Vous connaissez ce moment gênant où notre enfant vient nous voir en nous demandant “maman, papa, comment on fait les bébés?”
Beaucoup de parents redoutent cet instant où il va falloir sortir des explications qui leur paraissent soit trop intimes, soit trop risquées.
Cette question est peut-être la première d’une longue série entre l’enfance et l’adolescence qui nous met dans un malaise parfois assez profond.
Si vous êtes dans ce cas là alors pas de panique, Charline Vermont, alias orgasme et moi sur les réseaux sociaux est là pour vous aiguiller face à toutes les questions que peuvent avoir vos enfants.
Dans cet épisode hyper riche et pratique, vous ressortirez équipé pour affronter les conversations les plus intimes au plus pragmatiques.
Charline est passionnante, à travers son best seller Corps, amours, sexualité, les 120 questions que vont vous poser vos enfants, elle vous permet de créer une connexion profonde avec vos enfants et vos adolescents.
Vous êtes prê•tes ? Allez c’est parti.
Je vous souhaite une très bonne écoute
LES LIENS UTILES :
Corps, amour, sexualité : Les 120 questions que vos enfants vont vous poser, Sophie Nanteuil, Charline Vermont
Corps, amour, sexualité : Le cahier d’activités (+ 150 quiz, tests & jeux) Charline Vermont
Corps, amour, sexualité : Y’a pas d’âge pour se poser des questions ! L’éducation à la sexualité enfin à la portée de tout le monde ! Charline Vermont
🗣️ Au programme :
📚 Introduction à l’éducation sexuelle positive (00:00 – 09:54)
🌱 Fondements de l’éducation positive à la sexualité (09:54 – 19:59)
👐 Consentement et respect du corps (19:59 – 30:27)
👪 Expériences personnelles et transmission (30:28 – 41:23)
🛡️ Protéger les enfants grâce à l’éducation (41:23 – 51:26)
🧠 Questions spécifiques et approches concrètes (51:26 – 01:02:21)
🌈 Enjeux d’intimité et transmission familiale (01:02:21 – 01:12:50)
💕 Empathie et compréhension mutuelle (01:12:50 – 01:17:01)
TRANSCRIPTION DE L’ÉPISODE
Clémentine
Salut Charline !
Charline
hello Clémentine.
Clémentine
Merci d’avoir fait le déplacement jusqu’au nord de Paris.
Charline
Pas de soucis.
Clémentine
Petit périple pour venir de chez toi, merci beaucoup. J’avais envie vraiment de te recevoir parce que c’est un sujet que j’aborde pas du tout. C’est comment on explique aux parents, comment on parle d’éducation sexuelle à nos enfants. Et tu as écrit un livre qui est incroyable, que j’ai lu avec ma fille qui a quasiment 8 ans et qui est tellement bien fait. Donc je te dis juste merci d’avoir écrit un ouvrage comme ça.
Charline
Merci à toutes les personnes qui se saisissent du sujet. C’est pas simple, on est d’accord.
Clémentine
Non.
Charline
Je pense que parmi les gens qui vont nous écouter ce soir, aujourd’hui, tout le monde va se dire, mais oh là là, il va falloir s’y coller vraiment. Ça reste une vraie patate chaude.
Clémentine
D’ailleurs, c’est très drôle dans le livre parce qu’à chaque chapitre, tu dis, je sais, les parents, restez avec moi, ne partez pas, on aborde des sujets de plus en plus intimes.
Charline
En fait, il faut rassurer tout le monde. Je pense que les parents… Au début, je fais beaucoup de montagne et j’avais utilisé la métaphore de la cordée. Et voilà, au début, vraiment, je leur disais, ne vous inquiétez pas, je vais vous assurer tout du long. Je vous tiens, ne vous inquiétez pas, je ne vous lâche pas parce que je pense que les parents sont vraiment les premières personnes accompagnées sur ce sujet. Et c’est aussi en accompagnant les parents, les adultes, parce que ce livre est également utilisé par les profs, par les pros de santé, les éduques, les animes, bref toutes les personnes qui gravitent finalement autour des enfants, et derrière pour pouvoir accompagner vraiment pleinement les enfants. Donc effectivement il y a plusieurs cercles à accompagner.
Clémentine
C’est clair. Mais déjà moi j’ai une question, c’est comment tu as commencé à t’intéresser à la sexualité, que ce soit adulte ou enfant ?
Charline
Depuis toujours. J’ai des parents médecins d’abord. Je pense que ça aide. Et une maman qui est gynécologue obstétricienne et qui était une grande, enfin, vraie éducatrice, une vraie femme passionnée par la santé des femmes et qui nous a beaucoup transmis. On est quatre enfants. Et elle nous a énormément transmis son métier passion. Donc on entendait beaucoup parler de ce qui se passait. Ça débordait sans doute du cadre du cabinet. Il y avait mon papa, mon beau-papa, qui était en voyage beaucoup, donc elle n’avait pas beaucoup de personnes à qui en parler. Et on a été, nous, les interlocuteurs et interlocutrices très jeunes, des échos du cabinet. Alors évidemment, elle respectait, je pense, ce qu’on pouvait entendre en fonction de notre âge. Mais c’est vrai, ça a ancré quelque chose. Et puis ensuite, à la maison, on avait beaucoup de livres de médecine.
Moi, j’ai très, très, très jeune plongé là-dedans parce que ça me passionnait. Et puis, après, il y a des choses plus personnelles. Moi, je suis partie vivre à San Francisco à 21 ans, où j’ai fait mon coming out, où j’ai commencé à m’investir dans des assos queer. Et à l’époque, et je pense que c’est important de le souligner, l’éducation sexuelle, elle était quasiment faite uniquement par des assos. On avait en France le planning familial, on avait ACT-UP, AIDES, etc. Enfin, tous les assos qui s’emparaient du sujet du VIH et des autres IST au moment où on était en pleine pandémie.
Et en France, réellement, entre la naissance du planning familial et là, aujourd’hui, 2025, où on va avoir un programme qui va être un peu pris en charge par des professeurs, etc., on a quand même un historique où pendant près de 60 ans, cette éducation à la sexualité, elle était vraiment gérée par le monde associatif essentiellement. Et du coup, c’est vrai qu’en m’engageant très jeune dans ces assos-là, donc ça va faire 20 ans en réalité que je suis engagée dans cette éducation à la sexualité, c’est juste que ce n’était pas un vrai métier, c’était un hobby, un engagement associatif ou personnel, et il m’a fallu beaucoup de courage, je pense, pour un moment me dire, en vrai c’est un tellement gros sujet qu’il faut qu’on y consacre un peu plus que juste quelques stands sur des festivals.
J’ai créé ce compte et puis j’ai commencé à me former. Aujourd’hui je suis professeur à la Sorbonne, donc c’est moi qui forme les personnes qui interviennent, etc. Et les pros de santé. Mais c’est vrai qu’on est en train de vivre un tournant majeur, un tournant qui tourne autour du fait que les droits sexuels sont des droits humains. Je pense que c’est important de le rappeler. Qu’il y a beaucoup de personnes, en l’absence d’éducation, il y a beaucoup de violence. Et aujourd’hui, il faut protéger les femmes, il faut protéger les enfants. Et même si mon comte, il s’occupe vraiment beaucoup d’adultes, le premier livre qui est sorti, ça, ça a surpris les gens. Pourquoi les enfants ? Parce que c’est les personnes les plus fragiles. En fait, c’est les personnes les plus exposées.
Il faut commencer par protéger les personnes qui sont le plus à protéger, c’est les enfants. Voilà.
Clémentine
Comment est-ce que tu décrirais du coup l’éducation positive à la sexualité ?
Charline
Alors, c’est vrai que les gens disent c’est quoi positif ? En fait, d’abord, je pense qu’il y a quand même une continuité avec l’éducation positive au sens large. Pendant très longtemps, on considérait que c’était normal d’éduquer les enfants dans la terreur et l’effroi, peur des coups, peur des brimades, des engueulades, des punitions, des sanctions. Et tout d’un coup, il y a quand même une prise de conscience, moi j’ai envie de croire qui est majeure, de… En fait, il y a une autre manière de faire. On peut accompagner son enfant, vraiment en le rassurant, en le valorisant, en le validant, en lui faisant comprendre, en faisant des alliances éducatives, pédagogiques, etc. C’est pareil finalement pour la sexualité. Pendant très longtemps, la sexualité était perçue à travers un prisme de tabou et de honte.
D’ailleurs, je pense que beaucoup de personnes qui nous écoutent, si je leur demande est-ce que vos parents vous en ont parlé, vont dire non, on ne parlait pas de ce sujet à la maison. Dans les familles, on se transmet de génération en génération des histoires familiales, des recettes, des meubles, des bijoux de famille. Et en réalité, il y a un sujet sur lequel il y a une impasse, vraiment de génération en génération, un sujet qu’on n’aborde pas, c’est tout ce qui a trait à l’intimité. Alors, il y a des personnes qui viennent me dire, ben si on le fait pas, c’est peut-être qu’il y a une raison. Alors, votre raisonnement ne tient pas la route deux secondes.
C’est comme si vous me disiez, ben oui, on frappait les enfants de génération en génération, on a toujours fait ça, et si on le faisait, il y avait bien une raison. Non, c’est pas parce qu’on a toujours fait quelque chose, que c’est bien, en réalité. Il y a une autre manière de faire, et en réalité, ce qu’on sait aujourd’hui, les chiffres, je pense que tout le monde les connaît, on a un enfant sur dix qui est victime de violences intrafamiliales, on a 57% des personnes qui sont victimes de violences sexuelles en France qui sont mineures. La réalité, c’est que ne pas parler d’un sujet, l’obscurantisme, l’ignorance, ça favorise les violences, ça favorise le silence, le tabou, la honte. Donc en réalité, ce n’est pas parce qu’on met les miettes et la poussière sous le tapis qu’il n’y a plus de poussière.
On ne peut plus continuer comme ça. Donc soulerons le tapis, regardons ce qui est en dessous. Et comment on fait pour protéger les enfants, comment on fait pour faire grandir des enfants dans un monde où la sexualité fait partie de l’expérience humaine, fait partie en fait de ce qui nous permet de nous connecter à soi, aux autres, ça fait vraiment partie de la vie, on le reconnecte à nos sensations, on le reconnecte aux émotions, on le reconnecte au vécu. Tout en ordonnant ce qui est possible de faire à tel âge ou pas, en adaptant le discours à la maturité psycho-émotionnelle des enfants. Aussi rassurée tout le monde, on ne parle pas de sexe aux enfants en dessous de 15 ans. On attend la majorité sexuelle pour aborder la question du sexe à proprement parler. On parle d’éducation à la vie affective avant.
