, mais d’abord un check-up médical, si effectivement, ça n’aboutit pas, ça peut être aidant, en fait, parfois, pour se poser certaines questions qu’on ne serait peut-être pas posées, etc.
Après, ça, non, ce n’est pas scientifique, c’est plus peut-être ça met du sens. Notre cerveau, il a besoin de mettre du sens aussi sur les choses. C’est aussi pour ça que les personnes qui n’ont pas de réponse sur leurs sensations et leurs douleurs, c’est très, très difficile à vivre.



On leur dit en gros, on ne sait pas. Et du coup, ils n’ont aucun contrôle parfois sur ce qui peut les aider à diminuer les sensations et les douleurs. Donc ça, c’est vraiment très dur. Et donc, quand tu peux tourner vers des significations ou un sens qui est énergétique ou quelque chose comme ça, ou symbolique, ça peut faire du bien aussi, mais ça pour le coup… Il n’y a pas de lien aujourd’hui avec « j’en ai plein le dos », ça veut dire que c’est trop difficile. « J’ai mal à la gorge », ça veut dire quelque chose que je n’arrive pas à dire. Toutes ces choses qui sont symboliques.
Après, si ça permet d’ouvrir des questionnements qu’on ne serait pas fait avant, pourquoi pas? Tout questionnement est toujours bon pour débloquer des choses sur le plan psychologique.

Mais je dirais juste attention à ce que ça ne remplace pas, par contre, des vérifications médicales aussi en amont, de vérifier ça.

Alors du coup, tu posais la question tout à l’heure pour le système nerveux.
Finalement, quand on a des douleurs, des sensations de douleurs, tu vas aussi avoir des mémoires de cette douleur-là qui vont se mettre en place et donc tu vas avoir des conséquences émotionnelles, comportementales bien sûr, parce que tu vas parfois faire de l’évitement de certains mouvements ou de certaines choses. T’as peur de faire.
Et oui, ça, ça va déréguler le seuil de détection sur le plan du système nerveux, notamment autonome, qui fait que c’est pas toi qui décide si tu le déclenches. En fait, ça se déclenche tout seul.


Et donc, tu peux déclencher des réactions hyper intenses, notamment dans ton système nerveux sympathique, et donc qui va suractiver tous les processus liés au stress. Donc, vraiment, ça va dans les deux sens.

C’est-à-dire, oui, tu peux avoir une problématique psychologique qui, à force de te générer du stress, créer un enchaînement de production chimique dans ton corps, et donc après ton corps va être, on pourrait le dire, abîmé. Mais l’inverse aussi, tu peux avoir une douleur qui devient traumatique après, c’est-à-dire que tu as d’abord eu super mal, par exemple, et en fait ta douleur a été tellement insupportable que ça crée un traumatisme. Tu peux être traumatisé par une douleur. Plus jamais ça, c’est pas possible, mon corps n’y supporte pas.

 
Dès que t’as une douleur, ton seuil de détection du danger va être détecté, peut-être parce quelqu’un t’a juste pincé, ou que t’as eu un traumatisme parce que tu t’es cassée le genou était resté plusieurs heures avant que les secours arrivent, t’as eu super mal et ça, ça crée un traumatisme.

Ça va dans les deux sens aussi, en fait.
Et du coup, tu peux te retrouver suractivé par une petite douleur après, parce que ta mémoire… C’est un petit peu comme les gens qui ont fait des crises d’angoisse pendant des années.

Même s’ils n’en font pas pendant un petit moment, ils en refont une un jour, et tout de suite ils ont l’impression qu’ils sont revenus en arrière et qu’ils retombent. Pareil avec la dépression, t’es en dépression pendant des années, t’es à peu près traité, t’es en rémission, t’es considéré guéri.


Et puis un jour, tu ne te sens pas bien, t’es juste un peu amorphe… Et hop, ça y est, ça te crée comme si tu revenais en arrière. Alors que là, c’est juste une journée où c’est moins bien. Mais là, ça peut être complètement pareil pour la douleur. Ça peut créer du traumatisme.


Clémentine Sarlat : Si je le transpose, par exemple, pour les parents, et notamment avec l’accouchement, on le sait qu’aujourd’hui, certains accouchements peuvent être traumatiques. Ça voudrait dire, parce que là je fais le lien avec ce que tu dis, qu’un accouchement traumatique pourrait déclencher derrière des traumas à d’autres douleurs qui sont considérées comme superficielles ou anodines, parce que tellement il y a eu une douleur intense à un autre moment dans le corps, on ne peut plus supporter autre chose sur notre corps ?


Catherine la Psy : Ça peut être ça ou ça peut être, par exemple pour un accouchement, ça peut être des douleurs qui seraient localisées, c’est-à-dire que dès que tu vas chez le gynéco pour faire un examen normal, toi tu ressens de la douleur alors que, entre guillemets, objectivement, considérerait qu’il n’y en a pas.
Oui, mais toi, tes récepteurs sensoriels vont amener la sensation au cerveau, qui traite ça comme une douleur, et donc toi tu ressens la douleur.

Tout ça est traité dans le cerveau bien sûr, mais tu reçois l’information sensorielle au niveau de là où on te fait l’examen, et en fait toi tu l’interprètes comme une douleur parce que tu as eu ce traumatisme-là.


Clémentine Sarlat : C’est intéressant ce que tu dis parce que si ce trauma n’a pas été traité, on le traine toute notre vie, on ne se rend pas compte qu’il est là, on ne se rend pas compte qu’il déclenche qu’il y a des conséquences à ce traumatisme et on vit avec quelque chose d’hyper inconfortable sans savoir qu’on vient juste continuer le schéma du trauma en fait.


Catherine la Psy : Oui et puis en plus parfois, comme aujourd’hui encore on a quand même, on traite le corps et la psychologie de manière un petit peu séparée, c’est-à-dire que même s’il y a beaucoup de médecine alternative qui essaye de rejoindre les deux, si tu vas chez un médecin, de manière générale, il va surtout traiter tes organes et ton corps. Et s’il ne trouve rien, ils vont te dire que c’est dans ta tête d’aller chez le psy.
Et nous, chez le psy, en tout cas, on essaie un peu de changer ça, mais dans nos formations, on est très branchés psychologie. Et le lien avec le corps, ça se fait un petit peu maintenant avec certaines approches, mais pas beaucoup d’approches non plus qui prennent vraiment en compte le corps.


Et puis, toutes ces études qu’on a maintenant sur les liens, notamment entre les traumatismes de l’enfance et les sensations, les problématiques corporelles plus tard, 30 ans plus tard, tu peux avoir des pathologies qui sont aujourd’hui, selon les études, vraiment corrélées à des traumatismes de l’enfance.
On regarde les études d’ACE, on avait dû en parler la dernière fois, je pense, pendant l’attachement.
Il faut qu’on arrive à travailler les deux ensemble, mais aujourd’hui encore, à part dans les médecines alternatives, malheureusement, soit on va traiter le traumatisme psychique, soit on va traiter les sensations corporelles, et du coup, en fonction des cultures psychologiques des familles, ou même d’un pays par exemple, il y a des gens qui ont été en errance médicale pendant des années et des années parce qu’on ne leur trouve pas quelles sont l’origine de leur douleur, mais on ne leur propose pas de travailler en parallèle des éléments psychologiques.

Alors que si tu traites des traumas, dans certaines études, tu dis que tu as vraiment une diminution et pour certaines personnes, il y a carrément une disparition, mais pour d’autres, tu as au moins une diminution des sensations douloureuses, des sensations désagréables corporelles, des manifestations corporelles, parce que c’est lié en fait.
Tu peux avoir un truc vraiment corporel, mais si tu fais… Dans beaucoup de pathologies, il commence à proposer de la méditation ou de la pleine conscience, qui est une forme de thérapie, et ça soulage les douleurs. En hypnose aussi, il y a des protocoles pour soulager, etc. Peu importe finalement que ce soit psychosomatique ou que tu sois déjà dans une pathologie, il faudrait qu’on puisse traiter les deux en même temps. Et malheureusement, aujourd’hui, ce n’est pas tout à fait ça. Donc, on peut avoir des gens qui se traînent des douleurs très longtemps parce qu’ils cherchent absolument sur le plan médical quelque chose ou ils cherchent absolument sur le plan psychologique, mais les deux devraient être liés.


Clémentine Sarlat : Ça m’interpelle ce que tu as dit tout à l’heure sur les traumas de l’enfance qui génèrent des pathologies à l’âge adulte. Est-ce que tu pourrais nous donner un exemple particulier pour qu’on visualise bien ce dont tu veux parler?


Catherine la Psy : Alors, ce que disent les études, c’est ce que j’expliquais tout à l’heure avec les protéines pro inflammatoires.
C’est-à-dire qu’en fait, à force d’avoir des traumas, puis un enfant, en fait, comme on avait pu le dire la dernière fois, n’a pas le cerveau suffisamment développé pour réguler lui-même ce stress ou ces émotions hyper intenses, donc il vit dans des espèces de traumas répétés, c’est ce qu’on appelle le trauma complexe, c’est-à-dire des situations qui peuvent paraître ne pas être des traumatismes, notamment pour la personne parce que ça a été sa normalité. Mais en réalité, ça a été plein de microtraumas qui ont généré un stress continu, et donc qui ont généré la libération des substances chimiques dont j’ai parlé tout à l’heure.
Le problème, c’est que quand ça se passe à un moment où ton cerveau est en construction, ton cerveau se construit avec ça. Donc, ton système de stress, ton système de détection du danger, ton système de mémoire, avec tes souvenirs de qu’est-ce qui est dangereux, qu’est-ce qui ne l’est pas? En fait, il va être suractivé tout le temps.
Et du coup, tu te retrouves avec des personnes qui ont un système de stress très, très dérégulé. Et avec le temps, ça finit par créer les problématiques physiques.
A priori, pour certains, on peut voir ça 30 ans après. Alors, t’as des pathologies qui sont étudiées spécifiquement. Notamment, la fibromyalgie a été étudiée, les douleurs pelviennes ont été étudiées. Dans les études que j’ai lues, je ne sais pas si c’est lié à l’endométriose, mais ça pourrait être intéressant de voir ce qui se dit maintenant avec l’endométriose. Est-ce que ça pourrait être corrélé à des choses comme ça?


Mais en tout cas, sinon, des douleurs pelviennes avec ou sans endométriose, ça, je ne sais pas. Des maux de tête, beaucoup aussi. Et puis, des douleurs chroniques à différents endroits du corps, c’est corrélé avec des choses comme ça. Donc, c’est vraiment important de pouvoir aller vers des recherches qui mettent les deux en même temps.