Clémentine
Alors si vous êtes sur YouTube et que vous regardez, je vous montre le livre qui est destiné aux enfants, il s’appelle « Corps, amour et sexualité », les 120 questions. D’ailleurs tu as augmenté sur la deuxième édition. Tu as mis plus de questions. Il y a tellement de questions que vos enfants vont vous poser, donc de toute façon vous n’allez pas y couper, donc c’est pour ça qu’il faut pouvoir savoir y répondre.
Charline
Oui, c’est ce qui est hyper intéressant, c’est que moi, quand j’ai commencé à avoir l’idée de ce livre, je suis allée à la rencontre de ma communauté et notamment des parents. Je leur ai dit quelles sont les questions que vos enfants vous posent. Et donc j’ai récolté de l’ordre de 1000 questions, 1000 stickers réponses. Et ensuite, il y a eu énormément de personnes qui ne sont pas parentes de ma communauté qui ont dit en fait, nous, on avait plein de questions. On n’est pas parent, mais nous, on se souvient qu’on avait plein de questions qu’on n’osait pas poser. Et je leurs ai dit ok, j’ai vu ça, donc j’ai dit ok, je vais vous créer. Quelles sont les questions que vous n’osiez pas poser ? Petit, vous en tant qu’enfant. Et là, j’ai reçu 4000 stickers réponses.
Et d’ailleurs, ce livre a failli s’appeler les 100 ou 120 questions que vos enfants n’osent pas vous poser. Je me suis dit en vrai, c’est fini. Ça, c’était avant. Maintenant, on arrête la honte et le tabou. Et aujourd’hui, les enfants vont pouvoir poser. On va pouvoir créer un espace safe. Où les enfants se sentent suffisamment en confiance pour pouvoir exprimer leurs interrogations, etc. Parce que de toute manière, s’il n’y a pas cet espace pour pouvoir poser les questions, qu’est-ce qu’ils font aujourd’hui les enfants quand ils ont des questions ?
Clémentine
Ils vont sur.
Charline
Et bien ils vont sur internet. Exactement.
Clémentine
Ou ils posent des questions à d’autres enfants.
Charline
Oui ils posent des questions à d’autres, etc. Aujourd’hui, il y a aussi une forme d’urgence. C’est-à-dire les réseaux, internet, les téléphones portables, au minima, collèges, mais même parfois avant. En réalité ça nous oblige, ça nous oblige nous parents à arrêter de faire les autruches. Et donc c’est un peu ce que j’écris dans la boîte à outils, c’est-à-dire vos enfants ont des questions et elles méritent une réponse. Je crois que c’est vraiment la base de la base, c’est que si vous considérez que c’est pas à vous de répondre. C’est un vrai sujet de considération pour l’enfant qui est là avec ses peurs, ses angoisses, etc. Et voilà, peut-être qu’on reviendra plus tard sur la boîte à outils, mais la première chose, vraiment, accueillez les questions de vos enfants. Vraiment, rassurez-les en disant, c’est super, c’est une super bonne question !
Merci de me l’avoir posée, t’as trop raison, et tout. Que l’enfant se dise, mais en fait j’ai le droit de poser des questions. C’est pas interdit, c’est pas honteux. Et puis quelque part, ils disent, ok, donc C’est ça, l’adulte, c’est sa maman que je peux poser les questions, elle est ok quand je pose la question. Donc tout d’un coup c’est bête mais on crée un canal, ce canal. Moi je dis, outre le fait que déjà vous allez avoir des discussions passionnantes avec vos enfants, vous n’avez même pas idée, Ce canal, il est essentiel parce que personnellement, et pour beaucoup de personnes qui ont lu le livre, ça fait entrer aussi la relation parent-enfant ailleurs. On va pouvoir aborder des sujets…
Hyper important pour les enfants, que vous allez aborder sans doute pour la première fois, vous allez découvrir des choses incroyables sur vos enfants, également découvrir leur esprit critique, leurs observations, leurs perceptions du monde. Moi je leur dis la première chose que vous faites quand un enfant vous pose une question, vous lui retournez la question. Mais vas-y, je te laisse faire, je vais te laisser défiler ta question.
Clémentine
Non, c’est qu’en fait, parfois les parents, comme tu l’expliques très bien, ils ne savent pas par où commencer quand un enfant vient leur poser une question qui les met mal à l’aise. Et donc toi, tu donnes une super astuce et un super outil. C’est la première chose, comme tu l’as dit, de les valoriser dans le fait qu’ils ont osé poser cette question.
Charline
Et leur dire bravo, c’est super, tu as trop bien fait.
Clémentine
Et tu donnes aussi une autre astuce, donc tu vas pouvoir nous parler, qui est de leur retourner la question.
Charline
Oui, retournez la question, parce qu’en fait les enfants ont des représentations. Ils grandissent dans un monde où il y a beaucoup d’images, il y a des conversations avec les potes, ils sont tombés sur du contenu, vous ne savez pas, et en réalité c’est hyper intéressant derrière une question. Il y a souvent la question, puis en réalité il y a parfois l’interrogation ouverte et cachée, et vous allez tout d’un coup découvrir la représentation que vos enfants ont de l’amour, de comment on fait les bébés, ça veut dire quoi intime, etc. En fait, toutes ces représentations, elles changent avec les âges, et aussi en fonction de ce que l’enfant vous dit, vous allez comprendre que son niveau de maturité sur le sujet. C’est-à-dire, il y a des fois où c’est d’une mignonnitude absolue et on se dit ok, là on a besoin de ne pas aller trop en profondeur, on va rester sur quelque chose de très très mignon, presque naïf, parce que c’est un peu le degré de maturité ou d’éveil que mon enfant a sur le sujet. Des fois, vous allez entendre vos enfants, limite, vous faire une diserte, dire « Mais d’où , ils connaissent ça ! » etc. Et t’es là « Ok, donc là, toi, t’as vraiment une grosse curiosité sur le sujet, t’es déjà allé chercher. Donc, moi, pour répondre, il va falloir que je muscle un peu la réponse, que j’ai un peu de matière ».
C’est aussi pour ça que ce livre est là, avec plein d’illustrations pour que vous puissiez vous appuyer dessus, et éventuellement même rajouter des informations si vous trouvez que c’est pas assez complet, mais je crois que ça l’est déjà quand même. L’idée, c’est de jauger du niveau de maturité, de curiosité de l’enfant, et aussi de vous rendre compte qu’il y a des représentations erronées. Et ça, c’est hyper intéressant. Moi, la première fois, effectivement, que mon enfant… Pendant le confinement, j’ai expliqué ce que je faisais à mes enfants, et j’ai expliqué l’éducation sexuelle. Et mon enfant a dit, sexuelle, mais c’est comme sexe. Maman, ça veut dire quoi, sexe ? Je suis là, ok, c’est parti !
C’est le saut dans le grand bain direct et j’étais là oh là là alors on y va et toi tu penses que ça veut dire quoi sexe ? Le sexe c’est burk, c’est bien, c’est clair et c’est hyper intéressant le stigma de honte. Déjà, chez les petits. Vous allez poser la question, vous allez voir il y a beaucoup d’enfants pour qui c’est déjà burk, c’est intéressant de voir à quel point c’est sale. Et donc on a commencé à en parler, je dis bah le sexe, d’abord c’est une partie du corps humain. Donc on est repartis là-dessus, j’ai encore les bouquins de médecine de ma mère, donc c’est très drôle. Donc je leur explique, voilà c’est ça, un sexe à la base c’est ça. Donc c’est ce qu’on a entre les jambes, etc.
Et voilà, on y allait, et en fait, dès que j’ai ouvert le sujet, Boîte de Pandore. D’un coup, c’est « mais c’est marrant, pourquoi il est comme ça ? » Ça c’est un adulte. Alors… Donc en réalité, ça grandit comme toutes les parties du corps humain, etc. Et puis c’était passionnant, on a pu aborder le sujet de puberté, c’était avec mon dernier enfant, les autres enfants sont arrivés, on posait d’autres questions, moi j’ai trois enfants, et tout d’un coup, je me suis retrouvée au milieu d’une mêlée de questions, de bouquins, et je me suis dit c’est trop bien, en fait on a passé un moment exceptionnel et comment je fais pour recréer ça avec un support adapté ? Donc je suis partie moi à la recherche d’un support, je ne l’ai pas trouvé.
Il y avait des livres de parenting qui s’adressent aux parents, il y avait un vieux livre de celui de notre génération, du zizy sexuel, qui est plutôt un livre qu’on donne à l’enfant en disant « vas-y, démerde-toi ». Et ce n’était pas du tout ce que j’avais envie. Moi, j’avais envie d’ouvrir le livre avec mes enfants et qu’il y ait une vraie transmission générationnelle, qu’il y ait un espace transgénérationnel où toutes les questions sont ok, sont accueillies, sont à bout. Et évidemment, les enfants peuvent s’emparer du livre. Et partir avec lire dans leur chambre parce que le livre est 100% safe. On l’a écrit avec une équipe de professionnels de santé, de pédopsychiatres, de psychologues, de médecins batiste Beaulieu, etc. On a vraiment musclé pour que vraiment le livre soit safe.
Mais c’est vrai que c’était le livre qui n’existait pas, que je voulais avoir. On l’a créé.
Clémentine
Ce qui est génial dans ton livre, c’est que tu as mis des petits codes couleurs pour que ce soit adapté à l’âge des enfants, pour que vous n’ayez pas peur d’aborder un thème qui ne serait pas adapté à leur maturité à eux, et que eux-mêmes, les enfants, aient conscience qu’il y a des sujets que ce n’est pas encore pour eux et que d’autres sont tout à fait OK d’explorer.
Charline
Il y a du 5-8, du 7-10 et du 10 et plus. Effectivement, on s’adapte à la maturité psycho-émotionnelle des enfants, donc voilà, les pédopsychiatres, psychologues qui nous ont accompagnés ont vraiment fait un travail de nous aider vraiment à segmenter ça, sachant que, je rappelle que les enfants sont tous uniques, donc il y en a qui sont très peu curieux sur le sujet, ou très peu éveillés, n’ont pas trop envie d’en entendre parler, et puis tout d’un coup il va y avoir un moment bascule, parfois, donc il y en a qui m’écrivent en disant « bah tu sais j’ai acheté le livre quand il est paru » et en fait mon enfant ne voulait pas m’entendre parler et puis là en rangeant sa chambre je suis tombée dessus et en fait il était mais alors avec des post-it quasiment toutes les pages et inversement il y a des enfants qui sont assez jeunes et vont avoir envie tout de suite de poser des questions extrêmement éveillées.
Et là, les parents sont en panique en disant, Charline je ne sais pas quoi faire, mon enfant veut lire les pages, voilà, elle a 8 ans, 9 ans, mais veut lire les pages 10 et plus, ce à quoi je dis en réalité le livre est 100% Safe. Donc si vous le voyez disparaître, parce que les parents en fait s’inquiétaient, en disant, bah ouais c’est ça, le livre a disparu, je suis sûre qu’il est dans sa chambre, voilà, sous son oreiller, je suis sûre et tout.
Et en réalité, j’apaise les parents, le livre est safe, c’est-à-dire même si l’enfant s’aventure par hasard dans les parties, voilà, parce qu’il y a une vraie curiosité, maturité sur le sujet, bah voilà, de même qu’on a des filles qui sont réglées à 9 ans, tu vois, en réalité, bah ouais, c’est, je veux dire, il faut accepter le fait que les enfants sont uniques, et certains vont avoir une puberté plus précoce et également être sans doute aussi plus curieux de certaines choses avant. Et c’est OK, tout va bien.
Clémentine
Pourquoi est-ce qu’en tant que parent, on est autant gêné de parler de ce sujet avec eux ?
Charline
La réponse est violente, j’ai le droit de la faire ? Alors, on va reprendre du coup des sources. 70% de la charge parentale est assurée par les femmes en France. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’INED, l’Institut National d’Études Démographiques. Et à minima, on va parler du Haut conseil et l’égalité, 37% des françaises ont vécu des actes de violences sexuelles. Et comme toutes les assos qui travaillent sur le sujet, et moi je le vois sur à peu près toutes mes interventions, que ce soit auprès de pros de santé ou pas, on estime qu’une femme sur deux qui est victime n’en a pas conscience. D’ailleurs, quand je fais des interventions, je fais des sondages en temps réel. Et donc, au début des interventions, je demande qui a été victime, effectivement, d’actes intimes ou sexuels non consentis.
Et puis ensuite, on va parler de consentement et de VSS pendant toute une session. Et à la fin, je refais un sondage. Et généralement, on passe du simple au double. Donc moi, le chiffre de 37 %, du coup, je vais quand même le projeté, on va dire 75% du coup. Donc c’est intéressant de se dire que les mères, qui s’occupent quand même encore majoritairement des enfants et notamment de ces sujets-là, elles sont à 75% elles-mêmes victimes de violences sexuelles au cours de leur vie. Ce qui veut dire pour beaucoup un terrain sinistré, avec des traumas parfois encore très vivaces. Extrêmement difficile. Enfin, c’est monumental, c’est monstrueux de demander à quelqu’un de transmettre de manière hyper… Allez, lui dit quoi et c’est OK. Un sujet sur lequel on a été soi-même traumatisés.
Et donc, moi, je voulais dire à toutes ces personnes et notamment ces femmes qui nous écoutent, « écoutez-vous, prenez le temps. Prenez le temps également de vous approprier ce livre ». Il y en a qui me disent que ça a soigné un peu, ça a réparé un peu leur enfant intérieur. Certains qui ont été victimes de violence également, d’inceste. Quand on est soi-même victime d’inceste, parler de ce sujet à son enfant, c’est hautement compliqué, délicat. Vraiment, j’ai envie de dire à toutes ces femmes, vous êtes des héroïnes, vous êtes des survivantes, vous avez le droit de trouver ça très difficile, ça l’est. Écoutez-vous, appropriez-vous, et quand vous êtes prêtes, avancez.
Clémentine
C’est vrai qu’on parle de la maturité de l’enfant sans prendre en compte que ça vient réveiller des traumas, des blessures parfois qu’on n’a même pas encore identifiées et qui vont se manifester à la lecture du consentement, du respect.
Charline
D’ailleurs c’est la réaction des parents qui m’a mis complètement vraiment donner envie d’écrire le livre pour les parents. Je me suis dit, j’ai tellement de parents qui m’ont écrit en disant que ça avait résonné en eux. J’étais en mode, c’était sans aide pour les enfants ! Mais ok, en vrai j’entends évidemment que ça résonne chez beaucoup, du coup je vais vous créer votre livre pour vous les parents, les adultes, mais c’est vrai que ce livre déjà en fait il entre en résonance.
Clémentine
J’imagine que c’est aussi pour ça qu’un des premiers thèmes abordés, c’est le consentement.
Charline
Oui.
Clémentine
Parce que c’est la base.
Charline
C’est la base et ça a l’air évident. Enfin, il y a des journalistes parfois qui m’appellent en me disant bon alors madame Vermont, aujourd’hui le consentement, c’est bon, on entend parler depuis 2017, tout le monde a compris. Alors, venez avec moi en intervention, en classe en fait, vous allez voir par vos propres yeux en fait à quel point on est très très très loin du compte. Non, le consentement, les gens, peut-être effectivement dans une petite bulle parisienne de journalistes, mais sortez du troisième arrondissement s’il vous plaît. Venez dans les banlieues avec moi, venez dans les petites villes de province avec moi. Et vous allez voir, il y a une France à plusieurs vitesses.
Il y a une France dont les parents sont à fond sur les réseaux sociaux, s’abonnent à tous ces podcasts qui aident à déconstruire, à ouvrir le regard, à se remettre en question, qui invitent les hommes à prendre conscience de leurs privilèges, des mécanismes de domination, du patriarcat. Et à côté de ça, il y a des gens pour qui c’est un métaverse. Et là, quand on arrive en classe, dans des situations, moi j’ai des situations de viol conjugal au lycée à gérer. Je suis intervenue dans des classes où il y avait des sujets de violence conjugale au lycée en première. Et c’est vrai que quand on leur parle de consentement, on sent qu’il y a Il y a tout le travail à faire. Rien n’a été fait avant. Donc il n’y a rien d’évident là-dedans.
Clémentine
Il faut regarder le procès de Gisèle Pellicot et on peut comprendre que la notion de consentement elle est quand même particulièrement ignorée par la loi.
Charline
Par ceux que ça arrange. Mais pas que ça. Par exemple, un exemple simple, y compris pour des gens qui ne pensent pas à mal. C’est ça qui est intéressant, c’est que le consentement Les gens ont une vision d’abord du consentement comme uniquement relevant de la sphère sexuelle. Alors je pense que c’est important de rappeler, le consentement c’est tout le temps, partout, avec tout le monde et ça dépasse très largement le cadre de la sexualité. Et l’exemple typique c’est évidemment les grands-parents ou la famille étendue qui arrive à la maison et dit bonjour à tata, va faire un bisou. Et là on va directement entrer dans le malaise. Non, vos enfants en fait ne doivent la bise à personne.
Et à partir du moment où vous demandez à vos enfants, où vous ordonnez à vos enfants de « Allez, sois polie, va faire la bise », il se passe un truc en termes de consentement qui est grave et quelque part ça part pas d’une mauvaise intention et c’est ça je pense qui est important de le rappeler et les gens pensent bien faire parce que effectivement c’est quelque chose qu’on a toujours fait. On a toujours finalement considéré que les enfants n’étaient pas maîtres, maîtresses de leur propre corps, que leur corps finalement appartenait un peu aux autres, appartenait un peu à la société, et que pour faire plaisir aux autres, ils devaient accepter des gestes dont ils n’ont pas envie.
Voilà, on comprend que là, il y a déjà une espèce de rupture en fait, alors que la politesse, c’est de dire bonjour, s’il vous plaît, merci, au revoir, ça c’est la politesse. Tout le reste, ce sont des dogmes. Et considérez qu’être poli, c’est faire la bise, c’est un dogme qui n’est pas respectueux du consentement. Voilà, donc vos enfants, Le plus important, effectivement, c’est très… C’est posé au début du livre, leur corps, et c’est un peu la métaphore du château-corps, que château-fort, château-corps, les enfants le surnomment comme ça, que j’ai utilisé, ça leur appartient, c’est leur territoire, c’est leur intégrité physique, et nul ne peut y accéder sans leur consentement. Et ça, c’est important de leur dire tout de suite, très jeune, en fait, et de le respecter, et de le faire respecter souvent en tant qu’adulte.
C’est-à-dire, en fait, quand on voit un enfant qui refuse un geste, leur dire vraiment, non, il ne veut pas. Et c’est important de respecter qu’il ne veut pas faire la bise. Il a complètement raison de poser ses limites. Il est vraiment légitime à poser ses limites. Et si vous voulez la… Vraiment j’ai envie de dire le truc le plus poussé qui soit. Moi j’emmène parfois mes enfants dans des expos à Paris et je me suis retrouvée dans le transport en commun, dans le métro. Alors effectivement dans le métro il y a des gestes parfois ou même involontaire en fait et je revois ma numéro 2 qui hurle « Maman ! Il m’a touchée sur mon consentement ! »
Alors ma fille a très bien compris un truc, c’est que quand on touche et qu’elle n’a pas donné son consentement, elle est légitime à gueuler comme un putois. J’ai envie de lui dire, meuf t’as tout compris, voilà, c’est ça, vas-y, retiens que ça, c’est parfait. Et en fait cette espèce de, immédiatement, ça définit la ligne mais essentielle entre le consentement et le non-consentement, c’est-à-dire si on t’a pas demandé avant et que t’as pas donné ton accord de manière enthousiaste, etc. Alors on est déjà dans le non-consentement et c’est interdit et gueulent comme un putois. Très très fort. Et en fait, je me dis, mais en fait, inconsciemment, involontairement, je vais donner un outil majeur, en fait, pour le reste de ces jours. Et franchement, c’est merveilleux.
On donne aux enfants d’abord les moyens de se défendre, d’identifier ce qui est normal, ce qui n’est pas normal, et un cadre éventuellement pour pouvoir parler de ce qui a eu lieu, qui n’est pas normal.
Clémentine
Ça, c’est tout de suite pour les 5 ans, c’est la première chose que tu aimes apprendre, même bien avant d’ailleurs, sur le consentement, mais tu l’explicites un petit peu plus avec la notion de protection aussi qu’ils peuvent avoir pour eux. Des 5 ans, même bien avant, ils peuvent venir nous voir pour nous dire cette fameuse question. Maman, papa, comment on fait les bébés ? Donc je crois que c’est la question qui angoisse le plus les parents.
Charline
J’y réponds d’ailleurs pas tout de suite.
Clémentine
Bien sûr, c’est clair, c’est pas.