C’est-à-dire que peu importe de quel sens c’est venu, finalement, les gens ont mal. Et donc qu’on traite le corps et aussi la psychologie. Et il disait que dans la majorité des cas, les gens qui ont des douleurs chroniques, quand ils arrivent en thérapie, en fait, on découvre qu’ils ont plusieurs traumatismes, alors comme c’est ceux qui sont identifiés dans les études ACE, mais qu’ils ont des traumatismes importants dans leur enfance.
Et il disait, plus tu as de traumatismes, plus tu as des risques.
C’est-à-dire, plus les gens ont des douleurs intenses, vraiment fortes, avec tout un tas de pathologies, et plus il y a un nombre de traumatismes qui est retrouvé dans leur histoire.


Clémentine Sarlat : Ça me fait juste penser à ce qu’on disait, qu’il faut arrêter de séparer le corps et l’esprit. Parce que combien de médecins en tant que femmes, majoritairement en tant que femmes, on s’est retrouvés face à des gens qui nous disent, des gens de la profession médicale, qui nous disent, c’est dans votre tête madame, c’est bon, vous n’avez rien senti, arrêtez, ou vous simulez, ou voilà, ça n’existe pas. Il faut le dire quand même que c’est très genré, ce genre d’explication du corps médical, quand on ne comprend pas ce qu’a le ou la patiente, pour le coup.
Il y a une tendance quand même à former différemment aujourd’hui, tu crois, le monde médical par rapport à ça?


Catherine la Psy : Juste avant de répondre à ça, je voudrais rebondir sur ce que tu as dit, qui est vraiment hyper important, parce que si on prend l’exemple de l’endométriose ou de la fibromyalgie, aujourd’hui, en plus, avec les études qui avancent, on voit que ce n’est pas du tout dans la tête. C’est aussi pour ça que moi, la psychosomatique, j’aimerais bien que ça se passe comme certains chercheurs le demandent, c’est-à-dire que ça devienne un domaine de recherche à part entière, qui soit ni corporel ni psychique, mais les deux en même temps. Parce qu’en plus de ça, il y a que les découvertes scientifiques, petit à petit, nous amènent parfois à se dire, attends, non, mais ça, c’est même pas psychosomatique, ça, en fait, ça, c’est complètement autre chose, c’est un autre truc.
Donc, d’être très prudent avec ça, avec cette idée que c’est dans la tête, même quand on ne trouve pas, on peut faire l’hypothèse que ça vient d’origine traumatique, d’origine d’un stress chronique, mais en fait, il n’y a que l’avenir et la recherche qui nous dira si on s’est trompé ou pas.
Ça ne fait pas de mal de travailler les traumatismes de toute façon, puisqu’on sait que ça joue quand même sur l’intensité de la douleur, puisque ça diminue ce qu’on appelle le catastrophisme, c’est-à-dire les pensées obsédantes, négatives, qui vont avec les sensations corporelles. Par exemple, je vais mourir, je ne vais pas le supporter, je ne m’en sortirai jamais ou je ne peux plus faire ci, faire ça. Ça augmente les émotions intenses, désagréables, qui augmentent elles aussi les douleurs.

Donc de toute façon, ça peut aider à diminuer l’intensité des douleurs, donc c’est jamais perdu.

Mais par contre, ne jamais dire à des patients qu’on soit psy ou qu’on soit du côté somatique. C’est dans votre tête et on en est sûr. Parce qu’en fait, il y a plein de choses qui nous ont montré. Que ce n’est pas le cas. En tout cas, nous, en psy, on a reçu à une époque beaucoup de gens qui avaient un diagnostic de fibromyalgie qui était devenu le diagnostic fourre-tout. Et puis aujourd’hui, on commence à voir qu’en fait, ça a vraiment des origines neurologiques qui ne seraient pas forcément en lien avec la psychologie. C’est vraiment important d’être méfiant avec le terme psychosomatique.


Clémentine Sarlat : Et je rebondis sur ce que tu dis pour les femmes enceintes qui vivent l’hypermérèse gravidique, donc qui vomissent de manière disproportionnée et anormale et qui passent neuf mois enfer. Il faut le dire, pour ces femmes-là, c’est vraiment difficile. Ça fait quelques mois, on vient de trouver qu’il y a une protéine qui déclenche cette hypermérèse gravidique et que ce n’est pas dans la tête des femmes parce que selon certains psychanalystes, c’était soi-disant la femme qui ne supporte pas son bébé et qui le rejette.
Et donc, on a culpabilisé des générations de mères qui, malheureusement, ont vécu l’hypermérèse gravidique. Alors qu’aujourd’hui, on a découvert que c’est sur le plan physique.


Catherine la Psy : Ce terme de psychosomatique, moi, c’est pour ça que je ne l’aime pas trop parce qu’il a cette connotation « c’est dans la tête et ça n’existe que dans votre tête ». Tout dépend après ce qu’on en fait. On peut dire, bon, si on se disait c’est dans la tête, mais je vous crois quand même. Parce que le problème, c’est que c’est ça, c’est que les gens ne sentent pas crus, ils ne sentent pas pris au sérieux. Et j’ai lu des études, notamment sur les douleurs chroniques, qui parlaient vraiment de l’importance du sentiment de légitimité que n’ont plus les patients après. Et après, du coup, les patients, ça peut créer des problèmes psychologiques qui n’existaient pas parce qu’ils sentent qu’on ne les croit pas.
Du coup, ils sentent fous. On est en train de leur dire « vous êtes malade ».