Charline
Une des premières questions. J’y vais doucement parce que c’est le chapitre 7 de mémoire, ou 8 pour les bébés. Effectivement là il faut grader en fonction de l’âge. D’ailleurs, quand ma numéro 2, c’était un sacré numéro sur le sujet, et je me revois très bien en fait, elle m’a cornérisée, elle est venue me voir dans la cuisine pendant que je préparais le dîner. Et elle me fait « Maman, il y a un truc que je comprends pas ». Et elle tenait le zizi sexuel, du coup, que je lui avais filé parce qu’elle avait plein de questions à l’époque. Et elle regarde l’image, elle fait… Bon, il y a un truc que je comprends pas, c’est comment la graine elle fait passer de la fille ou de la dame au monsieur.
Alors, elle regarde l’image, elle fait, en vrai, ça y est, je sais, je crois. C’est par le nombril. Tu vois, ils ont le nombril à la même hauteur, et en fait, ça passe par le nombril. Et en fait, c’est vrai qu’il manque l’étape. En fait, on ne voit pas la rencontre des gamètes. Et enfin où l’espèce de circulation des gamètes n’est pas représentée en tant que telle. Et ma fille, elle était persuadée que ça passait par le nombril. Et elle me fait « c’est le nombril maman ». Je fais « non, ce n’est pas le nombril, mais je t’expliquerai plus tard ». Elle me refait « non, je ne veux pas plus tard, je veux maintenant ». Je fais « ok ».
Je finis ma sauce et j’arrive dans ta chambre, donc elle m’attendait dans sa chambre de pied ferme et moi j’étais vraiment extrêmement et pourtant professionnelle du sujet, etc. Je me disais mais à cet âge-là, selon sa maturité, donc elle a sauté une classe, elle est très mature et tout, qu’est-ce qu’elle peut entendre en réalité ? Elle avait 7 ans. Et là je me dis, bon, elle était en CE2, qu’est-ce qu’elle peut entendre réellement à cet âge-là, en fait ? Et je me suis dit, mais ça se trouve, si je lui explique le principe de la reproduction des mammifères, et puis ça intervient à quel stade, en SVT, elle boit ça quand ? Mais je crois que c’est CM1, CM2, tu vois, je me suis dit, bon, en vrai, c’est pas si loin que ça. Est-ce que j’ai le droit de prendre de l’avance ?
Et j’ai fini par dire, OK, je me lance. J’ai essayé de lui expliquer le câlin d’amour. J’ai compris le câlin d’amour. Comment la graine, elle passe de là à là. Bon, on est parti. Donc là, j’ai pris un crayon et j’ai dessiné à main levée le dessin que tu vois sur réellement la reproduction des mammifères, c’est-à-dire et bien une pénétration phallovaginale avec le trajet du spermatozoïde, le trajet de l’ovule, et puis une rencontre et une fécondation. Et donc ça, ça a été un stade où il a fallu que je lui explique en même temps que je dessinais ce qui se passait.
Et donc je lui dis voilà, quand deux personnes s’aiment énormément, ils ont envie de créer ensemble un bébé, et bien ils décident de faire un câlin d’amour, et pendant le câlin d’amour, voilà ce qui se passe quand on a envie que les graines se rencontrent. Et donc voilà, je suis là, et donc je dois lui expliquer ce que je suis en train dessiner, donc pénis, érection, vagin, tu vois, je lui dessine tout ça, et je scrute en même temps son visage en disant ce qu’elle suit. Alors elle était complètement passionnée, elle était là, ouais ! D’accord ! Et là, ça se rend compte, tu vois, et en son différente… « Oui ! Tu m’as expliqué pour les règles le petit ni ! » Voilà, c’est ça, c’est ça.
Donc là, l’amidation, elle peut avoir lieu parce que du coup, entre temps, effectivement, il y a un petit ni douillet, voilà, donc elle avait complètement retenu le principe. Bref, et là je me dis, c’est quoi la suite en fait ? Je la regarde, je lui dis, est-ce que ça te suffit ? Est-ce que ça te va ? Et elle fait, attends-je reregarde, et elle me redit l’intégralité de ce que je viens de lui dire, et elle finit par me dire, ok, donc c’était pas par le nombril. « Mais, maman, pourquoi ils ne l’ont pas dessiné dans le livre ? » Je fais « Ben, parce qu’il y a plein de personnes qui pensent que ce que je t’ai expliqué, c’est extrêmement compliqué et que vous, en tant qu’enfant, vous ne pouvez pas comprendre. » Elle fait « Ben si, je peux comprendre, bon et elles sont prêtes quand les lasagnes ? » Et je fais « Ok, alors… » et littéralement on est partis manger tous ensemble et moi j’étais en train de me dire mais je suis à 120 battements par minute et ma fille elle a l’air de trouver que c’est le truc le plus cool et normal du monde et voilà elle a expliqué ça à tous ses camarades Et je me suis fait convoquer par les parents d’élèves en me disant, mais votre fille, elle explique des choses assez camarades qu’on aurait bien expliqué par nous-mêmes. Et c’est vrai qu’on a eu une discussion hyper intéressante. Alors que voilà, je ne pensais pas, je lui avais expliqué à ma fille, il y a des choses qui relèvent de l’intime, des choses qui et ça en fait, je me suis dit, est-ce que lui dire c’est un secret, c’était bienvenu ou pas ? Je me suis dit non, ça ce n’est pas un secret en réalité. Il faut bien se méfier des secrets qu’on ne peut pas dire. Et là, j’ai laissé ma fille gérer cette information. Et la réalité, c’est que ça a commencé à parler au sein de l’école, au sein des mamans qui sont venues me voir. Et en réalité, tout ça, ça a nourri l’idée d’un livre qui était nécessaire pour pouvoir… Parce que du coup, les mamans sont venues me dire, mais comment vous l’avez expliqué à votre fille ? Je dis, j’ai dessiné quelque chose, mais je crois que j’ai un projet pour vous, en fait.
Et ce livre, il est vraiment né, et je l’ai mis entre les mains des parents de l’école, et voilà, il a été très, très bien accueilli.
Clémentine
Quand on est parent et qu’on commence à être confronté à ces questions-là, de la part de nos enfants, par quoi on peut commencer pour aborder ce sujet-là ?
Charline
C’est-à-dire de manière générale ?
Clémentine
Oui, on n’a jamais encore abordé ce sujet avec ses enfants, on n’a pas trop eu de notions sur le consentement, on ne savait pas trop comment il fallait expliquer aux enfants tout ce qui est des parties du corps. Tu le conseillerais de commencer par quoi ?
Charline
Alors ça dépend à quel âge, en fait moi je dis souvent pour les parents qui sont plus jeunes, qui viennent me voir, d’enfants de 3 à 4 ans, je leur dis en vrai prenez déjà le livre parce que même si les explications elles commencent à partir de l’âge de 5 ans, il y a déjà dessins. Les dessins par contre ils sont complètement accessibles très très jeunes en fait parce qu’on nomme les parties du corps humain et vous pouvez déjà utiliser le livre pour nommer les parties du corps. Et vraiment appeler un chat, c’est un peu ce que je dis dès le début. Il n’y a pas de zizi, de zézette, etc. Et moi j’ai d’ailleurs fait un vrai travail autour de ce sujet-là.
La question, pourquoi est-ce que les adultes ont donné des surnoms aux parties génitales de leurs enfants, alors qu’on dit bien un nez, une bouche, voilà. Et ça c’est hyper intéressant, quand on creuse un peu, on s’aperçoit qu’en tant qu’adulte, on a tellement l’habitude de sexualiser ces parties du corps humain que pour marquer une forme de frontière et de ligne rouge, on va donner des petits noms mignons aux enfants pour exprimer que c’est la même chose mais pas sexualisé. Mais eux, avant d’être des objets de fantasmes et de désirs, ce sont des parties du corps humain. Et c’est à nous, adultes, en réalité, de faire un vrai travail d’apaisement sur le sujet et vraiment de prise de distance, de se rappeler que ce sont des parties juste du corps humain. Et c’est hyper intéressant, effectivement, les enfants se saisissent des mots qu’on leur donne.
Donc voilà, pénis, vulve etc. Mais il n’y a aucun problème à nommer correctement les parties du corps humain. Donc ça c’est la première chose. La deuxième chose, c’est de leur rappeler que leur corps leur appartient. Et très tôt, si possible, d’introduire cette notion de consentement. C’est-à-dire, est-ce que tu veux que je reste dans la salle de bain pendant que tu te douches ou pas ? Est-ce que tu veux que je sois là pendant que… Et voilà, en réalité, à partir de l’apprentissage de l’autonomie aux toilettes, je n’aime pas la propreté comme si c’était sale.
En réalité, à partir du moment où l’enfant est autonome, à la fois dans ses passages aux toilettes, mais également sous la douche, vous pouvez déjà proposer à l’enfant et bien de sortir de la pièce, de laisser gérer ça, en disant voilà c’est ton corps, c’est ton moment à toi, est-ce que tu préfères que je reste ou que je sorte ? Et voilà, et également d’avoir cette discussion parce que selon les familles, le degré de plus d’heures est très différent et selon les pays également. Il y a des endroits, typiquement en Finlande, c’est normal que le dimanche toute la famille soit à poil dans le sauna Et voilà, c’est culturel.
Ensuite, nous, on est plutôt un pays latin, plutôt un pays pudique, où il y a des familles qui sont plutôt pudiques, mais au sein même des familles, on va avoir des personnes qui se baladent à poil en permanence en sortant de la douche, et d’autres qui ne reviendraient même pas à l’idée de montrer quelques parties du corps que ce soit. Moi je trouve que c’est important d’avoir, au sein de la famille, une discussion sur est-ce que ça te met mal à l’aise ou pas. Et de respecter toujours, on se met au diapason de la personne la plus pudique. C’est un peu comme dans le bus, c’est la personne qui a le froid, qui détermine si on ouvre ou pas les fenêtres. Dans la maison, c’est la personne la plus pudique qui s’exprime et on respecte.
Si elle dit ça la dérange, et bien c’est pas compliqué, tout le monde se balade avec un peignoir. Finalement c’est pas compliqué, tu vois. Donc vraiment, ayez cette discussion et également prendre l’habitude de frapper avant d’entrer. Frapper dans les chambres, les salles de bain, les toilettes, pour bien faire comprendre à l’enfant qu’en fait ces espaces d’intimité sont légitimes. Et voilà, l’intimité, enfin le consentement, donc c’est pas vraiment là où on voit toutes les dimensions. C’est également par exemple Ma fille revient de colo et je lui dis est-ce que je peux te demander comment ça s’est passé ? Est-ce que tu as noué des amitiés ? Est-ce qu’il y a des personnes en particulier ou des parents que tu veux que je contacte pour que tu voies leurs enfants à un autre moment ?