Même quand on leur dit « c’est dans votre tête », c’est parfois dit avec un peu de mépris. Ce n’est pas dit avec « ça signifie que vous devez être très stressé, il serait important de prendre soin de vous, je connais un très bon psychologue ou une très bonne psychologue », avec empathie.
C’est plutôt dit « c’est dans votre tête, trouvez-vous un psy ». Avec parfois un peu le mépris de notre profession qui est des gens faibles et fragiles.
Donc, il y a plein de gens qui se trouvent dans une errance aussi médicale parce qu’ils n’osent plus aller dire ce qu’ils ont, parce que pour certains, on se moque d’eux, en fait. Donc, c’est hyper important d’être prudent, je trouve, avec ça. On ne sait pas ce qu’on va découvrir plus tard.


Et peut-être plus tard, on va découvrir que non, c’était peut-être accentué par un stress, OK, mais qu’il y avait quelque chose, comme tu le dis, de chimique. Et puis même si c’était accentué par un stress, le stress il apprend nos sérieux aussi, d’où il vient et pourquoi il est là.
Et parfois, les consultations médicales, ça fait partie des traumatismes qu’on traite en EMDR.

Voilà, on m’a dit ça et ça m’a traumatisé.

QUOI FAIRE ?


Clémentine Sarlat : Justement, tu me fais un très bon lien sur qu’est-ce qu’on peut mettre en place comme thérapie pour faire diminuer les douleurs corporelles, qu’on sache ou non si ça vient du psyché ou du corps? Est-ce qu’on doit forcément aller en thérapie? Est-ce qu’on doit forcément faire de la kiné, se faire masser? Qu’est-ce qu’on peut mettre en place, toi, quand tu reçois un patient qui te dit j’ai des douleurs chroniques? Qu’est-ce que tu fais?


Catherine la Psy : Alors, déjà, première chose, c’est que je vais vérifier avec la personne que, sur le plan médical, on a été vérifier, qu’il n’y a pas de choses qui mettent la vie en danger, parce que c’est quand même ça aussi qu’il faut vérifier en premier.
Et puis, sinon, je vais proposer tout ça, en fait, je vais dire, moi, voilà ce que je peux faire de mon côté, avec certaines approches psychocorporelles, c’est-à-dire que c’est des approches qui utilisent le corps, parce qu’on considère effectivement que, du fait de la dissociation, il peut y avoir des mouvements corporels liés à certains traumatismes qu’on a besoin de défaire par exemple. Si par exemple tu as une sensation d’enfermement, peut-être que régulièrement tu te tiens un petit peu comme ça.


Et donc on va utiliser différents types de techniques, soit tu vas demander à la personne d’essayer d’ouvrir, de faire le mouvement pour sentir la différence et voir si ça fait des modifications émotionnelles, de changer la posture du corps. Parfois tu peux faire lever aussi le patient et lui demander quelles sont les images qui lui viennent par rapport à des choses traumatisantes. Si vous tenez comme ça, est-ce que ça change quelque chose quand vous repensez à votre traumatisme? Tu peux le faire pousser sur des murs. Ou dans le sol pour sentir les limites, là où dans certains traumatismes les limites ont été franchies. Donc tu peux travailler avec le corps, mais tu peux aussi l’interroger. Il y a des gens qui sont très figés corporellement, ils n’osent pas bouger, notamment parce qu’ils font tout un tas de choses, ils ne veulent pas déranger, etc.
Du coup, ça se traduit physiquement, ils n’arrivent pas à bouger, donc tu vas quand même juste interroger le corps.

Tu peux faire plusieurs types de choses comme ça, mais en parallèle, je vais proposer aux patients de faire soit des massages de bien-être pour pouvoir sentir les sensations corporelles, parce qu’il y en a suite à leur traumatisme. Leurs récepteurs sensoriels ont été un peu coupés, donc c’est le contraire de la douleur. Là, vous aurez un seuil qui se déclenche très vite. Ça va être des personnes qui ont coupé certaines sensations corporelles. Et en thérapie, quand tu leur demandes qu’est-ce que vous ressentez dans votre corps, ils disent, ben, rien, alors que toi, tu vois certains endroits du corps qui bougent.
Mais là, quand même, vous sentez votre pied, par exemple, qui est en train de bouger. Oui, non, c’est vrai, je ne sentais pas.
Les sensations corporelles ont été coupées, donc il y a aussi à réapprendre, à sentir son corps, à le faire bouger, et puis parfois, selon cette hypothèse à laquelle moi personnellement je crois, quand il y a des sensations corporelles qui sont liées aux souvenirs traumatiques, d’essayer de faire bouger le corps en même temps que tu repenses aux traumatismes pour essayer de recréer des sensations, des connexions neuronales qui ne sont plus traumatiques.
C’est vraiment l’approche sensorielle motrice que je trouve très intéressante là-dessus.
Ce sont des hypothèses, mais je trouve qu’elles sont intéressantes.


Clémentine Sarlat : Quand tu fais une séance en EMDR, par exemple, tu vas redécrire un peu ce que c’est l’EMDR, même si j’ai fait un épisode entier dessus. Qu’est-ce que tu viens chercher avec le patient par rapport au trauma et aux sensations physiques?