Et si j’ai d’autres questions à poser, je vais lui demander si ce n’est pas indiscret ou est-ce que je peux te poser la question parce que ça relève d’une forme d’intimité, de sa vie à elle. Elle a 14 ans, la grande, c’est une ado, elle entre au lycée. Donc tu vois c’est vraiment en fait déjà dans un cercle de ça m’appartient à moi, c’est ma vie à moi d’ado. Je n’ai pas forcément envie de te raconter ça et du coup je pose la question en amont de savoir si c’est ok ou pas d’aborder tel sujet. Je trouve que c’est voilà donc en fait mes enfants ont l’habitude que le consentement, ça dépasse très largement, ce n’est évidemment pas sexuel, mais c’est tout ce qui est à trait à leur jardin secret, leur espace de maison, évidemment tout ce qui est autour de leur corps.
Le consentement et l’intimité, ça prend toutes ces dimensions-là. Et j’espère, et j’ose espérer, que tous les enfants qui perçoivent Ce genre d’éducation, moi je persiste à croire qu’on leur donne une conscience de leur propre territoire, de leurs propres limites, qu’ils sont légitimes de défendre, inouï en fait, vraiment.
Clémentine
Est-ce qu’il y a des sujets qu’on ne peut pas aborder avec eux ?
Charline
Le sexe. De parents. C’est vraiment un sujet, ça me semble la base, mais je pense que c’est important de le rappeler. Votre, ce qui se passe dans la chambre conjugale, ça ne regarde que vous, ça ne regarde pas vos enfants. Et ça, je pense que c’est une des difficultés majeures pour parler de sexualité à son enfant ou de vie affective avec son enfant. C’est bête mais il y a beaucoup de personnes qui ne sont pas capables ou qui n’ont pas fait le chemin encore aujourd’hui faire la part des choses entre ma sexualité et la sexualité. C’est absolument essentiel. Ne parlez pas du sujet tant que vous n’avez pas fait ce travail-là. Arrivez à dissocier votre sexualité de la sexualité ou de la vie affective. En fait, comme je dis souvent, il y a deux intimités à protéger.
Il y a celle de votre enfant et il y a la vôtre. Ce qui est vraiment compliqué, c’est comment on fait pour louvoyer entre ces deux intimités sans mordre ni d’un côté, donc on protège à fond son enfant et on n’entre pas sur des sujets intrusifs, malaisants, gênants, et en même temps on n’est pas en train de mordre sur la nôtre à dire des choses en fait, enfin on entre à entrer dans une forme de logique incestuelle à parler de sa propre sexualité à son enfant. Donc là, il y a vraiment des choses à faire, il y a un travail en amont à faire. Et si on ne l’a pas fait, abstenez-vous pour l’instant de le faire. Confiez-le à quelqu’un d’autre qui est capable de faire le distinguo.
Clémentine
Oui, parce que c’est ce que tu dis dans le livre, c’est qu’on ne peut pas tout dire à nos enfants sous prétexte qu’on veut les éduquer.
Charline
Ce n’est pas vos potes, en fait, vos enfants.
Clémentine
C’est que l’on a une posture parentale à respecter et de les protéger en leur donnant les informations qui sont adéquates.
Charline
Merci de parler de ça, Clémentine, parce que je pense qu’il y a des parents qui se disent bon, mais à quoi bon ? Alors, à quoi bon ? Très bien, on va en parler. Toutes les études, d’ailleurs, beaucoup sont en bibliographie dans le livre, menées sur le sujet. Elles sont absolument formelles et ce qui est passionnant, c’est qu’elles ont été abondées dans les principes directeurs de l’UNESCO. Donc c’est des études qui ont été menées à travers les plus de 180 pays reconnus par l’UNESCO, par l’ONU. Quel que soit le pays. Partout où on parle, on a des conversations avec les enfants, puis ados, en termes de sexualité, de consentement, d’intimité, etc. Plus il y a d’échanges, plus les enfants ont de connaissances sur le sujet, moins, sur les 15-24 ans, moins il y a d’IST d’abord.
Moins il y a de grossesses juvéniles non désirées, et moins il y a de violences sexuelles, que ce soit côté agresseurs ou victimes. Donc en réalité, éduquer c’est protéger. Éduquer c’est protéger, éduquer c’est protéger. Et là où les parents sont en panique, j’ai envie de leur dire, c’est normal d’être en panique. Je veux dire, on ne l’a jamais fait, c’est comme si… Si je faisais faire de l’escalade à quelqu’un qui n’a jamais été suspendu à 20 mètres de haut, il me dirait « j’ai peur ». Mais tu as raison d’avoir peur, on est tous, je reprends la métaphore de l’escalade ou de l’alpinisme, c’est normal que ça fasse peur. En revanche, vous allez voir que c’est un apprentissage, vos enfants vont apprendre, mais vous aussi vous allez apprendre.
Et je pense que c’est un peu ça, il faut s’ouvrir à ça, c’est de se dire « ok, on m’a rien transmis donc je vais m’aventurer sur un terrain où moi mes parents m’ont rien donné et c’est vraiment très difficile. Par contre donc on est une génération de parents pionniers, c’est un peu ce que j’écris dans le livre, il faut accepter que sur ce sujet là on est des pionniers. Par contre là où c’est très rassurant c’est que il y a déjà des pays et des programmes plus avancés que nous et on a quand même une bibliographie et des cohortes qui sont menées depuis 20-30 ans. Ça c’est quand même très rassurant. Et on peut savoir quel est l’impact de cette éducation depuis 20-30 ans dans les pays, dans les programmes où ça a été mis en place.
Et ce qu’on sait, c’est que depuis 20-30 ans, on voit une baisse drastique des IST, des grossesses non désirées et de la violence sexuelle partout où c’est mené. Donc je trouve que c’est extrêmement rassurant. Et le dernier truc, parce que du coup les parents me disent « ouais mais du coup si on leur en parle, ils vont avoir envie de faire plus… » Alors ça c’est vraiment le discours des parents quand j’interviens en lycée. Parce qu’en lycée, on parle de sexe. À partir de 15 ans, majorité sexuelle en France, on va aborder la question de la sexualité et du sexe. Et alors les parents, là, c’est la débandade en termes de peur, de panique morale. Là, on est sur « mais vous allez leur donner envie de faire du sexe ». Ben non, en fait, ça ne se passe pas comme ça.
Partout où ces programmes ont été menés, et encore aujourd’hui, on le voit bien dans l’étude de CSF Inserm qui a été délivrée, l’âge des premiers rapports est en train de reculer.
Clémentine
Oui, même plus tard que 17 ans du coup ?
Charline
C’est plus tard. On a perdu, en l’espace de 10 ans, on a quasiment perdu une demi-année. Donc en réalité, l’âge des premiers rapports… Donc là, on en parle de plus en plus, et l’âge des premiers rapports est plus tardif. On est effectivement dans cette logique qui se vérifie. En fait, plus on augmente le niveau d’information, plus on augmente le niveau d’exigence. C’est-à-dire, ok, donc moi, Ma première fois, j’aimerais que ce soit avec une personne avec qui on a pu parler de consentement avant, éventuellement faire nos dépistages, parler de charges contraceptives, etc. Donc ça c’est génial, donc en fait on donne beaucoup d’informations qui vont permettre à ce que ça ait lieu dans des bonnes conditions. Donc ça ne leur donne pas envie de faire plus tôt, ça leur donne envie de faire mieux. Et c’est ça vraiment le pivot.
Clémentine
Tu disais qu’on est une génération de parents pionniers qui pourtant n’avons pas vraiment eu d’éducation autour de ces sujets-là. Moi j’ai été élevée par des parents un peu 68 ans, donc il n’y avait pas de compte autour de ce sujet, mais il n’y avait pas non plus d’explication concrète, tu vois ce que je veux dire, ou d’orientation. Mon père m’a emmené faire le test pour la prise de sang pour la pilule, mes parents étaient très proactifs, mais il n’y avait pas de discussion autour de ça. Et donc on est une génération de pionniers qui en plus avons souvent eu le stigma de la honte et de ses salles. Et il ne faut surtout pas en parler. Comment on fait en tant que parents ?
Je me rends compte que j’ai eu de la chance d’avoir eu des parents qui ne m’ont pas fait porter ce poids-là sur les épaules, mais j’imagine que quand on a tout ce bagage sur nous, on commence à être à l’aise avec ce sujet-là, sans parler de ce que tu as dit tout à l’heure sur les violences sexuelles, mais juste de se dire, je n’ai pas le monde de parler de sexe.
Charline
Je pense qu’il faut lire le livre pour enfants, parce que c’est en lisant le livre qu’on se rend compte que c’est pas sorcier, vraiment au sens littéral du terme. Moi je peux comprendre que ça fasse peur, etc. Déjà, je pense qu’outre les pages pour les enfants, il y a des pages parents. Je pense qu’il y a quelque chose de l’ordre. J’avais envie de prendre les parents dans mes bras et de leur faire un gros calinou, en mode je sais que c’est horriblement dur. Désolée, je suis désolée, t’es en panique à cause de moi là. Mais ça va aller. En fait, vraiment, ça va aller. Moi, je pense qu’il n’y a pas de miracle, il n’y a pas une baguette magique.
Il y a lire le livre tranquillement, si possible, si vous êtes en couple, en train d’élever vos enfants à deux, lisez-le à deux aussi ce livre. Je trouve que c’est intéressant. Moi, j’aime bien parler de partage équitable des charges parentales, domestiques, etc. J’aimerais bien également, je pense qu’on a beaucoup parlé des mères, il faut parler des pères également. Je pense que parler des parents au sens très large, n’hésitez pas en fait également. Il y a un côté où vous n’êtes pas seul et j’espère vraiment que vous n’allez pas être seul sur le sujet. J’entends également des mecs qui suivent le compte, qu’on pourrait penser un peu déconstruits, me dire ouais mais moi c’est une fille, je préfère que ce soit sa mère qui lui en parle. Ben, pourquoi ? En fait, pourquoi ?
Il y a un sujet de vraiment, parlez-en du coup, en plus il y a beaucoup de parents séparés, parlez-en entre vous, moi je trouve que c’est quand même super important pour qu’il y ait une forme de relais ou de continuité pédagogique. Je pense que par exemple, quand on donne une éducation positive non violente à son enfant, c’est important qu’on en parle de ce sujet entre parents.
Clémentine
Si les deux ne sont pas raccords, c’est difficile.