Catherine la Psy :  L’EMDR, c’est une thérapie émotionnelle. Ce qu’on veut, c’est désensibiliser, c’est le D de EMDR, c’est desensitisation.
Désensibiliser, ça veut dire diminuer l’intensité émotionnelle liée au traumatisme. Pour toutes les raisons que j’ai décrites, c’est que si tu as moins d’intensité émotionnelle, tu déclenches pas ton système de stress et tout ce qui va avec. `

Pour ça, en fait, en EMDR classique, alors après, quand on fait du trauma complexe, les choses deviennent un peu différentes, mais imaginons sur un trauma classique simple, donc simple, c’est pas qu’il est simple à régler, même s’il est plus simple. Mais en tout cas, il est simple à identifier, les gens savent bien quel est leur traumatisme, sinon t’as aussi plein de gens qui n’identifient pas leur traumatisme.
Et donc, tu vas demander à la personne de décrire quatre éléments du traumatisme :
une image visuelle, quand c’est possible, parce qu’il y a des personnes aphantaisie qui ne peuvent pas, mais on fait avec autre chose. Sinon, de manière classique, on fait l’image.
Les pensées négatives associées, notamment dans la douleur chronique, il y en a aussi, et donc c’est très important aussi de pouvoir identifier un peu mieux.
L’émotion ou les émotions associées.
Et les sensations corporelles.

J’insiste, ces quatre éléments, on les prend dans le présent, c’est-à-dire qu’on ne demande pas aux gens de revenir à l’époque, qu’est-ce qu’ils ont ressenti, puisque leur cerveau a déjà traité une partie des choses.
On veut savoir ce qu’il en reste aujourd’hui, puisque c’est ça le stress post-traumatique, c’est ce qu’il reste aujourd’hui d’un trauma passé.

Donc on dit, aujourd’hui, quand vous repensez à ce traumatisme, quels sont ces quatre éléments?


Bon, je n’insiste pas trop, parce que je ne voudrais pas que les gens soient en train de le faire là, chez eux, et pas le faire tout seul, en tout cas pas pour la première fois, si vous faites déjà de l’EMDR, c’est moins gênant.

Ça peut être justement activant. Donc voilà.
Et donc, on va interroger vraiment la sensation corporelle. Et à ce moment-là, ce qu’on cherche, c’est d’activer ces quatre canaux de communication pour que le cerveau puisse les traiter. Parce qu’en gros, c’est comme si tu avais une pelote de laine. Tu veux tricoter, mais tu as une pelote de laine complètement emmêlée et tu ne sais pas par où prendre le truc. Si tu as trouvé un fil, par contre, tu vas pouvoir commencer à tirer le fil et là, tu vas pouvoir remettre dans l’ordre ta pelote.


L’idée, c’est un peu la même, c’est-à-dire que si tu as quatre éléments bien identifiés, alors ton cerveau va pouvoir les traiter. Alors que sinon, le traumatisme est un peu une sorte de gloubi-boulga d’éléments différents. Et parfois, rien que quand tu as réussi à faire ces quatre éléments d’identification, il y a déjà un apaisement qui peut se passer.
Alors pour d’autres, au contraire, ça les active et donc on a besoin de la suite du protocole d’EMDR. Mais pour certains, ouais ok, du coup je comprends mieux ce qui m’a posé problème parce que j’ai pensé ça et du coup ils font des liens et ils relient les choses.


Clémentine Sarlat : T’as déjà vu des choses assez ouf en session d’un ou une patiente qui grâce à ça, tu vois, a une vraie sensation physique d’apaisement où tu vois des choses qui n’auraient pas pu arriver sans avoir traité ce trauma en profondeur et sur toutes les dimensions?


Catherine la Psy :  Je dirais oui, c’est tous les jours. Mais déjà, quand on commence, c’est un peu douloureux au début d’un… D’un événement EMDR, parce qu’on demande de décrire tous ces éléments-là qui font mal, tu peux voir que la posture corporelle est en train de bouger pendant que tu décris ces éléments.
Alors soit, pour ceux que ça apaise, parce qu’ils viennent de faire un lien, ils viennent de comprendre quelque chose qui se défait très vite, et auquel cas en même pas une séance tu as pu défaire un traumatisme, et pour d’autres où c’est plus complexe, au début tu vois la modification corporelle qui se fait, la respiration qui change au fur et à mesure, les mimiques du visage qui sont en train de se passer. Et puis, au bout d’un moment, l’apaisement qui vient, et tu le vois corporellement.


Et d’ailleurs, souvent, en fin d’une séance d’EMDR, les gens disent « je suis crevé ». « Je suis crevé, j’ai l’impression d’avoir fait un voyage », etc. C’est normal, parce qu’on a activé plein de choses, et sur le plan neuronal, ça a bossé. C’est très énergivore pour le cerveau.
Mais moi, je trouve que c’est une thérapie. Alors, ce n’est pas la seule. Il y a d’autres approches, en tout cas celles que j’ai choisies, parce que moi, je trouve qu’elles sont vraiment intéressantes. Tu vois vraiment un changement entre le début et la fin de la séance. Le ton de voix des gens a changé, leur manière de choisir leurs mots, la respiration, la posture dans le canapé.


Clémentine Sarlat : Si je reprends la thérapie un peu sensorielle, on reprend on fait bouger le corps de manière à reprendre soit des limites, soit à réapproprier les sensations corporelles dans l’espace. T’as l’EMDR, est-ce que t’as d’autres choses que tu peux mettre en place?


Catherine la Psy :  Je dirais pas que l’EMDR… On fait pas vraiment bouger les gens par contre en EMDR.


Clémentine Sarlat : Non, non.
En plus, par rapport au trauma, je dis t’as celle-là, t’as l’EMDR, qu’est-ce que t’aurais d’autre que tu peux… Mettre en place pour les gens, pour sortir des schémas corporels où il y a des douleurs.

 
Catherine la Psy : Je trouve que la thérapie des schémas est très bien aussi, parce qu’on a des choses qu’on peut faire en faisant bouger les patients, et notamment on peut faire du travail de chaise, donc en Gestalt thérapie aussi, ils font des choses où ils peuvent bouger.


Clémentine Sarlat : C’est quoi déjà? Tu peux nous préciser pour les gens qui ne connaissent pas?


Catherine la Psy :  La Gestalt thérapie, je ne connais pas hyper bien, mais dans ce que je sais, puisqu’on leur a piqué le travail de chaise qui est en thérapie des schémas notamment, ils font beaucoup bouger les patients et ils interrogent aussi beaucoup le corps. Je pense que c’est quelque chose qui peut être aussi vraiment intéressant par rapport à ça.
Et je me souviens d’avoir fait des marathons thérapeutiques en tant que patiente, il y a quinze ans peut-être maintenant, et on faisait des exercices de Gestalt où tu vas taper avec un coussin dans un autre coussin pour décharger certaines choses, donc tu engages ton corps aussi par rapport à ça.
Donc je pense que la Gestalt c’est aussi intéressant.

En tout cas, en thérapie des schémas, en thérapie centrée sur les émotions, il y a des exercices de chaise qui viennent de la Gestalt où tu fais bouger ton patient, tu vas lui faire prendre différents rôles.

Donc c’est un peu émotionnel, puisque tu lui demandes de prendre différents rôles, soit des différentes parties de toi, soit des personnes avec qui il va avoir des problématiques relationnelles. Mais en fait, le fait de bouger, de se mettre debout, en fait, ça active des choses, alors parfois que tu ne travailles pas spécifiquement, mais qui finalement vont aider à détendre. Et le fait de se lever, se rasseoir, se lever, se rasseoir, ça crée aussi un mouvement corporel.
Et puis tu as Béatrice du cefti, Thérapie des schémas, elle a créé le protocole de l’arbre, où là tu fais les choses debout, donc c’est aussi hyper intéressant.


Et puis sinon, il y a la thérapie sensorimotrice, qui est vraiment une thérapie dans laquelle tu observes les mouvements du corps du patient et tu vas lui demander d’explorer ces sensations.
Donc, soit juste de les ressentir, soit de faire bouger le corps par rapport à ce qu’il est en train de faire, par exemple la main. Imaginez que tu as un patient qui est en train de faire ça quand il te parle. Tu vas lui demander peut-être d’accentuer le mouvement pour qu’il prenne vraiment conscience de ce qui est en train de se passer dans son corps à ce moment-là.


Clémentine Sarlat : Il est en train de pousser avec ses mains, parce que je dis que les gens écoutent le podcast, ils ne peuvent pas voir.


Catherine la Psy : Oui, c’est vrai. Il est en train de parler, par exemple, de chose soit traumatique, mais ça peut être une assiette, quelque chose où tu as été traumatisé par un truc, on t’a forcé à manger, quand tu étais enfant, à tous les repas, alors que toi, ça te donnait la nausée, par exemple.
Et au moment où ton patient, il en parle, il fait des mouvements en repoussant, comme s’il repoussait une assiette, par exemple.
Et toi, au lieu d’essayer de comprendre et de poser des questions sur le contenu et seulement les émotions, tu vas dire, OK, on voit ce mouvement, est-ce qu’on peut accentuer pour voir?

Et à force d’accentuer le mouvement, le patient en prend conscience. Et parfois, il se passe des choses. Et là, pour le coup, je ne te dirais pas comment ça marche scientifiquement. Je n’en sais rien.


Et pour l’instant, je n’ai pas trouvé. Je ne suis pas sûre qu’on va réussir à comprendre. Il faudrait faire ça dans des IRM. Enfin, je n’en sais rien. Peut-être un jour, on saura.
Mais à ce moment-là, en faisant ces mouvements et en prenant conscience, il y a des souvenirs qui viennent, des émotions qui viennent, des liens qui se font. Où à une patiente qui, pendant qu’elle parlait, par exemple, tapait du pied. Elle était debout dans le protocole de l’arbre, elle tape du pied. Et donc, au lieu de continuer à ce qu’elle m’explique, ce qu’elle disait, j’ai juste demandé d’accentuer ce tapotement de pied pendant une trentaine de secondes, c’est pas forcément longtemps, mais en fait c’est longtemps quand tu le fais juste ça.
Et je dis, est-ce que c’est quelque chose que vous avez déjà fait à certains?
Est-ce que ça vous rappelle des moments où vous auriez fait ça dans votre vie?

Et là, ça nous a ouvert univers, un truc…

Donc je trouve que ça permet, notamment quand t’es bloqué parfois dans certaines situations, d’utiliser les mouvements du corps, ça amène des déblocages.

Et tu peux les utiliser pour les ressources. C’est pour ça que je disais tout à l’heure, en thérapie, si tu as un patient qui a une problématique de limite, tu peux demander de pousser sur un mur, par exemple, et de faire le tour de la pièce en touchant le mur, et de sentir en même temps. Parce qu’il ne faut pas juste le faire, il faut aussi demander à la personne de sentir ce que ça fait dans le corps.