Charline
Exactement. Je pense que c’est un peu la même chose sur ce sujet-là. N’hésitez pas également à en parler entre parents, de voir également à quel point vous venez d’horizons différents. Et chez toi, on en parlait, on n’en parlait pas. Comment tu as grandi, comment tu as appris ? Je trouve que c’est hyper intéressant. Ce que j’adore dans la parentalité, c’est hyper réflexif. C’est en voyant nos enfants que ça nous renvoie nous-mêmes à comment on s’est éduqué sur le sujet, comment on a appris, ce qui nous a manqué, etc. Je trouve que c’est intéressant d’aider cette discussion-là avec votre partenaire. Vous allez voir, c’est quand même passionnant. Et derrière, de se dire, bon, ben alors, OK, toi, tu prends quelle partie ? Tu prends quelles questions ? On y va comment ?
Et je trouve que c’est bien qu’il y ait un relais de ne pas être seule non plus sur le sujet.
Clémentine
Oui, donc en fait, la honte, elle s’enlève aussi parce qu’on est une équipe. Si on est avec un coparent, on peut dire, ce sujet-là, c’est trop difficile pour moi. Est-ce que tu peux prendre le relais ? Ce sujet-là, je suis plus à l’aise.
Charline
Et entre fratries et copines également. Par exemple il y en a une qui me dit pour moi je me sentais pas de l’aborder avec ma fille parce que j’ai vécu des choses très dures et en fait avec ma soeur on adore ton compte donc je lui ai demandé si elle était ok d’être la tata de référence. Je trouvais ça génial en fait je me disais mais c’est formidable. Ce qui est important c’est que l’enfant ait un adulte ou des adultes de référence pour en parler.
Moi j’ai trouvé ça très bien que cette femme elle se protège elle a complètement raison de se protéger et si la tata elle est à fond voilà la tata hyper ouverte d’esprit qui adore parler de ça bon faut lui dire quand même tu parles pas de ta propre vie à mon gosse quand même s’il te plaît Mais si tu te sens à l’aise d’avoir leurs questions, de passer du temps avec tes neveux nièces pour répondre à leurs questions et tout, mais trop bien ! Donc voilà, et je pense qu’entre copines, on pourrait également imaginer se dire, ok, il y en a une qui est un peu plus à l’aise pour aborder le sujet, ou ne serait-ce que parler entre copines du livre, de comment on peut aborder, ou ce qu’ils vous posent comme questions, comment vous leur répondez.
En fait, on va sortir du tabou en parlant. Enfin, il faut libérer la parole sur le sujet et pas seulement la parole des enfants, mais surtout aussi des adultes. Parlez-en entre vous. Voyez comment vous abordez le sujet. Il y a des tips. Chacune va dire à moi. Généralement, je profite du moment où on est le soir en train de se coucher pour faire ça. D’autres qui vont dire non, moi, c’est toujours au petit-déj. C’est très drôle, il y a des timings différents, vous allez voir. Moi je trouve que c’est trop bien. N’hésitez pas du coup à en parler, à vous sentir vous, entourés, formés des teams. Et s’il n’y a pas de coparents, encore une fois, il y a la famille et les potes.
Clémentine
Et tu parlais tout à l’heure des parents qui ont peur que leur fille ou fils lise le livre alors que ce n’était pas la bonne pastille. Et j’avoue, je n’avais même pas réfléchi comme ça. Je l’ai laissé dans la chambre de ma fille, qui a bientôt 8 ans, et elle m’a sorti un truc de la page du livre. Et j’ai mis du temps à comprendre qu’elle parlait de ça. Et oui, parce que dans le livre, elle disait ça. Parce qu’on ne l’avait pas lue ensemble, moi je l’avais lue de mon côté. J’étais là, ok, ben en fait t’as été voir. Elle me l’a très bien expliqué avec, tu vois, elle avait bien compris. Et j’étais là, bon ben en fait elle était capable de lire cette… C’était pas du tout une partie dans les 10+, mais on n’avait pas été encore à aborder ça.
Et je me dis qu’en fait il faut aussi leur faire confiance dans ce qu’ils sont capables de… Ce à quoi ils vont s’intéresser en fait d’eux-mêmes.
Charline
C’est exactement ce qu’on se disait tout à l’heure, les parents paniquent parce que le livre a disparu dans la chambre. Ils me disent, en vrai, si votre enfant l’a pris pour le lire, notamment des passages, c’est qu’en fait, il ou elle est en âge, en capacité de gérer ça. Sinon, il ne serait pas allé sur ces terrains-là.
Clémentine
Moi ça m’a frappé de me dire en fait elle l’a pris, elle l’a manipulé. Parce que comme tu le dis aussi il y a des très belles illustrations, c’est visuel, les enfants ils adorent quand même.
Charline
Pour qu’on parle quand même de Stomy Buzzy, de Juliette Mercier qui a fait les illustrations.
Clémentine
Qui sont vraiment chouettes.
Charline
Et vraiment Juliette qui…
Clémentine
Je vous montre la page sur Youtube. De toutes les formes de seins qu’on peut avoir. Et une fois mes petites elles sont tombées sur ça pour dire, toi maman c’est plutôt comme ça ! Et mon mari était à côté était mort de rire.
Charline
J’adore !
Clémentine
Et eux ils le prennent, sur les dessins c’est chouette.
Charline
J’aime beaucoup la candeur avec laquelle les enfants prennent ça, on en revient à ce qu’on disait, c’est que nous On a tellement un passif de sexualisation. Les enfants, non, pas encore. Surtout sur cette tranche de l’âge-là, ils n’ont pas encore été exposés à des images non désirées, non désirables. C’est hyper intéressant de voir leur candeur sur le sujet, leur fraîcheur. Moi, je t’avoue que…
Clémentine
C’est trop chouette. Est-ce qu’on peut faire un truc ? Où je prends, j’ai regardé 2-3 questions, on va prendre une question par chaque tranche d’âge. Et comme ça tu peux nous faire un petit pitch de comment on peut écrire.
Charline
C’est le moment où je me dis, je l’ai écrit il y a 4 ans, j’espère que je me souviens de tout !
Clémentine
Alors si je prends la question 17, c’est pour les 5-8 ans. Elle dit pourquoi je ne peux pas me toucher devant tout le monde ? Question intéressante.
Charline
C’est hyper intéressant. De ce sujet de la masturbation infantile, je pense que là pour le coup on est vraiment sur le terrain le plus malaisant parce que pour les parents la masturbation c’est forcément un acte sexuel alors que pour les enfants ce n’est pas le cas. Et je pense que c’est quand même important de le rappeler On a des échographies où on voit des fœtus qui se touchent in-utéro. Et ça, je trouve ça passionnant. On a des enfants qui se touchent depuis la naissance. Et puis on estime que les enfants prépubères, donc avant la puberté, pratiquent à 85% la masturbation infantile.
Donc on est sur quelque chose de majeur que les parents préfèrent ne pas voir, mais que toutes les personnes qui s’occupent des enfants demandaient Voilà, au personnel de maternelle ce qui se passe dans les dortoirs, en réalité beaucoup beaucoup d’enfants se touchent d’une manière ou d’une autre. Et en même temps c’est le bon moment pour commencer à parler d’intimité et de consentement. Donc quand vous avez votre enfant qui est en train par exemple de se… Enfin voilà, il y en a qui se mettent sur l’accoudoir du canap, d’autres qui ont un coussin entre les jambes, et qu’on comprend qu’il se passe un frottement qui procure du plaisir, c’est le bon moment pour leur dire en fait ce que tu fais c’est complètement ok, c’est hyper naturel, normal.
La seule chose qui est importante c’est que tu le fasses dans un endroit tranquille, par exemple dans ta chambre, pour à la fois préserver ton intimité et celle des autres. Voilà, c’est tout. Ça tient en une phrase. Inviter son enfant à pouvoir continuer cette activité, mais en solo, à l’abri des.
Clémentine
Regards, etc. Qui donne du plaisir, parce que moi je sais que je leur positive beaucoup ce mot-là, surtout chez les filles, j’ai trois filles.
Charline
En fait j’ai un soulagement, tu sais que ce que tu es en train de dire, t’en as même pas conscience en fait, à quel point c’est inaudible par une quantité de parents hallucinante. Quand j’interviens par exemple au collège et que je monte les slides aux parents, donc j’ai un petit zoom des parents avant les interventions, En fait, sur la masturbation par exemple, et même plus tard, ce slide pose toujours problème. Les parents refusent complètement qu’on aborde le sujet de la masturbation. Et en fait, quand je creuse un peu, c’est genre dit, est-ce que la masturbation des ados, garçons, vous choque ? Non. En réalité, on comprend bien que ce qui pose problème pour les parents, c’est de s’imaginer que ces ados, filles, puissent avoir une sexualité solo et du plaisir.
On sent qu’il y a un bug majeur, notamment chez les mamans, parce que dans le zoom des parents, il y a beaucoup de mamans, Et je me dis, c’est d’une tristesse inouïe, en termes de misogynie intériorisée, de ne pas pouvoir être réceptive au fait qu’effectivement, les ados, même les filles, quand je t’entends parler de cette notion de plaisir, t’as même pas conscience à quel point c’est révolutionnaire finalement.
Clémentine
C’est sûr que moi, j’ai pas entendu ces deux mots-là, tu sais, masturbation féminine et plaisir. J’ai plus entendu, non, on n’en fait pas ou on ne parle pas de mes parents, mais tu vois, de la société en général.
Charline
En mode le chaming.
Clémentine
Oui, exactement. Et c’est vrai que moi je m’efforce à inverser ça pour que mes filles n’aient jamais honte de se dire que, de toute façon elles se touchent comme tous les enfants quasiment, de se dire ben en fait c’est ok de se donner du plaisir.
Charline
C’est complètement ok. Et tu fais bien de le replacer sur l’angle des sensations. C’est-à-dire en fait, parce que c’est comme ça que l’enfant le découvre. Et c’est aussi bête que ça. C’est-à-dire les enfants ils prennent tous les jouets etc. Et ils mettent dans la bouche. Ils ont bien compris que les guilis, les chatouilles, ça fait rigoler, ça donne du plaisir. Quand tu te coinces les mains dans une porte, c’est pas agréable. Quand on tire les cheveux, c’est pas agréable. Et tiens, quand je mets la main là, c’est vachement agréable. Ou quand je me frotte là, c’est vachement agréable. En réalité les enfants ils sont drivées comme pour la nourriture d’ailleurs. Le chocolat c’est vachement bon, les bonbons aussi. On est vraiment des êtres extrêmement sensoriels et en fait on est driveés par ces sensations-là.
Et les enfants ne font pas ça de manière sexuelle, ils font ça effectivement pour cette sensation de plaisir.
Clémentine
Mais nous aussi d’ailleurs les adultes.
Charline
Au passage !