Et puis au début, les gens, surtout quand tu n’as pas trop l’habitude de faire ça, tes patients n’ont pas l’habitude de ça, ils vont dire « oui, non, ça ne fait rien ».
Mais au bout d’un moment, il se passe un truc.

Clémentine Sarlat : La reconnexion au corps.

Catherine la Psy : C’est pour ça que la connexion entre les sensations corporelles et des éléments cérébraux, qu’ils soient émotionnels ou de l’ordre de la pensée, ils existent.

On ne comprend pas tout exactement pourquoi, mais là, en tout cas, je suis très branchée. La thérapie sensorielle motrice, ça m’intéresse beaucoup parce que justement, je trouve que ça vient combler par rapport aux approches que je pratiquais, qui sont notamment l’EMDR et la théorie de la dissociation structurelle et la thérapie des schémas.
Ce sont mes trois approches principales.


Et là, je suis en train de me dire, il y a quelques moments quand même, même si avec toutes ces trois approches, j’avais beaucoup de choses que je pouvais traiter. Il y a quand même des petits moments où je trouvais que je ne sais pas, il me manquait quelque chose avec certains patients. Et là, justement, d’être vraiment focalisé sur des mouvements corporels. Et je peux te dire, là où ça change tout, c’est que parfois, on a l’idée que le psy, on est là, on analyse les choses, mais avec des trucs corporels.
Mais moi, des fois, je ne comprends pas. Je demande à la personne d’accentuer, de sentir, etc.
Mais le lien, il se fait à l’intérieur du patient.
Moi, je ne comprends pas exactement ce qui se passe, mais ça se débloque.
C’est super.


Clémentine Sarlat : Ça me fait penser, ça m’est déjà arrivé en thérapie, de ressentir des choses très physiques et une douleur très précise au même endroit quand je parlais de quelque chose. Et je disais à ma psy, parce ce que moi, j’ai toujours besoin de comprendre. Et elle me dit, « bon Clémentine, il y a des fois, on ne peut pas comprendre et ce n’est pas grave ». Parce qu’elle me dit, « oui, des fois, le corps parle et on n’a pas encore tout à fait compris le lien et peut-être que vous le ferez plus tard. Et ce n’est pas grave, on peut ne pas comprendre ».


Catherine la Psy : C’est ça, on peut ne pas comprendre et guérir quand même.


Clémentine Sarlat : Exactement.


Catherine la Psy : Parce que c’est vrai que nous, en plus, dans nos formations en psy, on a encore quand même cette culture… Alors, de moins en psychotrauma, parce que justement, on dit qu’on fait confiance au cerveau du patient.

Et pour nous, quand on dit cerveau, ça implique le corps, puisque les sensations corporelles sont en partie traitées, même si maintenant on se dit qu’il y a peut-être des choses au niveau intestinal, mais les informations sensorielles sont traitées dans le cerveau.

Du coup, nous, quand on dit qu’on fait confiance au cerveau du patient, c’est pour dire qu’on fait confiance au patient tout court, à son corps, à son cerveau.
Et en fait, ça se débloque, même si on ne comprend pas toujours. Ça peut être frustrant, comme tu l’as dit. Mais si ça guérit, moi j’ai envie de dire bah écoute…


Clémentine Sarlat : J’ai une dernière question par rapport à tout ça. Pourquoi est-ce que ça sert absolument à rien de dire à quelqu’un qui ressent des douleurs ou qui a du mal avec un événement ou quelque chose, « oublie, ça va, tu iras mieux avec le temps fera son affaire, ça ira » ?


Catherine la Psy : À cause du processus attentionnel, qui est que si ton cerveau perçoit quelque chose comme un danger, il va orienter son attention dessus.
C’est normal, c’est l’évolution qui fait que c’est pour survivre. C’est-à-dire qu’il vaut mieux que si tu vois un lion approcher, c’est mieux si tu restes focus dessus et que tu ne regardes pas la fleur qui est en train de pousser à côté de toi pour s’émerveiller du moment présent.
Donc, quand ton cerveau déclenche son système de danger, c’est-à-dire que tu as une émotion particulière, ça va créer un focus particulier sur ça.
Si ton système se déclenche à cause d’une sensation corporelle, il va être obnubilé par ça. Pour que ça puisse se défaire, il va falloir que tu défasses le lien entre…


Imagine que tu as fait des examens médicaux, on t’a dit que c’était pas vital en tout cas, et que pour l’instant malheureusement on ne pouvait pas faire plus. Pour pouvoir gérer la sensation, il va falloir que tu défasses le lien entre sensation corporelle, qu’elle soit douloureuse ou non d’ailleurs, et danger. Parce que sinon, tant que c’est interprété comme un danger, ton système attentionnel est à fond dessus.
Et c’est aussi pour ça que les gens vont faire plein d’examens, parce qu’ils continuent de voir ça comme un danger.


Et le jour où ils commencent à dire « bon ok, je sais pas d’où ça vient, je peux supporter l’impuissance que ça me génère, parce que ça c’est quasiment le plus dur, et du coup je vais essayer de d’utiliser des techniques qui font que mon système attentionnel n’est pas que tourné vers ça, alors il y a des choses qui peuvent se passer.
Mais si tu dis à quelqu’un, on ne sait pas si c’est un danger, mais arrêtez d’y penser.
Bien sûr, bien sûr. Non, ce n’est pas possible.
Parfois, ça arrive que le temps diminue les choses, mais pourquoi? Parce que ce qu’on a fait de ce temps a dirigé notre attention vers autre chose.