Clémentine
Mais j’avoue que je leur dis jamais, moi aussi je le fais, je ne sexualise pas ma propre pratique, mais je leur explique, c’est ok. Après moi ce qui est dur, j’ai trois filles, elles passent leur vie à se regarder, les enfants ils ont un vissément d’intimité, mais attends je voudrais voir tes fesses quand même ! Non, tu peux pas !
Charline
C’est à moi rien de rire et puis encore une fois, ma numéro 2 qui était un vrai numéro sur le sujet, c’est là où je me suis dit, je l’invitais, elle, à l’intimité.
Clémentine
Ton intimité c’est…
Charline
En fait, autant le respecter ça. Elle aimait bien raconter ses séances solo. J’étais là en disant ben en fait alors les autres ne sont pas forcément consentants pour entendre ça c’est hyper intéressant donc là aussi tu poses le cas du consentement c’est pas un secret au sens de c’est pas on n’est pas dans ce genre de secret là non t’as le droit d’en parler à nous on est voilà on consent à écouter voilà ça reste quand même ton intimité donc voilà c’est juste que potentiellement ça peut mettre d’autres personnes mal à l’aise sur ce sujet là mais c’était à mourir de rire c’est comme quand elle nous convoque J’ai rangé ma chambre, venez voir !
Ok, donc voilà, et puis il y avait les doudous qui étaient sur le mur au-dessus de son ligne, je dis c’est marrant, ils sont pas du tout rangés dans l’ordre de taille, elle fait mais non mais ça c’est… Celui-là je l’utilise beaucoup, celui-là un peu moins, celui-là encore un peu moins, elles les avaient rangés par ordre masturbatoire décroissant, quoi. C’était à mourir de rire ! Et c’est trop… C’est absolument… Voilà.
Clémentine
C’est génial, parce qu’ils ont une vision qui est beaucoup plus saine que nous. Ils se cachent pas de… Et encore une fois, c’est comme on disait, en tant que fille, c’est assumer de se prendre du plaisir.
Charline
Et c’est ok.
Clémentine
Parce que, comme tu dis, c’est fou quand tu vas voir les parents qui te disent, ouais, les garçons ados qui se masturbent, ouais, c’est normal.
Charline
Pour eux, c’est normal et les filles, c’est honteux, en fait.
Clémentine
Nous, on se tient à carreaux et jamais on ne touche à l’accessoire.
Charline
Pour elle, je pense qu’il y a une intériorisation. Elle s’imagine tout de suite que si leur fille apprenait ça, ça lui donnerait envie d’explorer. J’espère bien ! Et que derrière, ça la placerait d’emblée dans la catégorie du slut-shaming. Je pense que les mères, elles ne pensent pas à mal quand elles réagissent comme ça à ma conférence. Je pars du principe que tout le monde est bien intentionné et que leur réaction, c’est une réaction qui va venir soulever des questions sur nos dogmes sociétaux.
Clémentine
Et tu vois, elles le voient plus comme un slut shame, au lieu de se dire qu’elles vont gagner en pouvoir. Tu vois, si on change de vision.
Charline
C’Est peut-être plus facile.
Clémentine
Mais une fille qui a du pouvoir, ça fait peur.
Charline
Aussi. Je réponds tellement longuement à chaque question, je n’arrive pas à me couper.
Clémentine
Avant dernière question, pour les 7-10 ans, c’est quoi la puberté ?
Charline
Hyper intéressant ! J’en ai parlé encore ce week-end avec mon dernier qui a 11 ans. Et en fait, je lui dis, c’est vraiment le moment où on passe entre l’enfant, le stade enfant et adulte. Vraiment, c’est un truc très essentiel. Je lui dis, OK, mais du coup, qu’est-ce que les adultes peuvent faire que les enfants ne peuvent pas faire ? Ils peuvent avoir des bébés. Effectivement, c’est le moment où on est capable de se reproduire. On produit des gamètes et on est capable d’assurer la survie de l’espèce. Effectivement, ce moment de transition entre on est enfant, on est adulte, on l’appelle l’adolescence. Et effectivement, c’est toute une série de d’évolution à la fois physique, mais également mentale, psychologique, sociétale, c’est au moment de la puberté que ça se déroule, sachant que c’est en réalité un passage qui peut durer des années.
Et c’est ça qui est important pour les garçons, ça commence à 11-12 ans, ça se finit vers 17-18 ans. En réalité, la puberté c’est un voyage, et on ne sait pas quand ça commence, on sait à peu près quand ça finit, et effectivement le corps va largement évoluer. Et on va effectivement à un moment commencer à produire des gamètes. C’est marrant d’entendre mon gamin de 11 ans dire oui je sais bientôt je vais pouvoir produire des gamètes. Si tu veux tu peux le voir comme ça. Effectivement c’est très scientifique. Mais voilà, on a effectivement toutes les hormones sexuelles qui se mettent en route. Je pense que c’est quand même important de le rappeler, le cycle menstruel qui arrive, les premières éjaculations, le sperme qui produit.
Et ça c’est la partie, c’est qu’une partie infiniment, et quelque part peut-être pas la plus visible, mais c’est surtout les caractéristiques sexuelles secondaires. Il y a les boobs qui arrivent, la voix qui mue, les épaules qui s’élargissent, les hanches, les poils, etc. Voilà, c’est ça l’espèce de truc en forme, les boutons d’acné, enfin on a tout le package qui arrive, qui déferle, et franchement voilà. Et ça demande quand même beaucoup de réassurance. Moi j’ai trois ados, du coup j’ai 14, 13 et 11 à la maison. Donc ouais, il y en a eu 33 ans, donc là on savait qu’à un moment on aurait trois ados en même temps, tu vois. Et c’est génial, chacune à son rythme très différent, il se chambre avec beaucoup de douceur, non pas du tout, sur leurs caractéristiques sexuelles secondaires, sur qui sort, sur les boutons, c’est trop mignon.
Et puis le dernier enfant qui est un garçon, on a l’impression à cet âge-là que la différence est bien plus importante parce que la maturité est enclenchée très rapidement chez les filles et effectivement chez les garçons il y a un décalage.
Clémentine
Et en plus c’est le plus petit.
Charline
En plus c’est le plus petit, donc là t’as vraiment l’impression, c’est très très drôle parce que du coup elles font clan, tu vois. Les deux grandes, etc. Mais c’est génial, je pense que là effectivement on sent les prémices de la puberté qui arrivent tout doucement, tu sens l’énergie qui change effectivement. Moi je trouve que c’est absolument passionnant ces évolutions.
Clémentine
Tu me rassures parce que moi aussi j’ai eu trois enfants en quatre ans et demi, donc je vais être comme toi à un moment, je vais avoir du douze et du seize ans et demi.
Charline
Moi j’adore cette phase-là.
Clémentine
Et je me dis ok l’adolescence genre trois filles en même temps.
Charline
C’est génial.
Clémentine
Éclore.
Charline
Non mais c’est génial. Enfin tu verrais, moi j’ai un souvenir, elles étaient hyper branchées sur leur puberté évidemment. Et donc je revois la grande qui revient du collège et qui fait « Maman, est-ce quelque chose de marron sur ma culotte ça peut être mes premières réactions ? » « oui ! » Et alors elle était là « J’ai pondu ! » Bah tout du coup j’avais les ovaires qui pondent un ovocyte. « Ouais, tu ne vas pas le voir de la maison. » C’est marrant, elle a dit « J’ai pondu. » J’ai fait « Oui, t’as pondu. » Elle a parcouru toute la maison. C’était la fête quoi ! Et elle a fait « Maman j’ai gagné quoi ? » Vraiment pour elle c’était une célébration, les premières règles c’est « Maman j’ai droit à quoi ?
» Et j’ai dit « Ben tu penses à quoi ? » « Ben tu m’avais dit que je pourrais choisir ma protection » Effectivement il y a tout un passage là-dessus. Et du coup elle dit « Ben moi j’ai choisi la culotte menstruelle, est-ce que je peux m’acheter ? » Du coup on était allé effectivement choisir des culottes menstruelles pour fêter ses premières règles, elle était trop contente. Et voilà, c’est fou, quand sa sœur a eu ses règles deux mois plus tard, elle était trop contente de pouvoir la guider sur comment on entretient ses culottes menstruelles, etc. La transmission, elle se font entre sœurs. En fait, ce n’est pas un sujet. On sait exactement quand tout le monde a ses règles, y compris mon mari, qui est au fait de Ben non, là on ne va pas prévoir quelque chose de trop…
Parce que c’est les premiers jours des règles de Naomi, elle est un peu fatiguée. Alors on va essayer de prévoir un truc un peu plus calme comme Rando ce jour-là. En fait, on est tous… C’est un non-sujet, on s’adapte, le cycle menstruel de tout le monde fait partie de la vie de la famille.
Clémentine
Chez moi, c’est clair que ça va être aussi ça.
Charline
Alors du coup, si tout le monde.
Clémentine
À chaque semaine en a une…
Charline
Je me dis en vrai, vous allez avoir une couverture mensuelle.
Clémentine
Mais c’est bien, j’aime bien écouter, c’est trop intéressant.
Charline
Parlez-en, moi j’ai mis les règles, ça apparaît dans l’agenda, les miennes, celle des filles. Parce que du coup on peut aussi projeter les phases de SPM où c’est moins facile, que ce soit pour moi ou pour mes filles, que ce soit juste avant ou pendant les règles. Typiquement, moi je suis du style à tuyauter un peu le numéro 3, qui peut être un peu speed, en disant non mais là ta sœur elle va bientôt avoir ses règles, ou alors elle commence à avoir ses règles, elle est très fatiguée. Donc vraiment, tu te calmes et tu multiplies les gestes. Typiquement, il y a une répartition notamment des tâches domestiques à la maison et les enfants participent. Voilà, il y a le tableau. Effectivement, c’est dans ces moments-là où je lui dis, là, elle est fatiguée, elle est partie après le repas.
Je sais que c’est son kiff, mais c’est toi qui vas le faire parce qu’elle a ses règles et c’est un non sujet. Il le fait, quoi. C’est vrai que je pense que l’éducation, notamment des garçons au sujet, est essentielle.
Clémentine
Ouais, ça fera des meilleurs pairs déjà, si jamais ils veulent l’être.
Charline
Ouais, et puis des meilleurs partenaires s’ils sont hétéros.
Clémentine
C’est clair. Dernière question pour les 10 ans et plus. Comment on parle d’éjaculation ?