Donc si au bout d’un moment, quand tu vois ton chat, tu as bien interprété que ce n’était pas un lion, il n’y a pas de souci, tu peux regarder ton chat et tu ne vas pas te focaliser dessus. Ton système attentionnel va pouvoir aller ailleurs après. Mais si, bon le lion aujourd’hui, surtout en Occident, ça va être un peu plus compliqué. Je reprends mon chien. Si à chaque fois que tu vois un chien, tu n’as pas réussi à défaire que ce n’est pas tous les chiens qui te mordent et la plupart des chiens ne te mordent pas. C’était là, il se passait ça, mais la plupart, ils sont gentils, ils sont éduqués, etc. Du coup, tu n’auras pas de problème avec les chiens.


Mais tant que tu n’auras pas défait ce lien avec un chien égal à un danger, dès que tu vois un chien… Et d’ailleurs, tu verras plus les chiens que les autres. Des fois, tu diras, il y a un chien là, il y a un chien là. Les autres, ils se baladaient avec toi et ils ne l’ont même pas vu.
Parce que ton système d’attention, il est hyper focus.
Le temps peut diminuer les choses, mais tout dépend de ce temps. Et si en fait, tu ne défais pas le lien, le temps ne va rien faire du tout.


Clémentine Sarlat : Donc, nz jamais à dire à quelqu’un, « oublie, c’est bon, ça va, c’est rien ».

S’il le ressent, c’est qu’il est légitime pour le ressentir, qu’il a quelque chose et que ça vaut le coup d’aller creuser, ça vaut le coup de l’écouter, ça vaut le coup d’avoir de l’empathie, de la bienveillance.
Et d’essayer de comprendre, peu importe si ça se traduit par le corps ou le psyché.

C’est valable en fait, c’est ça aussi de dire aux gens ce qu’ils ressentent est valable et que comme tu dis pour l’instant peut-être qu’on n’a pas d’explication scientifique mais il n’y a que l’avenir qui nous le dira et c’est pas pour cette raison qu’on ne peut pas en prendre soin et le traiter et s’y intéresser.


Catherine la Psy : Le terme que tu as utilisé est hyper important, c’est « légitimité ». Du moment où tu as un truc qui est là, tu es légitime à dire qu’il est là. Et ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas… Je ne connais pas le système médical, mais je vais parler pour ma paroisse. Nous, en psy, on a longtemps voulu analyser les choses, etc. Et je trouve que pour ça, le psychotrauma qui est en train de se développer hyper important, oui, c’est intéressant et ça peut être bien de comprendre.
Des fois, on ne comprend pas, et ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas que ce n’est pas légitime.

C’est-à-dire que le patient, c’est lui l’expert de sa vie ou elle l’expert de sa vie.

Ce n’est pas nous. Nous, on a des connaissances techniques, mais si la personne te dit qu’elle a mal.


Et si tu ne comprends pas pourquoi, ce n’est pas grave. C’est à nous de trouver comment on peut l’aider à vivre mieux avec ça, même quand on ne comprend pas. Et franchement, dans toutes les approches de thérapie, on a des outils qu’on peut utiliser sans qu’on comprenne. On teste, on voit ce qui marche.
Et moi, clairement, je le dis, il y a des gens avec qui je ne comprends pas ce qui se passe. Et pourtant, ça avance.

Donc, la légitimité, on est légitime du simple fait qu’une émotion, une pensée, elle et c’est affreux de nous entendre dire qu’on ne le serait pas, parce que ça voudrait dire quelqu’un d’autre sait mieux que toi ce qui se passe à l’intérieur de toi. En tout cas, moi, ça ne me parait pas juste de dire ça.


Clémentine Sarlat : Je suis bien d’accord.
Merci beaucoup, Catherine, d’avoir pris le temps de nous expliquer tout ce qui est lié à ça.
Ça se trouve, on refera un épisode dans cinq ans et on aura découvert plein de choses sur cette discipline.


Catherine la Psy : J’espère, parce qu’il y a beaucoup de patients qui sont concernés.


Clémentine Sarlat : Exactement. Les douleurs chroniques, le stress chronique, ça fait malheureusement partie de notre société, de notre même de notre culture quasiment. C’est comme si on avait décidé que c’était normal de ressentir tout ça.

Et non, en fait, ça l’est pas. Donc le corps, en tout cas, n’est pas câblé pour ça, n’aime pas ça.
Donc soyez légitime dans ce que vous ressentez. Et heureusement, il y a plein de gens bienveillants comme Catherine, que ce toit les psys ou le monde médical, qui vous écouteront et vous orienteront de la meilleure des façons.
Merci beaucoup.


Catherine la Psy : Merci beaucoup Clémentine pour ton intérêt aussi pour ces sujets, parce que ça permet de les diffuser aussi.


Clémentine Sarlat : Avec grand plaisir.

Vos favoris
Vos favoris

Top 4 des favoris

Vos mots d’amour

la communauté

patreon

Vous adorez le Podcast et vous avez envie de participer à sa croissance, rejoignez la communauté de La Matrescence sur Patreon.

rejoindre

Retrouver le podcast

la matrescence

Inscrivez vous & recevez les nouveaux épisodes, conseils et astuces inédites chaque vendredi.

Newsletter

Merci !