Charline
Bah de manière très scientifique ! Non mais c’est ça, c’est-à-dire en fait, d’abord on récapitule effectivement pourquoi ça arrive. C’est quand même à la base censée juste nous permettre de reproduire l’espèce humaine. En survie de l’espèce humaine, et que tous les mammifères ont le même processus, et ça je trouve ça assez cool de rappeler que ce n’est pas juste les humains, mais ça marche pareil. Typiquement quand vous visitez, les personnes véganes vont me détester, mais c’est comme ça. Mais quand on visite des fermes, etc. Et qu’on parle dans ce manquement, etc. En fait, mes enfants comprennent très rapidement ce qui se passe. Effectivement, pour tout le monde, pour se reproduire, il y a ça. Et les éjaculations, elles arrivent à la puberté. Avec une composition où il y a plein d’ingrédients dedans.
J’ai pris beaucoup de plaisir à rappeler que c’est quand même un processus hyper intéressant qui se fait au moment où il y a une érection. Et il y a un circuit, le circuit de production et d’expulsion du sperme. Je t’avoue que ça a été un des grands fou rires en fait d’écriture de ce livre. Parce que du coup il y a mon éditrice qui relit le livre et elle fait « Oh ! Mais je savais pas ! » Pour tout le monde, je rappelle qu’il y a quand même quatre organes qui participent à la production de sperme. Donc il y a les testicules avec les épididymes.
Ensuite ça va chercher dans la prostate, la vésicule séminale, il y a un peu de résidus des glandes de Kauper, donc ça fait quatre organes qui participent et puis il y a ce fameux point de non-retour où derrière c’est expulsé et le circuit se fait en l’espace de 2-3 secondes et elle me dit mais en fait moi bêtement je pensais que le sperme bah je sais pas c’était comme je sais pas moi la maillot chez McDo genre t’appuies et ça sort. Je ne pensais pas que c’était quelque chose qui était… C’est une fabrication vraiment du sur mesure, à chaque fois, vraiment exactement sur le moment. Et ça se fait vraiment… Je trouve que c’est assez miraculeux de voir comment le corps humain fonctionne. Et à la fin, effectivement, c’est 5-10 millilitres.
Et la quantité de spermatozoïdes sur cette quantité-là est ridicule, on est en dessous de 10%. Et voilà, effectivement, c’est ces petits nageurs-là qui sont censés un jour… Effectivement, ils sont là à la base, et tout ça s’est fait à la base pour qu’on puisse avoir des rencontres de gamètes. Mais dans la réalité, ça va sortir au moment de la puberté, et puis… Je pense que j’en parle un peu dans ce livre et surtout dans l’autre, mais en fait, le corps, je crois que c’est pour les 15 ans que j’en parle, c’est dans le deuxième livre. En fait, moi, je dis ça au lycée parce qu’il y a quand même une phase au lycée où les garçons se remettent à mouiller leur lit.
C’est quand même une phase qui n’est pas simple que ça à gérer quand t’es au lycée et que tu te retrouves avec des éjaculations nocturnes. Donc là, ça, c’est pas pour les enfants, mais c’est Je continue pour ceux qui ont des ados. Ce n’est pas simple à gérer, de mouiller ces draps alors qu’on n’est plus un enfant. Et moi, c’est quelque chose dont je parle avec mes classes. Effectivement, je leur dis que le corps est une machine extrêmement bien faite. Donc effectivement, au moment de la puberté, quand ça bat son plein, je peux vous faire une imitation de ce qui se passe en ce moment même dans vos testicules. Vous voyez le hamster dans sa cage, c’est ce qui se passe en ce moment. Et du coup, ça envoie effectivement la testostérone d’abord, partout.
D’où la moustache qui apparaît de manière complètement anarchique, l’acné, tout ça. Et puis les poids, la mue, la voix qui fait des trucs très bizarres, et les libidos, et effectivement des cycles érectiles qui apparaissent quand même, il y en a entre 10 et 20 par 24 heures, et avec aussi une vraie… Alors là les érections elles sont à répétition parce qu’il y a une quantité de testostérone, et puis aussi beaucoup, tout d’un coup, une énorme production de spermatozoïdes et de sperme. Le corps en est, mais submergé. Il y a deux manières. Soit on se masturbe pour évacuer ça, et ce qui n’est pas évacué de manière volontaire à travers la masturbation est évacué de toute manière. Pendant la nuit, pendant le sommeil paradoxal, ce sont les éjaculations nocturnes. Et donc voilà, ce phénomène, il est complètement normal, c’est complètement OK.
La seule chose que tu peux faire, c’est éventuellement prendre en charge le nettoyage de tes draps pour pas que ce soit tes parents qui a géré ça. Et c’est tout, c’est un non-sujet, mais c’est vrai que quand je parle de ça en classe, je vois tout de suite des regards, les filles découvrent souvent ce qui se passe.
Clémentine
Moi c’est en lisant le livre, parce que je pense que ce n’est vraiment pas un sujet qu’on aborde sur l’éjaculation, on connaît. Non mais tu vois, je me suis dit, on leur reproche aux hommes de rien connaître et moi je me suis fait la réflexion, mais moi je ne connais même pas leur fonctionnement d’érection et d’éjaculation par la suite.
Charline
Mais ça c’est passionnant parce que du coup c’est ce que je constate ce qui est beau dans les classes et c’est pour ça que moi je n’aime pas faire des classes sur ces sujets là. Ouais j’aime bien faire les ensembles parce qu’en fait les mecs ils découvrent en même temps, tu vois typiquement on parle des éjaculations donc les meufs elles sont avec des grands yeux en train de découvrir que leurs potes, parce qu’elles pensent qu’elles ont, et on va en parler, leurs règles, le SPM à gérer, que c’est hyper chaud et que eux, pendant ce temps là, ils sont en mode cuicui les petits oiseaux, c’est tout simple. C’est pas la même chose, mais ils ont quand même ce truc à gérer et c’est pas simple que ça que d’apprivoiser leur organe. Donc voilà, il y a quand même un truc.
Et puis les mecs découvrent aussi ce que vivent les filles. Et on parle beaucoup de fierté menstruelle dans mes classes, c’est-à-dire Il y en a marre du tabou des règles. Donc ce n’est pas sale, c’est naturel. Et surtout, je leur dis, je pense que vous ne rendez même pas compte quand vous avez des DM à faire le week-end et que, par exemple, toi, Paul, t’as eu 18 et Eléa a eu aussi un 18, par exemple. En réalité, vous dites, c’est la même note. Sauf que Eléa, potentiellement, sur le week-end, en fait, et bien elle avait un SPM pas possible, ça veut dire que concrètement il y a un toboggan hormonal de chute d’œstrogène et de progestérone qui fait que c’est ce qu’on appelle une dépression chimique.
Concrètement ça vient quand même largement inhiber la recapture de sérotonine et c’est quand même extrêmement dur de positiver et d’être bien dans ces moments-là. Donc elle était juste en train de se dire que c’était une grosse merde. Que de toute façon elle a des fous foirés, qu’en plus personne ne l’aime, qu’elle est trop malheureuse et que personne ne la considère comme pour la prendre au sérieux, enfin elle était dans son truc de… Et enfin, ça s’est arrêté de ruminer dans sa tête parce qu’elle a commencé enfin à se vider de son sang, voilà, en douillant avec des crampes pas possibles. Et voilà et qu’elle devait changer de protection plusieurs fois dans la journée tellement c’était intense et elle avait du mal à faire autre chose tellement elle avait mal au bide et elle a quand même écrit son devoir.
Et donc toi t’as un 18 et elle a un 18. Mais est-ce que tu te rends compte que c’est pas un 18 qu’elle a, c’est un 25 sur 20 en fait. Et c’est ça qu’elle a vécu et qu’elle vit en silence. Et en plus de ça, elle ne peut pas le dire parce que c’est un peu la honte de dire que tu as tes règles. Donc elle vit tout ça en silence. Elle vit tout ça et en silence, donc la double peine. Donc moi, en fait, vraiment, je vous encourage. À dire là c’est très dur pour moi parce que je suis censée avoir mes règles demain et aujourd’hui vraiment je vois tout en noir.
Donc s’il vous plaît voilà juste faites moi des gros câlins et dites moi que je suis la meilleure aujourd’hui parce que c’est ma dernière journée en théorie avant mes règles et c’est hardcore en ce moment. Ou alors là, c’est mes règles et du coup, autour de vous, les gens portent votre sac, vous amènent des bouillottes, du chocolat et autre chose. Mais la réalité, c’est en parlant du sujet que tout d’un coup, on fait naître, outre la connaissance, on fait naître de l’empathie. L’empathie, c’est le mot clé. C’est-à-dire les mecs comprennent ce que vivent les meufs comprennent ce que vivent les mecs. Il y a quand même quelque chose qui se…
Enfin, dans les regards dans la classe, il y a un truc qui se passe de, mais en vrai, on va essayer d’être un peu plus à l’écoute, un peu plus en douceur et surtout en empathie avec les autres. Donc voilà, parlons d’éjaculation.
Clémentine
C’est bien en départie de l’éjaculation, on.
Charline
Peut finir sur l’empathie, c’est magnifique.
Clémentine
Mais donc, ça montre bien que ce que tu fais, tu vois, l’éducation positive à la sexualité, ça amène des connaissances, une protection et de l’empathie.
Charline
En fait, on fait société ensemble et je pense que c’est un peu clé pour moi. Cette éducation, elle aide vraiment tout le monde à nous faire comprendre à quel point ce qu’on vit, c’est éminemment humain, c’est éminemment commun à tout le monde, en même temps il y a des singularités, et surtout ce n’est pas tabou. Et plus on en parlera, plus on normalisera le fait que les autres soient à l’écoute de ce qui nous arrive. Aujourd’hui on le voit bien sur d’autres choses comme l’endométriose, etc. C’est en parlant des sujets, en sensibilisant, en éduquant tout le monde qu’on fait naître une forme d’empathie sur ce que chacune vit. Si on n’a pas cette parole-là, si on n’a pas cette éducation, alors on n’y arrivera pas. Donc il n’y a plus aucun tabou à avoir.
Clémentine
Donc procurez-vous ce livre, corps, amour, sexualité, les 120 questions que vos enfants vont vous poser. Parce qu’ils vont vous les poser, comme tu l’as dit, de toute façon, donc autant être bien armé pour répondre.
Charline
Et faites-le avant qu’Internet ne le fasse, surtout.
Clémentine
Exactement, c’est bien. On a plus de connaissances, nous, qu’Internet, évidemment.
Charline
Évidemment.
Clémentine
En tout cas, on a de l’empathie, nous. Merci beaucoup.
Charline
Avec grand plaisir, merci Clémentine.
Clémentine
Merci Charline d’avoir accepté de venir.
Charline
Oui, et bon courage les parents.